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Le recul des glaciers crée de nouveaux écosystèmes

De la végétation a apparu à la Pointe de Boveire. [Christophe Randin]
Le recul des glaciers crée de nouveaux écosystèmes / La Matinale / 1 min. / le 23 août 2023
Avec le réchauffement climatique vient le recul des glaciers qui laisse la place à de nouveaux écosystèmes. La montée des températures, aussi à haute altitude, libère des espaces vierges alpins. Les scientifiques suivent l'évolution des espèces et de la flore dans ces nouveaux territoires.

Au niveau mondial, les glaciers pourraient perdre la moitié de leurs surfaces d'ici la fin du siècle. Cela va donner naissance à de nouveaux écosystèmes dont le statut est encore incertain, souligne une étude avec participation suisse publiée dans la revue Nature.

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Selon l'évolution du réchauffement climatique, le recul des glaciers va libérer une superficie estimée entre trois fois et demie et huit fois la surface de la Suisse, ont calculé les scientifiques, une équipe interdisciplinaire franco-suisse.

Matthias Huss fore un trou pour un jalon gradué afin de déterminer la fonte; ces données aident à mieux documenter et comprendre la perte de masse des glaciers. [ESL - Clara Streule]
Matthias Huss fore un trou pour un jalon gradué afin de déterminer la fonte; ces données aident à mieux documenter et comprendre la perte de masse des glaciers. [ESL - Clara Streule]

Cela aura pour conséquence une des modifications les plus rapides des écosystèmes terrestres, a indiqué à Keystone-ATS Matthias Huss, glaciologue à l'Ecole polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ) et coauteur de cette recherche. Avoir une compréhension de ces écosystèmes post-glaciaires est important, a ajouté le chercheur.

Une colonisation opportuniste

Christophe Randin, chercheur à l'Université de Lausanne et directeur du Jardin botanique Flore-Alpe, arpente les Alpes valaisannes. Cette semaine, il s'est notamment rendu vers le glacier du Petit Combin, qui recule, comme les autres, et laisse derrière lui de grands espaces colonisés par la végétation.

Celle-ci ne pousse pas selon le rythme habituel avec les pionnières d'abord, puis les autres plantes.C'est comme si la flore se précipitait, explique-t-il au micro de La Matinale: "C'est plutôt l'open bar! C'est la végétation qui colonise de manière opportuniste sans qu'il y ait vraiment cette structuration avec des végétations pionnières, ensuite des buissons, la formation des sols et puis des arbres. On voit qu'on a tous ces types de végétations qui arrivent en même temps".

Mais toutes ces plantes arriveront-elles à stabiliser le sol et ses sédiments libérés par la fonte du glacier? "L'enjeu c'est de savoir ce qui va se passer avec l'augmentation des événements extrêmes. Maintenant, il fait trop chaud, mais peut-être que dans quelques semaines, on va avoir des pluies extrêmes et, avec la sécheresse, cela va mobiliser des sédiments qui sont derrière ces glaciers. Si ces sédiments ne sont pas tenus par la végétation, ils partent dans le fond des vallées". Et ils pourraient donc représenter un risque pour tout ce qui se trouve en aval.

Une vue du glacier de Gries, le vendredi 2 septembre 2022. Le Griesgletscher est actuellement un des glaciers qui fond le plus rapidement en Suisse. [Keystone - Jean-Christophe Bott]
Une vue du glacier de Gries, le vendredi 2 septembre 2022. Le Griesgletscher est actuellement un des glaciers qui fond le plus rapidement en Suisse. [Keystone - Jean-Christophe Bott]

De nouvelles zones à protéger

Les nouveaux écosystèmes post-glaciaires pourraient notamment servir de refuge à des espèces chassées d'autres endroits par le réchauffement. Selon Matthias Huss, "ces nouvelles surfaces libérées de leur glace doivent être placées sous protection". Actuellement, au niveau mondial seule la moitié des zones recouvertes par les glaciers l'est.

La modélisation des scientifiques montre que jusqu'en 2040, le recul des glaciers va se poursuivre au même rythme indépendamment du scénario climatique. Pour la suite, jusqu'en 2100, les estimations vont d'une perte oscillant entre 22% avec des mesures fortes et 50% sans mesures.

Pour Matthias Huss, il est donc encore possible de sauver une partie considérable des glaciers en prenant les mesures climatiques adéquates. Outre l'EPFZ, l'Université de Fribourg et l'Institut de recherche sur la forêt, la neige et le paysage (WSL) ont également contribué à l'étude. Cette recherche fait partie du projet GLORIA – pour GLobal Observation Research Initiative in Alpine environments –, mené sur des sites permanents dans les régions alpines du monde entier pour observer les espèces et leur évolution à intervalles réguliers

Sujet radio: Alexandra Richard

Article web: Stéphanie Jaquet et l'ats

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