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Un quart des ayant-droit renoncent à demander l'aide sociale en Suisse

Les détails pour tous les cantons romands des conséquences de ces nouvelles normes de calcul de l’aide sociale, sur l’aide aux familles nombreuses, l’entretien des jeunes adultes et l’augmentation des sanctions. [Keystone - Salvatore Di Nolfi]
Près d'un quart des personnes qui auraient droit à l'aide sociale y renoncent / Le Journal du matin / 1 min. / le 17 août 2016
Près d'un quart des personnes qui auraient droit à l'aide sociale renoncent à cette prestation, révèle une enquête de la Haute école spécialisée bernoise, publiée mardi.

Pour la première fois, une enquête menée par l'institution bernoise détaille cette réalité. En cause, la stigmatisation et un sentiment de honte, qui dissuadent bien souvent les ayant-droit.

Si le phénomène est connu, les collectivités publiques manquent pourtant de données pour le chiffrer et mieux l'évaluer.

Honte plus marquée dans les villages

Sur le terrain, la situation diffère dans les centres urbains ou dans les campagnes. Alors que 14% des ayant-droit renoncent à l'aide sociale dans les villes, la proportion augmente et peut atteindre jusqu'à 50% dans les villages, où le rapport de proximité avec les employés communaux, et la honte qui peut en découler, freine les demandes.

Les auteurs de l'étude bernoise estiment que ces chiffres indiquent une tendance nationale. Les cantons manquent toutefois de données.

Etude demandée à Genève

A Genève, plusieurs organisations ont ainsi mandaté la Haute école sociale pour analyser le phénomène.

"Cette étude va nous permettre d'avoir une meilleure compréhension de ce qui se passe pour des personnes qui ont choisi - ou pas - d'être en situation de non-recours", précise Alain Bolle, directeur du Centre social protestant.

De nombreux professionnels de l'action sociale l'affirment, ces non-demandes sont à prendre au sérieux, car elles augmenteraient la facture finale pour la collectivité.

Surendettement et précarisation

"Certaines de ces personnes ont dans un premier temps recours à leur réseau, qui les soutient, mais dans un deuxième temps, elles se retrouvent dans une situation de surendettement et de précarité de plus en plus importante. La facture finale, si on y intègre notamment les coûts de santé, est beaucoup plus élevée que si ces personnes avaient eu accès à l'aide sociale", explique Alain Bolle.

Pour certains, la solution pourrait passer par la centralisation des requêtes à un échelon plus impersonnel.

Il faut mettre en place des conditions-cadres qui permettent un vrai choix - si tant est que la précarité offre des choix.

Martine Kurth


"Il ne s'agit pas forcément de convaincre toutes les personnes qui ont droit à l'aide sociale de la demander. Il s'agit de mettre en place des conditions cadre qui permettent un vrai choix - si tant est que la précarité offre des choix", explique Martine Kurth, secrétaire générale de l'Association romande et tessinoise des institutions d'action sociale.

"Il faut mettre en place des structures professionnelles, non-stigmatisantes, et qui permettent d'éviter la honte et la difficulté, notamment dans les villages, d'admettre qu'on n'a pas assez", estime la responsable.

"Remettre les responsabilités à leur place"

Pour Martine Kurth, la société doit également revoir certains jugements de valeur. "Il s'agit aussi de remettre les responsabilités là où elles sont: si des personnes bénéficient de l'aide sociale parce que leur salaire est trop bas, ce n'est pas leur responsabilité mais celle des entreprises, et c'est la responsabilité de la société d'accepter cela."

Julien Bangerter/kkub

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