La loi sur le renseignement à nouveau débattue au Parlement [Keystone]
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Le renforcement du renseignement à nouveau débattu au Parlement

Le projet de loi sur le renseignement vise à donner davantage de moyens au Service de renseignement de la Confédération, notamment pour lutter contre le terrorisme.

Le texte, accepté en mars par le Conseil national, doit maintenant passer devant le Conseil des Etats. Rejeté par la gauche, qui brandit la menace d'un référendum, il suscite de vives inquiétudes concernant la protection des données.

Jessica Vial

La nouvelle loi en bref

Quatre points-clef

Hacking: le dispositif sera allégé concernant les infiltrations dans des systèmes informatiques à l'étranger. Celles-ci seront décidées par le ministre de la Défense, après consultation de ses collègues du Département de justice et police et des affaires étrangères. Concernant le hacking à l'étranger, le Conseil fédéral sera seul compétent pour trancher.

Drones: le SRC n'aura pas besoin d'autorisation pour observer et enregistrer des événements dans des lieux publics ou privés, via des drones par exemple. Il pourra aussi faire enregistrer les signaux sur Internet. Pas question toutefois d'y toucher si l'émetteur et le récepteur se trouvent en Suisse. En cas de menace grave et imminente, le Conseil fédéral pourra confier au SRC des missions allant au-delà des buts de la loi.

Surveillance: une autorité indépendante sera créée. Son chef sera nommé par le Conseil fédéral. A plus long terme, le SRC pourrait même être surveillé par une instance extérieure à l'administration. Une instance autonome s'ajoutera pour examiner l’exploration radio et d'Internet.

Transparence: le SRC ne pourra pas procéder à des interpellations, cette compétence relevant de la police. Les données sans lien avec une menace spécifique ne devront pas être utilisées et devront être détruites 30 jours après la fin de l'opération. Les données résiduelles ne devront pas être stockées plus de dix ans. Une liste de critères a été établie pour la transmission de données à des autorités étrangères.

22 septembre 2015

Vers un référendum

La Chambre basse a levé les dernières divergences sur la loi sur le renseignement. La votation finale devrait donc avoir lieu vendredi.

Au vu des nombreuses cautèles ajoutées au fil des débats, le peuple risque fortement de devoir se prononcer sur la question.

Jugée "dangereuse" par la gauche

Les Verts, notamment, dénoncent une atteinte aux libertés personnelles et brandissent la menace d'une nouvelle "affaire des fiches".

Dans un communiqué, le Parti pirate a enjoint les parlementaires de reconsidérer leur position. En cas d'acceptation du texte vendredi lors du vote final, il va lancer le référendum contre la loi, qu'il juge "dangereuse" et "liberticide".

Les renseignements seront mieux armés pour lutter contre le terrorisme

7 septembre 2015

Encore des divergences

La loi sur le renseignement est à nouveau au menu de la dernière session parlementaire de la législature.

Dans la procédure d'élimination des divergences, le National s'est finalement rallié à l'idée d'une plus forte surveillance du SRC.

Après avoir rechigné en mars, la Chambre du peuple a adopté tacitement le concept de l'autorité indépendante de surveillance, tout en le complétant. Le chef de ce nouvel organe serait nommé par le Conseil fédéral.

Retour aux Etats

Mais certaines divergences subsistent. Les deux Chambres n'ont par exemple pas pas réussi à se mettre d'accord sur l'infiltration dans des systèmes informatiques à l'étranger pour des recherches d'informations.

Par ailleurs, contrairement à la Chambre des cantons, le National veut soumettre en partie le SRC à la loi sur la transparence.

Le Conseil des Etats devra donc à nouveau se prononcer lors de la prochaine session.

17 juin 2015

Autorité de surveillance indépendante

Le Conseil des Etats a décidé de soumettre les services secrets à une autorité de surveillance indépendante. Cet organe devra vérifier la légalité, l'adéquation et l'efficacité des activités du Service de renseignement de la Confédération (SRC). Ses contrôles devront, en outre, être coordonnés avec les activités de surveillance parlementaires.

Le dossier retourne désormais au National.

11 juin 2015

La suite du débat reportée aux Etats

Le débat sur la loi sur le renseignement a débuté au Conseil des Etats. Notre suivi sur Twitter:

La question cruciale était de savoir à quel point les libertés individuelles peuvent être restreintes au nom de la sécurité publique.

Il faut réduire la liberté d’une minorité de criminels pour garantir celle de la majorité des gens.

Ueli Maurer, conseiller fédéral en charge de la Défense

Pour le conseiller fédéral Ueli Maurer, la réponse est toute trouvée: "Il faut réduire la liberté d’une minorité de criminels pour garantir celle de la majorité des gens".

Entrée en matière

Le socialiste saint-gallois Paul Rechsteiner a pour sa part demandé que son conseil n'entre pas en matière. Il a dénoncé une loi qui donne trop de pouvoirs au service de renseignement, rappelant que des centaines de milliers de personnes ont été fichées en Suisse au temps de la guerre froide.

Lors du vote sur l'entrée en matière, une nette majorité s'est dessinée en faveur d'une loi, y compris à gauche. L'absence de loi ou une loi lacunaire donnerait trop de liberté au Service de renseignements de la Confédération (SRC) qui pourrait ainsi agir comme il le souhaite.

La discussion de la suite de la loi a été reportée au 17 juin, la séance du jour se terminant.

>> Le compte-rendu des débats de la matinée :

Le Conseil des Etats lors de la session d'été 2015. [Keystone - Peter Klaunzer]Keystone - Peter Klaunzer
La nouvelle loi sur le renseignement débattue au Conseil des Etats / Le 12h30 / 1 min. / le 11 juin 2015

20 mai 2015

La commission des Etats veut des précisions

La Commission de la politique de sécurité du Conseil des Etats s'est ralliée au renforcement de l'arsenal des services secrets validé par le National. Elle clarifie toutefois certains points.

Elle propose notamment d'ajouter à la liste des mesures l'infiltration dans des systèmes informatiques à l'étranger en vue d'acquérir des informations.

Plusieurs mesures sont ainsi proposées pour renforcer le concept, notamment la création d'une autorité de surveillance autonome et indépendante, rattachée au DDPS sur le plan administratif.

6 mai 2015

Projet similaire décrié en France

La même problématique est discutée en parallèle en France, où l'Assemblée nationale a adopté le 6 mai en première lecture, par 438 voix contre 86, un projet de loi sur le renseignement.

Cette loi vise notamment à légaliser les pratiques clandestines des services de renseignement, principalement dans la lutte contre le terrorisme, après les attentats de janvier dernier. Elle doit encore passer devant le Sénat.

>> Lire : Loi sur le renseignement en France adoptée par l'Assemblée nationale

Trop intrusif

Les associations de défense des libertés ont dénoncé l'introduction de méthodes trop intrusives au nom de la lutte contre le terrorisme.

>> Revoir le sujet du 19h30 :

Le projet de loi sur le renseignement dénoncé à Paris
Le projet de loi sur le renseignement dénoncé à Paris / L'actu en vidéo / 1 min. / le 5 mai 2015

Soutiens à la loi

"Protection des citoyens" avancée par Ueli Maurer

Le ministre de la Défense Ueli Maurer a justifié l'octroi de certains outils intrusifs au SRC par la "protection de la liberté des citoyens, lorsque que la sécurité est sérieusement menacée". Selon lui, cet arsenal ne concernerait donc que dix ou douze cas par année.

Il sera difficile d'expliquer à la population pourquoi on devrait protéger des gens qui menacent la paix du monde (...) qui planifient des attentats terroristes et assassinent, ou qui espionnent notre pays

Ueli Maurer, ministre de la Défense

"Il sera difficile d'expliquer à la population pourquoi on devrait protéger des gens qui menacent la paix du monde avec des armes de destruction massive, qui planifient des attentats terroristes et assassinent, ou qui espionnent notre pays", a-t-il argumenté.

Détecter les actes terroristes

A quelques exceptions près, le PDC, le PLR et l'UDC ont défendu la nouvelle loi. Nombreux sont ceux qui ont dit vouloir augmenter les chances de "détection précoce" d'actes terroristes.

>> Les explications de Christian Lüscher (PLR/GE) dans Forum :

Le conseiller national PLR genevois Christian Lüscher. [Lukas Lehmann]Lukas Lehmann
Le National favorable à une extension de l'arsenal des services secrets / Forum / 8 min. / le 17 mars 2015

17 juin 2015

Polémique

Les Verts, le PS et les Vert'Libéraux, opposés au projet, ont avancé la crainte d'une nouvelle "affaire des fiches", comme celle survenue en Suisse en 1989, voire d'un "Big Brother" veillant sur les réseaux de communication.

Avant même la fin des débats, la gauche de l'hémicycle avait d'ores et déjà annoncé qu'elle risquait de porter cette loi devant le peuple si le Conseil des Etats ne corrigeait pas le tir.

Quelques réactions...

Aline Trede (Verts/BE): "Des permis d'armes pour le cheval de Troie de l'Etat acceptés par 130 voix contre 45 au Parlement. Le référendum est dans l'air"

Yannick Buttet (PDC/VS): "Un référendum... je me réjouis de cette discussion. Cela montrera qui soutiendra nos concitoyens et qui non".

"Une chose est claire: si le Conseil des Etats ne parvient pas à corriger massivement la LRens, un référendum sera inévitable".

Vers une alliance improbable?

Le référendum qui se profile à l'horizon pourrait unir les partis de gauche... à la jeunesse UDC. Lukas Reimann (UDC/SG), qui en est l'une des figures, a estimé lors de la session "très probable" que le référendum vienne de ses rangs.

L'inquiétude de l'adjoint au préposé à la protection des données:

17 mars 2015

Le projet de loi avalisé

La gauche du Conseil national n'a pas réussi à corriger la loi sur le renseignement. Les Verts et le PS demandaient plusieurs modifications quant aux méthodes et à l'encadrement du SRC.

Ils souhaitaient par exemple que les renseignements suisses soient davantage transparents en matière de protection des données, et que leur contrôle soit renforcé, notamment via le Conseil fédéral.

Opposition croissante

Les rangs de l'opposition ont doublé lors du vote final par rapport à l'entrée en matière. Mais avec le soutien de presque toute la droite, le projet a passé la rampe facilement, par 119 voix contre 65 et cinq abstentions.

>> Lire : Le National favorable à une extension de l'arsenal des services secrets

>> Le résumé de la journée dans le 19h30 :

Loi sur le Renseignement: le débat a porté sur la fiabilité et l’honnêteté des services secrets
Loi sur le Renseignement: le débat a porté sur la fiabilité et l’honnêteté des services secrets / 19h30 / 2 min. / le 17 mars 2015

>> Les explications d'Alain Rebetez à Berne :

Loi sur le Renseignement: les explications d’Alain Rebetez à Berne
Loi sur le Renseignement: les explications d’Alain Rebetez à Berne / 19h30 / 1 min. / le 17 mars 2015

17 mars 2015

"Frondeurs" au PS et à l'UDC

Le débat sur les moyens à accorder au Service de renseignement de la Confédération, opposant l'argument de la sécurité nationale à la menace de l'Etat fouineur, a révélé des lignes de fracture au sein même des partis.

Deux conseillers nationaux UDC, Lukas Reimann (SG) et Pirmin Schwander (SZ), se sont acharnés à rejeter, envers et contre leur parti, presque chaque point de la nouvelle LRens.

Chez les socialistes, le débat interne a également provoqué des dissensions. Le parti a accepté d'entrer en matière, mais lors du vote final, la "gauche matraque" s'est résumée à trois abstentions et au "oui" du Zurichois Daniel Jositsch, seul socialiste à adopter une position sécuritaire.

>> Ecouter le sujet du Journal du Matin :

Débat au National sur la loi sur le renseignement. [Keystone - Peter Klaunzer]Keystone - Peter Klaunzer
Des membres de l'UDC et du PS votent à l'encontre de leur parti sur la loi sur le renseignement / Le Journal du matin / 1 min. / le 18 mars 2015

Nouveaux pouvoirs du SRC

Ce qui changerait avec la LRens

Les nouvelles mesures visent à donner davantage de moyens au Service de renseignement de la Confédération (SRC) pour lutter contre le terrorisme et l'espionnage.

Le SRC pourrait donc procéder à des "recherches spéciales":

- Surveiller des communications (courriers, téléphone, courriel) moyennant une autorisation limitée dans le temps.

- Observer des faits dans des lieux privés (et au besoin y installer des micros)

- Perquisitionner secrètement des systèmes informatiques et y installer des "chevaux de Troie"

Interdiction d'organisations criminelles

La nouvelle loi donne aussi la possibilité au Conseil fédéral, sans recourir au droit d'urgence, d'interdire en Suisse des organisations criminelles, comme il l'a fait récemment pour l'Etat islamique. Ce point a été ajouté par le National.

16 mars 2015

Entrée en matière au National

Par 154 voix contre 33, le National est entré en matière sur la nouvelle loi sur le renseignement.

Les partis de gauche ont pourtant affirmé qu'il existait un danger pour les libertés personnelles. Daniel Vischer (Verts/ZH) a notamment dénoncé une volonté de surveillance généralisée. Selon lui, le seuil du tolérable sera franchi en matière d'observation préventive.

Le Service de renseignement de la Confédération pourra agir sans qu'il y ait soupçon de délit pénal, a affirmé l'élu zurichois.

>> Lire : Les services secrets suisses devraient voir leurs moyens renforcés

>> Écouter l'interview d'Alexis Roussel, président du Parti pirate suisse, sur les enjeux de la loi en matière de vie privée :

Alexis Roussel, vice-président du parti pirate suisse. [parti pirate genevois]parti pirate genevois
Réforme de la Loi sur le renseignement, une atteinte à la vie privée? / Le Journal du matin / 6 min. / le 16 mars 2015

Le Service de renseignement de la Confédération

Tâches et champ d'action

Mandats et domaines d'activité du SRC. [www.vbs.admin.ch]
Mandats et domaines d'activité du SRC. [www.vbs.admin.ch]

Chronologie

Les renseignements en Suisse

La surveillance et le renseignement en Suisse étaient à la charge de la police fédérale et du service de renseignement du groupement de l'état-major général depuis 1969, ainsi que du Ministère public de la Confédération dès 1971.

Octobre 2008: la Loi fédérale sur le renseignement civil, qui vise à encadrer les services de renseignement de la Confédération, est adoptée par le Parlement.

1er janvier 2009: un nouveau service d'analyse et de prévention (SAP) s'occupe du renseignement intérieur. Il fusionne avec le Service du renseignement stratégie en mars pour former le Service de renseignement de la Confédération (SRC). Toutes les questions d'espionnage et de surveillance interne ou externe sont ainsi centralisées.

Contexte

Lutte contre le terrorisme

La majorité du Conseil national a estimé nécessaire, lors de la session de printemps du Parlement en mars dernier, d'offrir davantage de moyens au Service de renseignement de la Confédération (SRC) afin, notamment, de lutter contre le terrorisme. La Chambre basse a donc accepté le projet de nouvelle loi sur le renseignement (LRens).

Les exactions du groupe Etat islamique ainsi que les attentats de Paris et de Copenhague en janvier dernier ont joué un rôle déterminant dans le débat.

De nombreuses craintes ont toutefois été formulées par les partis de gauche, notamment celle d'une nouvelle "affaire des fiches" ou d'une surveillance généralisée du réseau internet.