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Patrick Odier critique certaines banques suisses

Patrick Odier refuse de céder au chantage américain. [Steffen Schmidt - Keystone]
Pour Patrick Odier, les institutions qui se sont mal comportées doivent endosser leur responsabilité. - [Steffen Schmidt - Keystone]
Patrick Odier, président de l'Association suisse des banquiers (ASB) qualifie d'"incompréhensible" l'attitude de certaines banques, qui ont repris, après l'affaire UBS, des clients de la grande banque. Christoph Blocher fustige pour sa part la stratégie du Conseil fédéral dans le dossier du différend fiscal avec les Etats-Unis.

Si l'acte d'accusation pesant contre la banque Wegelin (à lire: Différend fiscal ) se révélait vrai, il s'agit "d'une complète contradiction avec la stratégie de la place financière", a souligné Patrick Odier dans une interview publiée samedi dans la "Neue Zürcher Zeitung". "Des institutions, qui se sont mal comportées, doivent endosser leur responsabilité pour cela", a-t-il ajouté.

Il ne faut pas faire d'amalgames et mettre 300 banques dans le même sac. Le sérieux de la situation a été, en général, reconnu. "Il y a une prise de conscience qui se fait: une entreprise qui travaille dans des zones grises, à la limite de la légalité, n'a pas d'avenir", a-t-il souligné.

Selon lui, il est certain que, depuis 20 ans, la croissance de la place financière suisse provient très largement de sources totalement différentes de celles pouvant être associées à l'évasion fiscale.

Des cas particuliers

D'après Patrick Odier, les dix autres banques particulièrement ciblées par les autorités américaines représentent également des cas particuliers. "Pour autant qu'il y ait faute reconnue, à elles d'assumer pleinement les erreurs de comportement potentielles", affirme-t-il.

Le directeur de l'ASB se dit également convaincu que Washington ne veut pas s'attaquer en première ligne aux banques. Les Américains veulent simplement prélever leurs impôts. "Et nous devons l'accepter, pour autant que les frontières du droit d'un pays soient respectées".

Accord nécessaire

Wegelin [Ennio Leanza]
Wegelin [Ennio Leanza]

Patrick Odier "reste convaincu que les Américains ne vont pas utiliser cette affaire (Wegelin) pour refuser un accord" de double imposition. Par conséquent, il faut absolument que le Conseil national donne son feu vert, lors de la prochaine session, à cet accord. "Sinon la situation va dégénérer". Patrick Odier ne veut toutefois pas d'une livraison de données par le biais du droit d'urgence.

Et de préciser, dans "Le Temps", que la place financière est amenée à poursuivre encore plus activement une solution globale et définitive qui passe par le règlement du passé et un engagement sur l'avenir.

L'ASB a du reste édicté un code de conduite pour la signature des accords sur l'impôt libératoire. Accepté in extenso par les banques, il est en oeuvre depuis quelques mois alors que les accords ne sont pas encore entrés en vigueur.

Être plus pro-actif

Pour le président de l'ASB, la Suisse peut être plus pro-active et donner l'exemple dans l'établissement de nouveaux standards internationaux, en matière de lutte contre le blanchiment comme elle l'a déjà fait ou, à l'avenir, de lutte contre les délits fiscaux. Il est cependant important que la Suisse s'assure que ce qu'elle fait chez elle soit aussi fait ailleurs, qu'elle ne se fasse pas dominer par des pressions de concurrence économique.

Patrick Odier fait allusion à l'éventuel double langage des Etats-Unis, en référence au peu de zèle qu'ils mettent à combattre l'évasion fiscale dans certains de leurs Etats comme le Delaware.

Le "Times" prend position

Le New York Times s'est par ailleurs fendu jeudi d'un éditorial où il revient sur les déboires des banques suisses suite à l'offensive du fisc américain, et les enjeux des négociations en cours entre Berne et Washington. Le journal encourage les autorités fiscales américaines à faire preuve de fermeté dans ce dossier.

ats/pima

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Ch. Blocher attaque le Conseil fédéral

L'ancien conseiller fédéral Christoph Blocher tire à boulets rouges sur la stratégie du gouvernement dans le différend fiscal avec les Etats-Unis. En livrant des données bancaires, le Conseil fédéral a affaibli sa position dès le début.

Dans cette "guerre économique" que mène Washington contre les banques, la Suisse aurait dû combattre les Etats-Unis avec leurs propres armes, déclare l'ancien ministre de la Justice samedi dans une interview parue dans le "Tages-Anzeiger" et le "Bund".

Le Zurichois reproche au gouvernement de ne pas comprendre la mentalité américaine: "Si les Américains formulent des exigences, ils attendent qu'on leur fasse front". Dans ce différend, les Etats-Unis considèrent le fléchissement du Conseil fédéral comme un aveu de culpabilité, poursuit Christoph Blocher.

Des doutes sur le négociateur

"Des avocats américains m'ont demandé ce qui se passe avec la Suisse", ajoute-t-il. Les partenaires helvétiques étaient jadis hautement appréciés des Américains: ils passaient certes pour bornés, mais aussi pour être efficaces.

Au négociateur suisse, le secrétaire d'Etat Michael Ambühl, Christoph Blocher reproche de vouloir présenter trop rapidement des résultats. "Et je doute qu'il montre les dents aux Américains".

De plus, le Département fédéral des finances est selon lui mal préparé. "J'attends depuis longtemps qu'une délégation du Conseil fédéral se rende à Washington pour expliquer notre point de vue et qu'il tende le miroir au gouvernement américain".