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Pour Ali Khamenei, des "agents de l'ennemi" pilotent les manifestations en Iran

Ali Khamenei photographié le 12 octobre 2022. [Keystone/AP - Office of the Iranian Supreme Leader]
Pour Ali Khamenei, des "agents de l'ennemi" pilotent les manifestations en Iran / Le Journal horaire / 31 sec. / le 12 octobre 2022
Le guide suprême de l'Iran Ali Khamenei a réaffirmé mercredi que des "ennemis" étaient impliqués dans les émeutes déclenchées il y a un mois par la mort de Mahsa Amini, arrêtée par la police des moeurs. Depuis, plus de 100 personnes ont été tuées dans la répression.

Le 3 octobre, dans sa première réaction aux manifestations, l'ayatollah Khamenei avait déjà accusé les Etats-Unis, Israël et leurs "agents" d'avoir fomenté le mouvement de contestation.

Celui-ci secoue l'Iran depuis la mort le 16 septembre de Mahsa Amini, une Kurde iranienne de 22 ans décédée trois jours après son arrestation à Téhéran par la police des moeurs. Elle lui reprochait d'avoir enfreint le code vestimentaire de la République islamique pour les femmes, en particulier le port obligatoire du voile.

>> Lire aussi : Mahnaz Shirali: "Le voile n'est qu'un prétexte, la jeunesse iranienne vise la chute du régime"

L'ennemi "enseigne la fabrication de matériaux incendiaires"

"Aujourd'hui, tout le monde confirme l'implication des ennemis dans ces émeutes de rue", a affirmé l'ayatollah lors d'une réunion avec les membres d'un organe clé de l'Etat chargé de conseiller le guide suprême.

"Les actions de l'ennemi, telles que la propagande, les tentatives d'influencer les esprits, de créer de l'excitation, d'encourager et même d'enseigner la fabrication de matériaux incendiaires, sont maintenant complètement claires", a-t-il poursuivi, sans nommer cette fois-ci les "ennemis".

Des centaines d'arrestations

Plus tôt mercredi, l'Autorité judiciaire avait fait état de l'inculpation de 125 personnes liées aux manifestations dans la capitale Téhéran et à Hormozgan dans le sud. "Certaines de ces personnes sont soit des agents de l'ennemi, soit (...) alignées avec l'ennemi et certaines sont des personnes excitées", a affirmé Ali Khamenei. "Les autorités judiciaires et de sécurité doivent faire leur devoir" vis-à-vis des "agents de l'ennemi", a-t-il encore estimé.

Depuis le 16 septembre, au moins 108 personnes, selon l'ONG Iran Human Rights (IHR) basée en Norvège, ont été tuées en Iran dans la répression des manifestations. Il s'agit principalement des manifestants eux-mêmes, mais aussi de membres des forces de sécurité. Des centaines d'autres ont été arrêtés dans plusieurs villes du pays (lire encadré).

L'Unicef s'est déclarée lundi "très inquiète" des informations faisant état "d'enfants et d'adolescents tués, blessés et arrêtés", tandis que la Société iranienne pour la protection des droits des enfants a dénoncé la "violence" exercée contre eux.

>> Revoir l'hommage du 19h30 à une jeune manifestante tuée la semaine dernière en Iran :

Chronique "Vu": Nika Shakarami, morte à 16 ans en manifestant dans les rues de Téhéran, est le nouveau visage de la révolte des femmes en Iran
Chronique "Vu": Nika Shakarami, morte à 16 ans en manifestant dans les rues de Téhéran, est le nouveau visage de la révolte des femmes en Iran / 19h30 / 2 min. / le 7 octobre 2022

agences/vic

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Nouveaux appels à manifester

Les forces de sécurité iraniennes ont tiré mercredi à Téhéran du gaz lacrymogène pour disperser une manifestation d'avocats qui scandaient "Femmes, vie, liberté", d'après des images diffusées par l'organisation Iran Human Rights (IHR). Ailleurs dans la capitale, des protestataires ont chanté "nous ne voulons pas des spectateurs, venez nous rejoindre" à l'université Azad, selon d'autres images publiées par l'IHR.

Des appels à descendre dans la rue avaient de nouveau été lancés mercredi pour dénoncer la sanglante répression des manifestations déclenchées il y a près d'un mois par la mort de Mahsa Amini. "Soyez la voix de Sanandaj", pouvait-on lire sur un tract distribué par des militants et diffusé sur les réseaux sociaux. Cette ville, capitale du Kurdistan, la province du nord-ouest de l'Iran d'où était originaire Mahsa Amini, a été le théâtre d'importantes manifestations sévèrement réprimées. Des ONG ont accusé les autorités d'avoir bombardé certains quartiers d'habitation.

D'autres appels à manifester mercredi "en solidarité avec le peuple héroïque de Zahedan", capitale de la province du Sistan-Baloutchistan (sud-est) où les forces de sécurité ont tué au moins 93 autres personnes dans des heurts distincts, ont aussi été lancés.

Blocage massif du réseau internet

Malgré une répression meurtrière, le mouvement de contestation, le plus important en Iran depuis celui de 2019 contre la hausse du prix de l'essence, ne faiblit pas.

>> Lire à ce sujet : La colère ne diminue pas en Iran après un mois de manifestations

Avant les manifestations de mercredi, le site NetBlocks, qui observe les blocages d'internet à travers le monde, a constaté en matinée "une perturbation majeure du trafic internet en Iran". Cela "limitera probablement encore davantage la libre circulation d'informations (...)", a-t-il indiqué sur Twitter.

Selon des analystes, les manifestations s'avèrent particulièrement difficiles à gérer pour le guide suprême iranien Ali Khamenei, 83 ans, en raison de leur durée et de leur nature multiforme, allant des manifestations aux actes de défi individuels.