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Born in the USA, des réactions contrastées après l'élection de Joe Biden

Jane, Linda, Felicia, Scott et Tim. Ils sont cinq citoyens américains, tous d'horizons et de réalités sociales totalement différentes. C'est à travers leur regard que la rubrique internationale de RTS La Première a suivi les trois derniers mois de la campagne des élections américaines 2020.

Felicia Davis : 64 ans, démocrate, activiste pour le climat, afro-américaine, Géorgie

Tim Jones : 59 ans, républicain, agriculteur, Iowa

Linda Ruvalcaba : 34 ans, démocrate, psychothérapeute, d'origine latino-américaine, Arizona

Scott Hagan: 30 ans, républicain, vétéran, Caroline du Nord

Jane Edelman : 77 ans, démocrate, journaliste retraitée, Californie

Opération spéciale menée par Anouk Henry, Cédric Guigon, Raphaël Grand et Mouna Hussain.

Joe Biden vainqueur

Les uns exultent, les autres déplorent

Depuis la périphérie d’Atlanta, Felicia exulte: "Je l'avais dit, on l’a fait, on a réussi à faire passer ce vieux sac d’os avec cette belle femme noire désormais vice-présidente."

De l’autre côté du pays, à Phoenix, Linda, autre démocrate, se dit également "ravie" après cette longue incertitude: "Ma mère m’a écrit qu’on avait gagné! J’étais pas encore totalement confiante, mais mes amis continuaient à m’écrire et quand finalement Fox News l’a aussi déclaré, on savait que c’était vrai, donc super ravie que Joe Biden ait gagné, et je me sens vraiment soulagée."

Linda Ruvalcaba heureuse de la victoire de Biden
Linda Ruvalcaba heureuse de la victoire de Biden / L'actu en vidéo / 33 sec. / le 11 novembre 2020

Côté républicain, forcément, ce n’est pas le même enthousiasme. Dans l’Iowa, Tim Jones affiche sa perplexité: "S’il devenait vraiment le président, je respecterais cette fonction présidentielle. Mais je ne crois pas en la rhétorique qu’il a montrée. Il est dans la politique depuis 47 ans et son historique le montre. Je pense que notre économie va avoir du mal. Oui, donc je sens que ces prochains temps seront intéressants."

Paradoxalement, Scott Hagan est lui aussi soulagé, affirmant que cela fait du bien d'être enfin à nouveau libre. Et d'ajouter: "Trump sera près de récolter 72 millions de votes, le 2e meilleur total de l’Histoire. Il aura étendu sa base de près de 10 millions de votes, ce qui est génial. Et il aura sauvé le ticket républicain: on va sûrement garder le Sénat, on a presque repris la Chambre et on a repris la main sur plusieurs législatures au niveau des Etats. Donc ce n’était pas un massacre."

Scott Hagan réagit à la fin de l'élection américaine
Scott Hagan réagit à la fin de l'élection américaine / L'actu en vidéo / 50 sec. / le 11 novembre 2020

Scott affiche aussi son optimisme pour l'avenir: "Je souhaite que ça se passe bien pour Biden. Je trouve ça génial qu’on ait une première femme vice-présidente, que Dieu bénisse l’Amérique, et je me réjouis de 2024, quand nous les Républicains, nous pourrons à nouveau goûter à la victoire."

>> Les réactions des témoins dans le 12h30 :

Tim, Scott, Linda, Felicia et Jane sont les cinq témoins de l'opération "Born in the USA" [RTS - Mouna Hussain]RTS - Mouna Hussain
Réaction des cinq témoins américains de l’opération "Born in the USA" à la victoire de Joe Biden / Le 12h30 / 3 min. / le 9 novembre 2020

J+1

L'incertitude au réveil

Après la longue nuit électorale, le premier à se réveiller, c’est Tim Jones, fermier dans l’Iowa. "Si Trump est déclaré vainqueur, cela leur prendra 4 ans pour admettre le fait qu’il est le président", réagit le Républicain évangéliste.

Si Trump est déclaré vainqueur, cela leur prendra quatre ans pour admettre le fait qu’il est le président.

Tim Jones, républicain

Mais s’il dit faire confiance à Dieu pour les résultats, Tim craint que le pays ne parvienne pas à se réconcilier. Et, pour lui, Trump n’en est pas responsable. "Dès son entrée en fonction, les démocrates l’ont attaqué, lui ont reproché de créer des divisions. Alors qu’il ne faisait que prendre des décisions économiques."

A Phoenix, Linda Ruvalcaba encaissait encore le coup au réveil. Elle qui misait sur une large victoire de Joe Biden se dit toujours "sous le choc". La jeune psychologue se console par les résultats en Arizona, Etat qui vote habituellement républicain.

Cela me rend heureuse d'avoir contribué à ce que l'Arizona devienne démocrate.

Linda Ruvalcaba, démocrate

Même si sa victoire n'est pas encore actée, Joe Biden y fait la course en tête. "Je suis contente que l’Arizona soit devenu démocrate, et de le voir de mon vivant. Cela me rend heureuse d’y avoir contribué."

L’Etat de Géorgie n’a apparemment pas basculé. Pourtant, Felicia Davis, qui y habite, est convaincue que son pays est en train de bouger. "Pour moi, l’Arizona est un signe de l’avenir, une indication de ce qui se profile à l’horizon. Cela en dit long sur l’importance du vote latino. Et à ce moment de ma vie, cela m’encourage. Je m’y accroche de toutes mes forces."

En Caroline du Nord, Scott Hagan se veut réaliste. Même s’il a voté pour Donald Trump, le Républicain table déjà sur sa défaite. "Je ne suis pas vraiment triste curieusement. En fait le parti Républicain va vraiment bien ! Il a conservé la majorité au sénat, a repris du terrain à la chambre des représentants. On a fait mieux en 2020 qu’en 2016 dans l’ensemble, même si on loupe de peu la Maison Blanche." Le vétéran croit que, sans la pandémie de coronavirus, Donald Trump aurait gagné cette élection.

Le parti républicain fait mieux en 2020 qu’en 2016 dans l’ensemble, même si on loupe de peu la Maison Blanche.

Scott Hagan, républicain

Mais, à contre-courant des discours catastrophistes, Scott fait confiance aux institutions américaines pour désigner un vainqueur. "Je pense que ce sont les médias, plus que les gens, qui ont cette obsession malsaine, cette peur que l’Amérique ne soit pas capable d’assurer une transition du pouvoir politique. L’Amérique va bien. Nous sommes le pays le plus solide au monde."

Je dois changer dans ma façon de voir mon voisin qui vote pour Donald Trump.

Felicia Davis, démocrate

De son côté, Felicia pense déjà au moyen de se rapprocher de ses compatriotes républicains. "Je dois changer dans ma façon de voir mon voisin qui vote pour Trump, avoir une approche différente qu’il y a six mois. Je dois changer pour devenir un pont. Sans cette arrogance de penser que vous en savez davantage ou que votre idée est meilleure".

>> Ecouter les réactions au réveil de nos témoins :

Tim, Scott, Linda, Felicia et Jane sont les cinq témoins de l'opération "Born in the USA" [RTS - Mouna Hussain]RTS - Mouna Hussain
Témoignages de quatre électeurs américains de l'opération spéciale "Born in the USA" / Tout un monde / 6 min. / le 5 novembre 2020

Jour J

Jane choquée par les propos de Trump

En fin de matinée, le président Donald Trump a revendiqué sa victoire et demandé à la Cour suprême de stopper le contage des votes.

"Je crois qu'il va y avoir beaucoup de chaos dans les semaines à venir", a réagit Jane Edelman, en direct dans l'émission spéciale de RTSInfo. "Ce que Trump a dit ce soir n'était pas légal. Cela m'a choquée. Cela va se terminer par beaucoup de manifestations."

>> Voir la réaction de Jane Edelman sur les ondes de la Première :

Réaction finale de Jane
Réaction finale de Jane / 7h - 8h de La Première / 1 min. / le 4 novembre 2020

Jour J

Tension dans les deux camps

L'Amérique retient son souffle en cette nuit d'élection américaine. La vague bleue qu'espéraient les démocrates n'a pas lieu.

>> Voir les résultats de l'élection en direct : Présidentielle américaine: Donald Trump et Joe Biden au coude à coude

En Caroline du Nord, les résultats sont extrêmement serrés en Caroline du Nord. Donald Trump pourrait l’emporter dans un mouchoir de poche. Scott Hagan suit attentivement les résultats avec ses collègues: "Je suis optimiste. Nous ne perdons pas, mais nous ne gagnons pas non plus. Cela montre à quel point l'Amérique est divisée."

>> Ecouter la réaction de Scott Hagan :

Scott Hagan réagit aux résultats serrés en Caroline du Nord
Scott Hagan réagit aux résultats serrés en Caroline du Nord / L'actu en vidéo / 23 sec. / le 4 novembre 2020

En Arizona, Linda Ruvalcaba suit les résultats avec sa mère et sa fille. "C'est comme de regarder un match de foot, on boit du vin, on applaudit, on hue, on dit des mots pas très sympas".

Si Joe Biden est pour l’instant en tête dans son Etat, la Démocrate se dit inquiète de la tournure de l’élection. "Les résultats sont bien plus serrés que ce à quoi je m’attendais. Je suis choquée. Je me creuse les méninges pour comprendre comment, où et qui sont ces personnes qui pensent que Trump est une personne appropriée pour continuer à diriger notre pays. J’ai peur. J’ai bien plus peur que ce que j’aurais pensé l’être cette nuit."

>> Ecouter la réaction de Linda Ruvalcaba :

Linda Ruvalcaba réagit à l'élection américaine
Linda Ruvalcaba réagit à l'élection américaine / L'actu en vidéo / 25 sec. / le 4 novembre 2020

Dernière ligne droite

Scott Hagan à un meeting de Trump

Scott Hagan a toujours voté Républicain. Cette année, il ne le cache pas, il donnera sa voix au président sortant, même s'il n'est pas très confiant. "Joe Biden risque de gagner. Trump a perdu le vote des seniors. Il fera mieux chez les jeunes mais ce ne sera pas suffisant."

En attendant le jour J, le trentenaire fait du porte-à-porte. "Je l'ai fait pour un groupe libertarien porté sur l’économie, pour un groupe de vétérans qui se concentre sur la couverture santé des anciens militaires, et pour un groupe qui défend les droits de porter une arme."

Ce jour-là, dans une banlieue de Charlotte, Scott cible les maisons des électeurs indépendants. Mais la plupart ont déjà voté. "On est samedi avant l’élection, à priori tout ça c’est plié."

Dimanche matin, dernière messe avant l'élection pour le vétéran. "Je m’en remets à la volonté de Dieu. Que ce soit Biden ou Trump qui gagne. Et je prie pour que tout se passe dans le calme."

Scott a traversé la Caroline du Nord pour assister à l'un des derniers meetings électoraux de Donald Trump. Une foule de 10 à 15'000 personnes s'entasse dans la ville de Charlotte. Il y a beaucoup de drapeaux américains, de casquettes rouges, et très peu de masques.

>> Voir la vidéo de Scott Hagan au meeting de Trump :

Scott Hagan à un meeting de Trump
Scott Hagan à un meeting de Trump / L'actu en vidéo / 46 sec. / le 3 novembre 2020

Une fois la nuit tombée, voilà Donald Trump qui arrive enfin, et déroule ses arguments. Sa vision de l'économie plaît particulièrement à Scott. "On veut de l’énergie propre, mais si on touche rapidement à nos raffineries, le prix de l’essence va grimper. Et le prix de l’essence affecte les Américains plus que tout, presque plus que le prix de la nourriture."

Mais ce qui finit de convaincre le Républicain, c'est le ton du président "Il s'adresse à l'Américain moyen, avec bon sens. Oui, il me parle, et c’est bon d’entendre enfin du vrai patriotisme dans un discours."

>> Ecouter le reportage de Cédric Guigon en Caroline du Nord :

Trump face à Biden lors de l'ultime débat. [EPA/Keystone - Shawn Thew]EPA/Keystone - Shawn Thew
Dernière ligne droite pour la campagne aux élections américaines / Tout un monde / 7 min. / le 2 novembre 2020

J-1

Felicia Davis a voté

"Cette année, j'ai voté comme si ma vie en dépendait. Parce que c'est le cas." Comme 96 millions d'Américains et Américaines, Felicia Davis a déjà glissé son vote dans l'urne, avant le jour J.

"Ils ont ouvert le bureau à 8h, j'y étais à 8h10. J'ai dû attendre 1h30 tellement la file d'attente était longue. Mais j'étais en extase, j'adore voter."

Cette habitant d'Atlanta, en Géorgie, voulait déposer elle-même son bulletin, pour s'assurer qu'il ne soit pas détruit ou perdu. "J'aide des gens qui ne veulent pas se déplacer à voter par correspondance. Mais personnellement, je ne voulais prendre aucun risque."

Donald Trump aura une escorte militaire s'il pense rester assis à la Maison Blanche alors qu'il est temps de partir.

Felicia Davis, démocrate

Pour la Démocrate, qui a donné sa voix à Joe Biden, Donald Trump n'a aucune chance d'être réélu. "Les Américains sont intelligents. Ils ne sont pas forcément en haut du classement en ce moment, mais collectivement on est plus intelligents que ça. Nous savons ce qui nous attend, on l’a vu ces trois dernières années."

Et si l'actuel président refusait sa défaite? "J'adore nos services secrets. Je sais qu'il aurait une escorte militaire qu'il n'a jamais eue s'il pense rester assis à la Maison Blanche alors qu'il est temps de partir."

>> Voir le témoignage de Felicia Davis juste avant l'élection américaine :

Felicia Davis témoigne avant l'élection américaine
Felicia Davis témoigne avant l'élection américaine / L'actu en vidéo / 2 min. / le 2 novembre 2020

Vue d'ensemble

Carte des témoins américains

Nos journalistes sont allés à la rencontre de Felicia Davis en Géorgie, Tim Jones en Iowa, Linda Ruvalcaba en Arizona, Scott Hagan en Caroline du Nord et Jane Edelman en Californie.

Découvrez l'emplacement et les profils de nos témoins en vidéos à travers cette carte interactive:

Réaction à l'actualité

Kamala Harris en Géorgie

Kamala Harris, la première candidate noire à la vice présidence américaine, était en Géorgie vendredi. A onze jours de l'élection présidentielle, le déplacement à Atlanta de la colistière de Joe Biden n'est pas un hasard: la Géorgie est un État-clé pour cette élection.

La Géorgie est traditionnellement un état républicain, mais qui, cette année, pourrait voter le ticket Biden-Harris, notamment grâce au vote noir.

A Atlanta, le choix de Kamala Harris semble avoir fait une vraie différence, en tout cas pour Felicia Davis, l'une de nos cinq témoins.

Les déplacements de Kamala Harris ont été suspendus. [AP Photo/Keystone - John Locher]AP Photo/Keystone - John Locher
A Atlanta, le choix de Kamala Harris semble avoir fait une vraie différence / Le Journal horaire / 1 min. / le 24 octobre 2020

Réaction à l'actualité

Le dernier débat télévisé Trump-Biden

Les deux candidats à la présidence américaine, le président Donald Trump et son adversaire démocrate Joe Biden, ont tenu jeudi leur second et dernier débat télévisé avant le scrutin du 3 novembre, à Nashville dans le Tennessee.

Devant son poste de télévision à Phoenix, en Arizona, Linda Ruvalcaba débouche une bouteille de vin. Parce que pour la démocrate, c'était tout simplement "un spectacle de m...", du fait de la prestation de Donald Trump.

"Est-ce qu'il croit vraiment qu'il fait mieux qu'Abraham Lincoln? Est-ce qu'il croit vraiment qu'il connaît mieux que les autres ce que c'est que le vent? C'est juste risible", s'insurge la démocrate.

Très à gauche, Linda Ruvalcaba a aimé la combativité et le positionnement de Joe Biden. "J'apprécie toujours qu'il ait une élocution soignée, je crois sincèrement qu'il ne s'adresse pas uniquement aux démocrates, il se positionne au centre et il se fait entendre de tous les Américains. Il essaie d'agir au mieux pour eux, et je pense qu'il est authentique."

Toujours en Arizona, mais dans le camp des républicains, Marc Fuhrmann a apprécié le calme, plutôt rare, de son candidat. Mais le président a tout de même attaqué fort Joe Biden, sur des accusations de corruption ayant touché son fils, applaudit l'Américano-suisse. Ex-président de l'UDC à Genève, Marc Fuhrmann y voit un parallèle avec... l'affaire Pierre Maudet.

>> Ecouter les témoignages de Linda Ruvalcaba (démocrate) et Marc Fuhrmann (républicain) :

Trump face à Biden lors de l'ultime débat. [EPA/Keystone - Shawn Thew]EPA/Keystone - Shawn Thew
Le dernier débat entre Trump et Biden a eu lieu cette nuit dans le Tennessee / Le 12h30 / 2 min. / le 23 octobre 2020

De son côté, Jane Edelman, en Californie, salue le caractère posé et raisonnable de celui qu'elle voit comme le prochain président.

"Face aux mensonges et aux attaques vicieuses de Trump, Joe Biden est resté calme, compréhensible et lucide. J'en étais fière. Il a présenté des idées très raisonnables, sur le coronavirus, sur le réchauffement climatique et sur les soins abordables. Je suis plus certaine que jamais que Joe Biden doit être notre président", estime-t-elle.

>> Voir le témoignage de Jane Edelman, démocrate :

Jane Edelman réagit au second débat Trump-Biden
Jane Edelman réagit au second débat Trump-Biden / L'actu en vidéo / 1 min. / le 23 octobre 2020

Réaction à l'actualité

La bataille pour la cour suprême

Le Sénat américain a commencé cette semaine des auditions pour le remplacement à la Cour Suprême de Ruth Bader Ginsburg, juge progressiste décédée le mois dernier.

Pour cela, Donald Trump a choisi une juge très conservatrice, Amy Coney Barett. Si la quadragénaire venait à être nommée, elle resterait à la Cour Suprême jusqu'à sa mort.

Catholique pratiquante et mère de 7 enfants, elle incarne pour les Républicains l’espoir d’ancrer la Cour Suprême du côté conservateur : invalider l’Obamacare, le programme d’assurance maladie instauré par Barack Obama, et surtout annuler le jugement historique Roe contre Wade, qui avait légalisé le droit à l’avortement dans tout le pays en 1973.

Pour Tim Jones, fermier républicain dans l'Iowa, les critères qui comptent, ce sont avant tout les décisions qu'a prises le ou la candidate dans le passé.

"On arrive à voir de cette façon, si elle a plutôt une approche constitutionnelle ou culturelle. Et même la question de l'avortement, qui est aujourd'hui dans toutes les têtes, c'est UN problème. Mais il y a tant d'autres cas qui vont passer devant notre Cour Suprême, et qui font que la Constitution doit être respectée pour ce qu'elle dit, et qu'on ne lui fasse pas dire ce qu'elle ne dit pas."

La question de l'avortement compte beaucoup pour Tim, qui a pour devise: "La famille, la foi et la ferme."

La vie d'un enfant est compromise parce ces gens préfèrent vivre leur vie.

Tim Jones, agriculteur dans l'Iowa

"Je crois personnellement en la vie. Les gens font des choix qui, tout d’un coup, engendrent la vie. Et la vie de cet enfant est maintenant compromise parce ces gens préfèrent vivre leur vie, ça c’est leur décision. Mais quand cela arrive, ils se sont engagés dans quelque chose qui peut donner une existence à un être humain."

>> Ecouter son interview :

Grands témoins USA - Tim Jones
Nomination à la Cour suprême: l'avis de Tim Jones / La Matinale / 1 min. / le 15 octobre 2020

En Géorgie, Felicia Davis s'insurge: "Je ne crois pas que les hommes aient leur mot à dire là-dedans." Comme une petite majorité d’afro-américains, Felicia, démocrate, est en faveur de l’avortement.

Je ne crois pas que les hommes aient leur mot à dire là-dedans. Les femmes doivent avoir le droit de choisir.

Felicia Davis, démocrate en Géorgie

"Je pense que les femmes doivent toutes avoir le droit de choisir. Et je respecte le fait que de nombreuses femmes ne le fassent pas. Je dirais qu’un avortement, comme une fausse couche, c’est un événement malheureux."

Malgré une éducation religieuse et conservatrice, Scott Hagan se considère aujourd'hui comme un modéré sur les questions sociétales, hormis l'avortement.

"Ce n’est pas pour des raisons religieuses, mais pour une question scientifique et philosophique. Quand a-t-on décidé dans la société du moment où la vie débute et où elle doit être préservée ? Quand est-ce que nous avons notre ADN ? C’est à la conception. Alors si on peut arrêter le développement humain à 10 semaines, c’est pareil que de l’arrêter à 10 ans."

Il y a 10 ans, ma bisexualité aurait été un vrai problème. Maintenant l’Amérique est au-delà de tout ça.

Scott Hagan, républicain en Caroline de Nord

Pourtant, le Républicain détonne de la frange radicale de son parti. Le trentenaire raconte assumer sa bisexualité depuis quelques mois, malgré ses croyances religieuses. Et il estime que le parti est en train de changer. Les jeunes Républicains sont plus ouverts sur certaines questions sociétales.

"Quand j’étais au meeting de Trump à Las Vegas, tout le monde savait pour moi. On était tous Républicains, et ils s’en fichaient. Il y a 10 ans, ça aurait été un vrai problème. Maintenant l’Amérique est au-delà de tout ça."

Pour preuve : la Cour Suprême, à majorité conservatrice, a récemment rendu un arrêt qui interdit la discrimination de la communauté LGBT à l’embauche.

Comme pour le changement climatique, l’Amérique est une fois encore, loin d’être binaire et les questions morales dépassent aussi les clivages partisans.

>>Ecouter le reportage avec nos témoins sur la bataille à la Cour suprême:

Le président américain Donald Trump a nommé Amy Coney Barrett pour remplacer Ruth Bader Ginsburg à la Cour suprême. [Keystone - Alex Brandon - AP Photo]Keystone - Alex Brandon - AP Photo
Born in the USA: les enjeux de la bataille pour la Cour Suprême / Tout un monde / 9 min. / le 12 octobre 2020

Réaction à l'actualité

Le président atteint du Covid-19

Le président américain et son épouse ont été testés positifs au Covid-19 début octobre. Donald Trump a ainsi passé plusieurs jours dans un hôpital militaire.

>> Lire aussi : Donald Trump sort saluer ses partisans avant un possible retour à la Maison Blanche

Pour nos témoins américains, cette annonce a d'abord eu l'effet d'une surprise, mais pas totale: "Plus grand-chose ne me surprend avec Trump", confie Linda Ruvalcaba, qui s'est confinée de longues semaines dans son appartement en Arizona pour échapper au virus.

"J’avais bien remarqué qu’il ne prenait pas assez de précautions et se moquait sans cesse de Joe Biden qui, lui, porte un masque en permanence." Pour la démocrate, ce n'est là qu'une suite logique à une présidence qui a minimisé le danger du coronavirus.

J'ai d'abord pensé que Dieu est en train de punir notre pays.

Scott Hagan, républicain

En Caroline du Nord, Scott Hagan avoue qu'en apprenant la nouvelle, sa première réaction a été: "Dieu est en train de punir notre pays".

Pourtant, pour le républicain, Donald Trump n'est pas à blâmer. "Je crois en la liberté individuelle. Tu fais ce qui est le mieux pour toi." Le vétéran trouve d'ailleurs la peur du virus "exagérée".

Je ne fais pas confiance à Trump. Il pourrait utiliser cela pour échapper au prochain débat.

Linda Ruvalcaba, démocrate

Mais comment va se poursuivre la campagne présidentielle après cet épisode? Linda se dit inquiète: "Je ne fais pas confiance à Trump. Il pourrait utiliser ça pour échapper au prochain débat. Ou il essaiera peut-être de retarder l’élection. Je l’imagine aller dans toutes les directions."

>> Ecouter les réactions de nos témoins après le test positif de Donald Trump au coronavirus :

Donald Trump avec un masque. [getty images/afp - Alex Brandon-Pool]getty images/afp - Alex Brandon-Pool
Deux Américains réagissent à l'hospitalisation de Donald Trump / Le 12h30 / 2 min. / le 3 octobre 2020

Après sa sortie de l'hôpital, le président américain a appelé les américains à ne pas laisser le Covid-19 les "dominer".

Malgré le fait que ce virus ait déjà fait 210'000 morts dans le pays et sera en 2020 la troisième cause de décès, Donald Trump semble déterminé à ne pas changer de registre.

"La grippe saisonnière arrive!", a-t-il tweeté pour son premier réveil à la Maison Blanche. "Allons-nous fermer notre pays? Non, nous avons appris à vivre avec, de la même manière que nous apprenons à vivre avec le Covid, qui, chez la plupart des gens, est beaucoup moins mortel!", a-t-il ajouté, au mépris des chiffres.

>> Lire aussi : Donald Trump continue de minimiser la menace du coronavirus

Pour Linda Ruvalcaba, ce message est "irresponsable" de la part du président. "Moi qui n'ai pas de couverture santé, je me sens obligée de rester à la maison et de réduire ma sphère sociale. En tant que personne privilégiée, Trump dit cela à des gens qui n'auront jamais accès aux mêmes soins que lui."

>> Voir la réaction de Linda Ruvalcaba suite aux propos de Trump :

Linda Ruvalcaba réagit aux propos de Trump sur le Covid
Linda Ruvalcaba réagit aux propos de Trump sur le Covid / L'actu en vidéo / 51 sec. / le 7 octobre 2020

Réaction à l'actualité

Le premier débat Trump-Biden

Mardi soir, le premier débat à la présidentielle a viré à un ping pong d'insultes et d'invectives entre les deux candidats, Donald Trump et Joe Biden.

>> Lire aussi : Trump et Biden se rendent coup pour coup dans un débat chaotique

Si les médias ont bien du mal à sortir un vainqueur de ce pugilat, Felicia Davis est elle catégorique:

"Pour moi, le meilleur de loin, ça a été Joe Biden. Il a gagné!" La démocrate se dit très satisfaite de sa performance, notamment sur l'économie verte, et les questions raciales.

>> Voir la réaction de Felicia Davis, démocrate :

Felicia Davis réagit au débat Trump-Biden
Felicia Davis réagit au débat Trump-Biden / L'actu en vidéo / 1 min. / le 30 septembre 2020

"Il a dit que sa présidence se tournerait vers ce qu'il pourrait faire pour nous. Et pas ce qu'il pourrait faire pour lui-même."

En Californie, Jane Edelman, qui vote aussi démocrate, était elle beaucoup moins enthousiaste. "Quel désastre ! Je ne vois aucune raison pour continuer ce débat. Biden a fait de son mieux pour défendre ses positions. Mais il était en face à face avec un enfant, un narcissique."

>> Voir la réaction de Jane Edelman, démocrate :

Jane Edelman réagit au débat Trump-Biden
Jane Edelman réagit au débat Trump-Biden / L'actu en vidéo / 41 sec. / le 30 septembre 2020

Côté républicain, Scott Hagan ne cache pas sa déception devant ce débat "chaotique".

"Sur ses idées politiques, Trump pourrait gagner. Mais là, tout ne tournait qu'autour des personnalités. Cela donne une image puérile de notre système électoral."

Le vétéran est atterré: "La plus puissante république du monde a une dispute d'enfants de maternelle pour sa présidentielle. C'est mauvais pour notre pays, et pour le monde."

Ce que craint Scott, c'est un haut taux d'abstention: "En voyant ça, des millions d'électeurs risquent de baisser les bras et de dire "non merci"."

>> Voir la réaction de Scott Hagan, républicain :

Scott Hagan réagit au débat Trump-Biden
Scott Hagan réagit au débat Trump-Biden / L'actu en vidéo / 1 min. / le 30 septembre 2020

De son côté, lereprésentant en Suisse du parti républicain, James Foley, est fier de la performance de Donald Trump:

"Il a montré que c'était un battant, pas juste un type sympa, et qu'il veut se battre pour le peuple américain."

Le républicain suspecte d'ailleurs Joe Biden d'avoir été aidé pendant son débat. "J'ai vu une photo sur twitter. Biden avait un écouteur dans l'oreille pour lui souffler ce qu'il fallait dire."

Le prochain débat est prévu pour le 15 octobre à Miami en Floride, un Etat absolument clé pour accéder à la Maison Blanche.

>> Ecouter les réactions de nos témoins au débat Biden-Trump :

De jeunes républicains suivent le débat présidentiel, mardi 29 septembre. [Keystone - Lynne Sladky - AP Photo]Keystone - Lynne Sladky - AP Photo
Comment les Américains ont-ils réagi au débat entre Donald Trump et Joe Biden? / Le 12h30 / 2 min. / le 30 septembre 2020

Réaction à l'actualité

Les impôts de Donald Trump

Dimanche 27 septembre, le "New York Times" publiait les déclarations fiscales que Donald Trump avait toujours refusé de dévoiler.

>> Lire aussi : Révélations explosives sur les impôts de Trump avant son débat face à Biden

Selon le quotidien, le président américain, criblé de dettes, n'a presque pas payé d'impôts sur le revenu au cours des 20 dernières années.

Depuis toutes ces années, les gens savaient que Donald Trump avait exagéré, et personne ne croyait qu’il était milliardaire.

Felicia Davis, ex-républicaine devenue démocrate

Pour Felicia Davis, démocrate, ces révélations sont tout sauf une surprise: "Depuis toutes ces années, les gens savaient que Donald Trump avait toujours exagéré, et personne ne croyait qu’il était milliardaire."

Mais ce qui choque l'ex-républicaine, c'est avant tout un problème de morale envers le pays tout entier. "C’est déjà mal de mentir, de frauder, de tricher, mais le pire, c’est de penser que c'est ce qui a guidé ses actions en tant que président."

J'aurais bien voulu faire ça, personne ne devrait payer de taxes ! Il a contourné le système

Scott Hagan, républicain

Côté républicain, Scott ne considère pas ces révélations comme un problème, au contraire: "Les conservateurs n'aiment pas les impôts. Donc si quelqu'un n'en paie pas, on se dit, super, ça n'ira pas dans les poches du gouvernement."

L'ancien soldat en ferait presque un exemple: "J'aurais bien voulu faire ça, personne ne devrait payer de taxes ! Il est plus fort que moi, il a contourné le système !"

>> Ecouter les réactions de nos témoins aux révélations sur les déclarations fiscales de Donald Trump :

Présidentielle américaine: le New York Times publie 20 ans de données fiscales concernant Donald Trump à 2 jours du grand débat
Born in the USA - deux grands témoins réagissent aux révélations sur les impôts de Donald Trump / La Matinale / 1 min. / le 29 septembre 2020

Sixième enjeu

L’immigration hispanique

Avec la construction du mur entre les Etats-Unis et le Mexique, Donald Trump a fait de l'immigration l'un de ses principaux combats. Même si cette thématique a été occultée ces derniers mois par la pandémie de Covid-19, elle reste centrale dans le débat américain.

Ex-soldat en Californie aujourd'hui installé en Caroline du nord, Scott Hagan est familier avec les produits alimentaires mexicains. "Même si le Sud des Etats-Unis est très conservateur et pro-Trump, la cuisine mexicaine se mélange avec la cuisine du sud naturellement".

Ce n’est pas vraiment contre les Mexicains, c’est contre les cartels.

Scott Hagan, vétéran en Caroline du Nord

Si le républicain raffole de leurs mets, il approuve néanmoins la construction du mur à la frontière. "Je pense que l’immigration mexicaine est bonne pour l’Amérique! Mais pas l'illégale. Ce n’est pas vraiment contre les Mexicains, c’est contre les cartels".

Le prof d’histoire craint aussi pour la culture américaine. "Il y a plus de Mexicains qui vivent à Los Angeles qu'à Cancun ou Tijuana. C’est trop et trop vite. C’est ce qui a conduit à un échec de leur assimilation, et par conséquent à des problèmes culturels, politiques et économiques, qui les touchent eux aussi".

Il y a des gens 100% mexicains, dont les membres de la famille étaient des immigrants, peut-être même illégaux, et qui votent Trump.

Linda Ruvalcaba, psycothérapeute en Arizona

Linda Ruvalcaba est directement concernée par cette problématique, elle dont les parents sont Mexicains. Des origines hispaniques difficiles à porter dans l’Etat d’Arizona, majoritairement républicain.

"Ça a été difficile de déménager de Yuma, près de la frontière, à Phoenix. Là-bas, on faisait partie de la majorité, tout le monde était hispanique ou latino, et d’un coup on se retrouvait en minorité à l’école".

Mais même au sein de la communauté hispanique, un tiers votera pour Donald Trump. "Il y a des gens qui sont 100% mexicains, dont les membres de la famille étaient des immigrants, peut-être même des illégaux, et qui votent Trump. Je crois que c’est parce qu'ils ont peur que les progressistes viennent leur piquer leurs armes et leur reprendre leurs droits".

Il fut un temps où c’était si compliqué pour la communauté noire que je me disais, "ce n’est pas mon problème".

Felicia Davis, militante écologiste en Géorgie

Chaque fois qu'elle rentre chez elle, dans la banlieue d’Atlanta, Felicia Davis salue le chien de ses voisins mexicains et admire la maison proprette qu'ils ont acquise après la crise de 2008. Le quartier était alors un champ de ruine. Plusieurs familles d’immigrés en ont profité pour s'installer.

"Ils ont fait des choses incroyables avec ces maisons. Un jour vous les regardez et elles sont déplorables, et le lendemain elles sont transformées".

Ce n'est que récemment que la militante afro-américaine s’est intéressée au sort de la communauté latino. "Il fut un temps où c’était si compliqué pour la communauté noire que je me disais, 'ce n’est pas mon problème', je ne vais pas en plus m’inquiéter pour ça. Puis j’ai réalisé que je passe mon temps à voyager, à traverser des frontières, et c’est seulement parce que j’ai la chance d’avoir un passeport américain".

>> Ecouter leur avis sur l'immigration hispanique :

Le président américain Donald Trump devant une section du mur entre les USA et le Mexique. [Keystone/AP Photo - Evan Vucci]Keystone/AP Photo - Evan Vucci
Born in the USA: la question de l’immigration dans la présidentielle / Tout un monde / 7 min. / le 25 septembre 2020

Réaction à l'actualité

Les feux de forêt

Des feux de forêt ravagent la côte ouest des Etats-Unis depuis mi-août. Ces incendies sont "des dizaines à des centaines de fois" plus intenses que la moyenne des 15 dernières années, selon le service européen Copernicus sur le changement climatique.

>> Lire aussi : Des particules fines des incendies de l'Oregon arrivent jusqu'en Suisse

Mercredi 16 septembre, 27 incendies étaient toujours en cours à travers la Californie, l'un des Etats les plus touchés. Ils ont déjà fait 25 morts depuis la mi-août et mobilisaient plus de 16'600 pompiers.

Jane Edelman témoigne depuis son jardin à Laguna Niguel, dans le sud de la Californie: "je peux vous dire que je n’ai jamais vu de feux aussi féroces que ceux qui nous entourent aujourd’hui. Ici, le ciel n’est plus bleu, c’est plutôt gris. On dirait de la brume mais c’est de la fumée, partout."

>> Voir le témoignage de Jane Edelman en Californie :

Jane Edelman témoigne sur les feux de forêt en Californie
Jane Edelman témoigne sur les feux de forêt en Californie / L'actu en vidéo / 1 min. / le 16 septembre 2020

Mais ce qui excède particulièrement la journaliste à la retraite, ce sont les déclarations de Donald Trump. "Notre président est arrivé hier en Californie, et il a dit que, si on attend, ça va se refroidir.  Et que les scientifiques n’en savent rien."

Quel manque de respect pour les gens qui ont perdu leurs vies, leurs animaux, leurs fermes, leurs maisons.

Jane Edelman, journaliste à la retraite en Californie

"Quel manque de responsabilité, s'indigne la septuagénaire. Quel manque de respect pour les gens qui ont perdu leurs vies, leurs animaux, leurs fermes, leurs maisons."

>> Lire aussi : "Ca finira par refroidir", lance Trump. "Pyromane du climat", répond Biden

Dans l'Etat voisin, en Arizona, Linda Ruvalcaba n'est pas directement touchée par les feux, même si le ciel de Phoenix a par moment changé de couleur en raison de la pollution.

La trentenaire se sent néanmoins très concernée: "je suis inquiète pour mes amis à Washington et en Californie. J'essaie de trouver le moyen d'aider, parce que c'est désespérant de voir cela arriver aux gens qu'on aime."

>> Ecouter le témoignage de Linda Ruvalcaba en Arizona :

Linda Ruvalcaba témoigne sur les incendies aux USA
Linda Ruvalcaba témoigne sur les incendies aux USA / L'actu en vidéo / 1 min. / le 16 septembre 2020

Au total, plus de deux millions d'hectares de végétation ont déjà été consumés depuis la mi-août de la frontière canadienne à celle du Mexique.

Selon le consensus scientifique, l'ampleur exceptionnelle de ces feux de forêt est liée au dérèglement climatique, qui aggrave une sécheresse chronique et provoque des conditions météorologiques extrêmes.

>> Ecouter le reportage de Raphaël Grand sur les incendies en Oregon :

Des habitants armés patrouillent au milieu des incendies en Oregon, semant parfois la confusion et perturbant les opérations de secours. [RTS - Raphaël Grand]RTS - Raphaël Grand
En Oregon, des habitants armés patrouillent au milieu des incendies / Tout un monde / 4 min. / le 16 septembre 2020

Grand débat

L'Amérique divisée et irréconciliable?

L'Amérique est-elle profondément divisée et irréconciliable? L'émission "Forum" a mené un grand débat sur cette question.

Parmi les quatre invités, notre témoin Jane Edelman, journaliste à la retraite en Californie, démocrate depuis toujours.

Côté républicain, Jeff Lightfoot, chercheur associé à l'Atlantic Council de Washington.

Participent également au débat Cédric Guigon et Raphaël Grand, journalistes de la rubrique internationale à la RTS, qui sont allés à la rencontre de nos témoins américains.

>> Voir le grand débat Forum du vendredi 11 septembre :

Le grand débat – L’Amérique divisée et irréconciliable ?
Le grand débat – L’Amérique divisée et irréconciliable ? / Forum / 20 min. / le 11 septembre 2020

Cinquième enjeu

L’économie, entre chômage et guerre commerciale

L’économie serait un facteur déterminant ou du moins très important dans le choix du président américain.

Ces derniers mois, la pandémie de coronavirus a plombé les chiffres, avec par exemple un taux de chômage record. En parallèle, Donald Trump mène une guerre commerciale avec la Chine. Comment nos cinq témoins perçoivent-ils l’avenir économique de leur pays ?

Les gens se préoccupent davantage de leur santé mentale. Mais on verra s'ils sont encore d'accord de payer dans quelques mois...

Linda Ruvalcaba

En Arizona, grâce à son cabinet indépendant de psychothérapie, Linda Ruvalcaba n’a pas vraiment été touchée par la crise. Elle a même gagné de nouveaux clients, mais n’a pas voulu profiter de la situation.

"Les gens perdaient leur emploi, donc j’ai baissé mes tarifs et ils me payaient ce qu’ils pouvaient. Je ne voulais pas qu’ils arrêtent de suivre leur thérapie pour des problèmes financiers."

Linda craint tout de même pour l’avenir de son cabinet. "L’économie est encore dans un tel état. On verra d’ici quelques mois si les gens sont toujours d’accord de payer pour prendre soin de leur santé mentale."

En Caroline du Nord, Scott Hagan déplore la gestion de la crise du coronavirus. "Notre économie était si forte, et on a tout fermé. Parce qu’on ne savait pas quoi faire avec ce virus, et merci la Chine."

Trump aurait dû dire: 'On fait comme la Suède'.

Scott Hagan

Pour le vétéran, le confinement a été fatal à l’économie du pays. "Trump aurait dû dire ok, on fait comme la Suède, on ouvre l’économie mais ceux qui ont 60 ans et plus, vous restez à l’intérieur. Ou bien tout le monde met le masque. Quelque chose, pour que l’économie tourne."

Car, même si le trentenaire est conscient de la dangerosité du Covid-19, une crise économique l’effraie davantage.

En Iowa, le fermier Tim Jones a vu son métier se complexifier avec les années, bien avant l’arrivée de la pandémie.

"Il y a de moins en moins de fermiers. Et les fermes deviennent de plus en plus grosses. Des fermes industrielles. Certains doivent multiplier les jobs, travailler dans des usines, louer leurs terres à une ferme plus grosse. On survit."

On est prêts à souffrir encore 2-3 ans plutôt que de retourner à un marché déloyal.

Tim Jones

Si la bataille commerciale de Donald Trump avec la Chine a d’abord eu un impact négatif pour son métier, Tim veut rester optimiste. "On est prêts à souffrir encore 2-3 ans plutôt que de retourner à un marché déloyal, comme nous l’avions par le passé. Un marché injuste par ses taxes, par ses tarifs. Quand c’est injuste, ce n’est pas America First."

Prendre ses distances avec la Chine, c’est un discours qui trouve aussi écho chez certains démocrates. C’est le cas de Felicia Davis, en Géorgie, qui se méfie de l’accélération des échanges commerciaux.

Au lieu de faire circuler des marchandises, on devrait revenir au local, que les gens produisent ce qu'ils mangent.

Felicia Davis

"J’aimais l’idée que des choses s’échangent entre les pays, qu’elles bougent", confie-t-elle. "Mais je crois que nous sommes allés trop loin. A cause du capitalisme qui pousse à produire toujours moins cher. Je n’aime pas l’idée de faire travailler les gens pour très peu."

Pour cette militante écologiste, la solution réside dans une économie locale. "Au lieu de faire circuler des marchandises, si on veut limiter les émissions de gaz à effet de serre, on devrait revenir au local. Plus efficace, plus près de la maison, que les gens produisent ce qu’ils mangent. C’est du sens commun."

Le choix entre libéralisme ou protectionnisme, entre intervenir pour sauver les emplois ou laisser faire? La crise économique qui frappe les Américain.e.s pourrait bien être déterminante dans le choix du président qui devra relever un pays tout entier.

>> Ecouter les positions de nos témoins sur l'économie :

La pandémie impact fortement l'économie mondiale. [EPA/Keystone - Justin Lane]EPA/Keystone - Justin Lane
Born in the USA (5/5): l’économie / Tout un monde / 8 min. / le 11 septembre 2020

Quatrième enjeu

L’environnement, une préoccupation partagée

La question de l’environnement est passée en arrière-plan depuis la crise du coronavirus. Pourtant, dans cette Amérique si divisée, ce thème aurait de quoi rassembler les deux camps politiques, démocrates et républicains.

Je dis toujours que je suis un Républicain Vert, pour le marché et pour l’environnement. Les deux doivent avancer main dans la main.

Scott Hagan, vétéran en Caroline du Nord

Dans une forêt de pins en Caroline du Nord, Scott Hagan se confie sur l’importance qu’a la nature pour lui. "C’est la vie. On grandit là-dedans. On n’a pas besoin d’aller dans des parcs nationaux, on peut juste marcher dehors."

Sur ce point, Scott ne rejoint pas totalement la position du parti républicain. "Je dis toujours que je suis un républicain vert, pour le marché et pour l’environnement. Les deux doivent avancer main dans la main. Malheureusement le parti républicain est pour le marché, et contre l’environnement. Et les démocrates sont contre le marché et pour l’environnement, et ils communiquent mal."

Même s’il n’approuve pas la vision de Donald Trump sur le climat, Scott tempère : "Je sais que Trump est très climatosceptique. Pour moi tu n’as pas besoin de croire au changement climatique, il suffit de bien le gérer."

Dans mon enfance, il n’y avait pas autant de maisons et la plage était beaucoup plus grande. Maintenant le sable a disparu de certains endroits.

Jane Edelman, journaliste à la retraite en Californie

Du haut de ses 77 ans, Jane Edelman a vu évoluer la Californie. Elle est particulièrement préoccupée par l’urbanisation croissante qui dévore le littoral.

"Je viens ici depuis mon enfance, raconte-t-elle sur une plage de Laguna Niguel. Il n’y avait pas autant de maisons et la plage était beaucoup plus grande. Maintenant il y a des endroits où le sable a pratiquement disparu."

Face à un président qui a retiré son pays de l’accord de Paris sur le climat, l’ex-journaliste a décidé de s’engager. "Je suis devenue membre d’une organisation "Citizen Climate lobby", qui va à Washington demander des changements".

Je ne sais pas s'il y a un changement climatique. Je crois fermement qu’il y a un Dieu qui gère tout cela, et il ne veut pas que tout s’écroule.

Tim Jones, fermier dans l'Iowa

En Iowa, Tim Jones est beaucoup moins pessimiste, même s’il se sent très impliqué. "Je pense que les fermiers sont les meilleurs environnementalistes, parce que leur vie dépend de leur terre. Je crois sincèrement que notre eau, nos rivières sont plus propres. C’est un constat au niveau local."

Ainsi, le Républicain s’oppose aux régulations environnementales, qu’il considère comme souvent abusives et contre-productives.

"Pour en venir au changement climatique. Est-ce qu’il y en a vraiment un? Je ne veux pas me battre contre la science, même si les avis divergent. Je crois fermement qu’il y a un Dieu qui gère tout cela, et il ne veut pas que tout s’écroule."

On a souvent dit des communautés noires qu’elles y contribuaient le moins mais qu’elles en étaient les plus affectées.

Felicia Davis, militante écologiste en Géorgie

En Géorgie, Felicia Davis a fait de l’écologie son métier, en conseillant les universités et les communautés noires.

"On a souvent dit des communautés noires et pauvres qu’elles contribuaient le moins  aux questions environnementales mais qu’elles en étaient les plus affectées. Et le monde l’a découvert lors de l’ouragan Kathrina. Depuis, la communauté noire a compris qu’elle était impactée par le changement climatique, mais elle ne sait pas encore comment elle pourrait être intégrée à la nouvelle économie verte."

Un travail de titan donc pour Felicia, bien consciente que le vote des électeurs afro-américains pourrait faire pencher la balance dans certains Etats.

>> Ecouter les positions de nos témoins sur l'environnement :

Tim, Scott, Linda, Felicia et Jane sont les cinq témoins de l'opération "Born in the USA" [RTS - Mouna Hussain]RTS - Mouna Hussain
Born in USA (4/5): la question environnementale / Tout un monde / 7 min. / le 10 septembre 2020

Troisième enjeu

Discriminations raciales, l’après George Floyd

L’Histoire américaine est marquée par les discriminations raciales. Mais si les discours avançaient d’abord les progrès réalisés, la mort de George Floyd - étouffé par un policier sur un trottoir de Minneapolis – et les manifestations Black Lives Matter ont replacé le débat au cœur de la présidentielle. Rarement les Américains n’ont paru si divisés sur la question raciale.

Est-ce que l’esclavage est un chapitre sombre de l’Histoire de notre pays? Oui ça l’est. Mais certains propriétaires prenaient soin de leurs gens.

Tim Jones, fermier dans l'Iowa

"Est-ce que je crois qu’il y a des racistes dans notre pays ? Probablement. Est-ce que l’esclavage est un chapitre sombre de notre Histoire ? Oui ça l’est", lance Tim Jones. Ce fermier habite Williamsburg, une ville de 3000 habitants, presque tous blancs.

"Mais je sais aussi que, d’un point de vue historique, certains propriétaires d’esclaves prenaient soin de leurs gens, argue le républicain. Ce système les a gardés en vie. Et ça on n'en parle pas dans le débat politique."

Même si on n’a pas vécu l'esclavage, cette histoire est en nous. Cela rend notre existence étrange.

Félicia Davis, afro-américaine habitant en Géorgie

Felicia Davis, à Atlanta, est afro-américaine. "Chaque fois qu’on parle de notre histoire, ça commence avec nous, en esclaves, explique-t-elle. Et nous voilà maintenant, avec tous nos problèmes. Même si on n’a pas vécu cette expérience, elle est en nous. Cela rend notre existence étrange."

Même s’il y a eu beaucoup de progrès en termes d’égalité, certains combats sont encore à mener, comme celui de la place des femmes dans le mouvement, déplore Felicia. "Il y a eu des luttes au sein de la communauté noire pour que les femmes aient plus de pouvoir. Et ce jour arrive seulement maintenant. Voici venu le moment de gloire des femmes noires. "

Le drapeau confédéré est bien plus qu'un symbole de l'esclavage. Il fait partie de l’Histoire. Ma famille s’est battue pour lui. C’est mon héritage.

Scott Hagan, vétéran en Caroline du Nord

En Caroline du Nord, Scott Hagan minimise la question des discriminations raciales. Il rejette les politiques de quota, et s’appuie sur la mémoire de Martin Luther King. "Il disait qu’on doit juger les gens sur leur personnalité et pas sur leur couleur de peau. Je suis désolé mais que vous ayez des associations d’étudiants noirs, et des mois pour célébrer l’histoire hispanique, vous vous basez sur la couleur".

Ce passionné d’Histoire refuse de voir le drapeau confédéré comme un symbole des discriminations raciales. "Ce drapeau c’est bien plus que cela. Il fait partie de l’Histoire. Ma famille s’est battue pour lui. C’est mon héritage."

On est un pays raciste. Mais au moins il y a de plus en plus de gens qui se posent des questions.

Jane Edelman, journaliste à la retraite en Californie

Retraitée depuis 15 ans, Jane Edelman tente de faire survivre ses fleurs à un sol trop argileux. "On est un pays raciste", confie-t-elle dans son jardin californien. "Mais au moins il y a de plus en plus de gens qui se posent des questions."

L’ex-journaliste, qui n’est pas afro-américaine, aurait aimé prendre part aux manifestations après la mort de George Floyd. "Je le voulais vraiment. Mais c’était en plein milieu de la pandémie, et je n’osais pas prendre le risque, vu que j’ai 78 ans."

Des entreprises ont publié des communiqués pour s’afficher comme anti-racistes, alors qu'elles le sont.

Linda Ruvalcaba, psycothérapeute en Arizona

Les Afro-Américains ne sont pas les seuls à souffrir de discriminations. Linda Ruvalcaba, issue de l’immigration mexicaine, en sait quelque chose. "J’habite dans une ville, Phoenix, qui est connue pour avoir l’un des pires taux de brutalité contre les citoyens.  Et ici on a une large population d’origine hispanique."

"C’est fatigant. Mais c’est aussi déroutant parce que je suis une latina plutôt blanche de peau, donc je me débats avec des micro-agressions du quotidien et pas avec de vraies attaques racistes."

Mais ce qui scandalise Linda, c’est le "Black washing" : "Après le meurtre de George Floyd, de nombreuses entreprises ont publié des communiqués pour s’afficher comme anti-racistes. Cela a été le cas de l’entreprise pour laquelle je travaillais, et avec laquelle j’ai eu des problèmes de racisme."

>> Ecouter la position de nos cinq témoins sur les discriminations raciales aux Etats-Unis :

57 ans après la marche pour les droits civiques, le racisme suscite encore l’indignation dans les rues de Washington. [EPA/Keystone - Olivier Douliery]EPA/Keystone - Olivier Douliery
Born in the USA (3/5): la discrimination raciale / Tout un monde / 8 min. / le 9 septembre 2020

Deuxième enjeu

Le système de santé face au Covid

L’Etat d’Arizona a subi la pandémie de plein fouet. A Phoenix, Linda Ruvalcaba applique un confinement particulièrement strict. Et pour cause, la psychothérapeute n’a pas d’assurance maladie.

Je préfère ne pas prendre de risques en m’isolant.

Linda Ruvalcaba, Arizona

"Oui c’est angoissant, confie-t-elle. Que se passe-t-il si je dois aller à l’hôpital? Je croulerai sous les dettes, parce que c’est ça le système de santé ici. Du coup, je préfère ne pas prendre de risques en m’isolant."

Des craintes que ne partage pas Tim Jones, en Iowa. Le fermier dit ne pas aimer porter de masques et doute même de l’ampleur de la pandémie.

Je pense que ça a été politisé, transformé en crise, juste pour l’élection qui arrive, pour faire chuter Trump.

Tim Jones, agriculteur en Iowa

"Tu veux mon sentiment? Cela va disparaître après novembre, assure Tim. Je pense que ça a été politisé, transformé en crise, juste pour l’élection qui arrive, pour faire chuter Trump. Les démocrates ne vont pas gaspiller “une bonne pandémie”."

Une position que ne supporte pas Félicia Davis, en Géorgie. "C’est parce qu’on a un président qui leur a dit que c’était un hoax!"

Donald Trump a été fatal à ma communauté.(...) Supprimer l’Obamacare en ce moment, c’est aussi fondé sur du racisme.

Felicia Davis, militante écologiste en Géorgie

L’Afro-Américaine n’en finit pas d’enrager contre le président. "Donald Trump a été fatal à ma communauté. C’est inacceptable. Tous les jours, ils ont tenté de démanteler l’assurance santé. Ils ont fait ça pendant une pandémie ! Supprimer l’Obamacare en ce moment, c’est aussi fondé sur du racisme."

La couverture de santé universelle, Scott Hagan n’en veut pas. "Tu manges chez McDonald’s tous les jours, tu gagnes seulement 25’000 dollars par an et tu fumes des cigarettes? Non je ne vais pas payer pour ton train de vie malsain", assure l’ancien militaire installé en Caroline du Nord.

Si vous allez dans les périphéries, ou dans la campagne, comme là où je vis, personne ne porte le masque.

Scott Hagan, vétéran en Caroline du Nord

Quant à la question du coronavirus, Scott pense que le clivage se trouve plutôt entre les milieux ruraux et urbains, ce qui est en soi une question politique. "Si vous allez dans les villes, il y a plus de gens qui portent des masques. Vous pouvez vraiment voir que les gens sont plus stricts sur la distanciation sociale. Si vous allez dans les périphéries, ou dans la campagne, comme là où je vis, personne ne le fait."

>> Ecouter l’avis de nos cinq témoins sur le système de santé en temps de coronavirus :

La Floride est l'un des Etats américains les plus touchés par la pandémie. [NurPhoto/AFP - Paul Hennessy]NurPhoto/AFP - Paul Hennessy
Born in the USA (2/5) : Le système de santé face au Covid / Tout un monde / 7 min. / le 8 septembre 2020

Premier enjeu

Donald Trump, le grand clivage

L'actuel président des Etats-Unis est sans doute le sujet de discussion le plus clivant du pays. Un clivage particulièrement visible lorsque l'on demande à nos cinq témoins leur avis sur les quatre années d'investiture de Donald Trump.

"Il fait un boulot terrible", lance Linda Ruvalcaba depuis l'Arizona, enfermée dans son bureau transformé en cabinet de psychothérapie.

Trump veut juste devenir un dictateur, je ne comprends pas les gens qui le suivent comme des moutons

Linda Ruvalcaba, Arizona

Pour cette femme issue de l'immigration mexicaine, Donald Trump n'a fait que diviser le pays. "Il veut juste devenir un dictateur et je ne comprends pas les gens qui le suivent comme des moutons."

Discours totalement différent en Caroline du Nord, où Scott Hagan fouille dans ses cartons pour retrouver ses chapeaux de cowboy.

Trump, c'est un homme d'affaires, pas un politicien. J’ai voté pour quelqu’un qui puisse changer la donne.

Scott Hagan, vétéran en Caroline du Nord

"Trump, c'est un homme d'affaires, pas un politicien, explique le vétéran. C’est un amuseur, c’est clair. Mais on avait besoin d'une personne comme lui. J’ai voté pour quelqu’un qui puisse changer la donne."

En Géorgie, Felicia Davis s'insurge de l'élection de Donald Trump, après deux investitures de Barack Obama.

Malgré leur couleur de peau, Donald Trump ne s’intéresse pas plus aux travailleurs blancs qu’il ne s’intéresse à moi.

Felicia Davis, militante écologiste en Géorgie

"Qu’est-ce qu’un pauvre travailleur blanc a en commun avec Donald Trump? demande-t-elle. Seulement leur couleur de peau, leur "supériorité blanche". Et cela leur fait penser qu’ils sont meilleurs. Mais Donald Trump ne s’intéresse pas plus à eux qu’il ne s’intéresse à moi."

En Iowa, loin de l'agitation des villes, Tim Jones est plutôt satisfait du premier mandat de Trump. Le fermier veut croire que le milliardaire se sent réellement concerné par le destin des Etats-Unis. "Est-ce qu’il avait besoin de ce job de président? Sans doute que non. Et même pas du tout."

Trump a nivelé les inégalités liées à nos exportations et importations. Il a diminué notre dépendance envers des puissances étrangères.

Tim Jones, agriculteur en Iowa

Pour cet agriculteur, les accords commerciaux conclus par Donald Trump sont bénéfiques à sa branche. "Il a essayé de niveler toutes ces inégalités liées à nos exportations et importations. Il a aussi diminué notre dépendance envers des puissances étrangères. "

Jane Edelman, en Californie, n'est pas du tout d'accord avec Tim. Donald Trump lui fait peur. Elle craint qu'il finisse par détruire les Etats-Unis.

Ce président présente un danger, non seulement pour notre pays, nos lois, nos libertés, mais aussi pour le monde entier.

Jane Edelman, journaliste à la retraite en Californie

"Ce président présente un danger, non seulement pour notre pays, nos lois, nos libertés, mais aussi pour le monde entier, s'alarme la journaliste à la retraite. Il a commencé par détruire toutes les institutions qui nous maintiennent en sécurité."

>> Ecouter le positionnement de nos cinq témoins sur l'investiture de Donal Trump :

Le président américain Donald Trump lors de sa visite à Kenosha, où il a promis d'aider les commerçants dont les commerces ont été détruits lors des émeutes. [Keystone - AP Photo/Evan Vucci]Keystone - AP Photo/Evan Vucci
Born in the USA (1/5): Donald Trump, le plus profond des clivages / Tout un monde / 8 min. / le 7 septembre 2020

Felicia Davis

Militante écologiste et anti-raciste en Géorgie

Au volant de sa voiture hybride, Felicia Davis enchaîne les appels, depuis son kit main-libre. Un ami au Sénégal, sa collègue, sa vieille amie militante, sa fille, le maire de sa petite ville, proche de l’aéroport d’Atlanta. A 64 ans, son carnet d’adresses est aussi rempli que sa vie.

Felicia Davis a une vie bien chargée et passe beaucoup de temps au téléphone. [RTS - Anouk Henry]
Felicia Davis a une vie bien chargée et passe donc beaucoup de temps au téléphone. [RTS - Anouk Henry]

Enfant, elle a connu la ségrégation. C’est lorsqu’elle est partie étudier à l’université noire de Howard à Washington qu’elle a construit son engagement pour la minorité afro-américaine. Les marches en hommage à Martin Luther King, les concerts de Stevie Wonder et de Parliament-Funkadelik.

"Howard, on l’appelait la Mecque, c’est un pilier de la sororité noire". C’est d’ailleurs aussi de là qu’est issue Kamala Harris, la candidate démocrate à la vice-présidence. Un événement historique pour Felicia, qui est convaincue "que l’heure des femmes noires est venue".

>> Voir le portrait de Felicia Davis, tourné en mars 2020 :

Grands témoins USA - Felicia Davis
Grands témoins USA - Felicia Davis / L'actu en vidéo / 3 min. / le 6 septembre 2020

Felicia a hérité des valeurs de sa famille, dont les photos trônent dans son salon, au milieu de souvenirs africains, et d’affiches de campagne d’Obama. "Ma grand-mère était une battante. On devait travailler deux fois plus que les autres pour être les meilleures", se souvient sa sœur.

Son autre combat, c’est l’environnement. Elle est responsable de l’écologie à l’université Clark d’Atlanta. Et elle a fondé HBCU green fund, un fonds en faveur de la justice climatique dans les universités noires et les communautés afros.

Son rêve, c’est de voir un jour les deux combats de sa vie se rejoindre: elle voudrait des réparations pour l’esclavage. Des réparations collectives qui servent à investir dans l’éducation et l’écologie, dans les communautés afro-américaines du pays.

>> Ecouter le portrait de Felicia Davis paru dans le 12h30 de La Première :

Felicia Davis a une vie bien chargée et passe beaucoup de temps au téléphone. [RTS - Anouk Henry]RTS - Anouk Henry
Born in the USA: Felicia Davis, grande militante de la cause afro-américaine / Le 12h30 / 2 min. / le 7 septembre 2020

Tim Jones

La famille, la foi et la ferme

Tim Jones, 59 ans, vit dans la petite ville de Williamsburg, en Iowa. Son père et son grand-père étaient des fermiers.

Tim Jones a gardé quelques champs de maïs et de soja mais vend aujourd’hui des fertilisants et des produits agricoles aux fermiers de sa région.

Tim est marié et a 4 enfants, dont un fils qui travaille dans la petite entreprises familiale.

>> Voir le portrait de Tim Jones, tourné en août 2020 :

Grands témoins USA - Tim Jones
Grands témoins USA - Tim Jones / L'actu en vidéo / 2 min. / le 6 septembre 2020

Tim est croyant et pratiquant. Il se rend à son église baptiste tous les dimanches et il passe de longues heures à lire la Bible, son livre de référence. Sa devise tient en trois lettre: F-F-F. La Famille, la Foi religieuse et la Ferme.

Tim aime le football. Il entraîne une équipe féminine du lycée de Williamsburg.

En revanche, Tim Jones n’aime pas trop parler de politique. Il se dit cependant résolument conservateur et n’aime pas que le gouvernement vienne compliquer ses affaires avec des régulations "souvent inutiles", souligne-t-il.

Tim Jones et sa femme Kathy habitent en Iowa. [RTS - Raphael Grand]
Tim Jones et sa femme Kathy habitent en Iowa. [RTS - Raphael Grand]

L'homme a soutenu Trump en 2016 et revotera pour lui en 2020. Il apprécie le côté "business man" du président, même s'il n’est pas un modèle de vertu. Tim Jones aime rappeler qu’il n’a pas élu un pasteur pour diriger le pays.

>> Ecouter le portrait de Tim Jones dans le 12h30 de La Première :

Grands témoins USA - Tim Jones
Born in the USA: Tim Jones, un fermier qui a choisi de voter pour Donald Trump / Le 12h30 / 2 min. / le 8 septembre 2020

Linda Ruvalcaba

Psychothérapeute "latina" en Arizona

Des cactus, une terre rouge et une terrasse ombragée en plein centre-ville de Phoenix. C’est là que nous donne rendez-vous Linda Ruvalcaba. On y mange des burgers au pulled pork, et on boit des jus frais ou de la IPA 100% locale. Le temps de faire connaissance. Surtout, le temps que la pandémie nous rattrape et nous ramène fissa en Suisse.

Il faut donc tout reprendre à zéro, et à distance. Mais Linda se prend au jeu. A 34 ans, elle nous montre son quotidien, elle nous emmène virtuellement chez le vétérinaire avec son chat.

Psychothérapeute, elle a troqué son cabinet et son divan contre un petit bureau et des séances par visioconférence. “Cela marche plutôt bien, les gens se soucient de leur santé mentale.” Mais avec la crise économique qui s’aggrave, elle a déjà dû revoir ses tarifs à la baisse, elle ne conçoit pas que les gens abandonnent leurs séances pour des problèmes financiers.

>> Voir le portrait de Linda Ruvalcaba, tourné à distance en septembre 2020 :

Grands témoins USA - Linda Ruvalcaba
Grands témoins USA - Linda Ruvalcaba / L'actu en vidéo / 3 min. / le 6 septembre 2020

Car Linda est une démocrate de gauche, une progressiste. Elle aurait rêvé d’un ticket avec Elizabeth Warren ou Bernie Sanders. L’environnement, l’abandon des dettes universitaires – la sienne est colossale- l’immigration sont ses thèmes de prédilection. Mais son principal combat c’est: Medicare for all. La couverture santé universelle. Elle pourrait d’ailleurs en être l’une des premières bénéficiaires, elle qui n’a pas contracté d’assurance pour sa santé.

Proche d’une Alexandria Ocasio Cortez, Linda fait figure d’exception dans un Etat – l'Arizona – qui vote républicain depuis des générations. Mais là aussi les choses changent. L’Etat opère entre autres un changement démographique majeur: l’arrivée de démocrates des villes du nord, et la croissance de la population d’origine hispanique. Dont fait partie Linda.

Linda en pause entre deux séances de psychothérapie. [RTS - Linda  Ruvalcaba]
Linda Ruvalcaba en pause entre deux séances de psychothérapie. [RTS - Linda Ruvalcaba]

Née de parents mexicains, elle a grandi à Yuma, près de la frontière. Elle a longtemps laissé de côté son identité hispanique - “peut-être sous la pression de l’école”, dit-elle – mais elle cherche désormais à la revendiquer. “Le racisme est partout, d’abord chez nos frères et sœurs noirs, mais dans notre communauté aussi”. A Phoenix, 41% de la population est “latina”. Elle vote à majorité démocrate et comme Linda, elle compte bien peser sur la prochaine élection présidentielle.

>> Ecouter le portrait de Linda Ruvalcaba :

Grands témoins USA - Linda Ruvalcaba
Born in the USA: le portrait de Linda Ruvalcaba / Le 12h30 / 2 min. / le 9 septembre 2020

Scott Hagan

“Guns and God”. Les armes et Dieu

Casquette "Make America Great Again" vissée sur la tête, à 30 ans, Scott Hagan est un vrai républicain et surtout un patriote. 

Scott a grandi à Marianna, dans les marécages du Panhandle de Floride, il s’est ensuite enrôlé comme photographe dans l’armée. Et après 5 ans passés dans une base militaire isolée en plein désert californien, il a fini par s’installer près de Fayetteville, en Caroline du Nord. 

Dans son petit pavillon, il le dit lui-même “tout sent le républicain” : des trophées de chasse, des croix chrétiennes, des posters de football américain. Dans ses tiroirs, il garde les manchettes de journaux, comme celle du Chicago Tribune, qui a consacré la victoire de Trump en 2016.

>> Voir le portrait de Scott Hagan, tourné en mars 2020 :

Grands témoins - Scott Hagan
Grands témoins - Scott Hagan / L'actu en vidéo / 1 min. / le 6 septembre 2020

Donald Trump ? “Un amuseur public, un narcissique, un homme d’affaires qui ne sait pas gouverner. Mais c’est ça qu’il nous fallait”. Et Scott en est convaincu : l’Amérique n’était plus considérée à sa juste valeur, et il fallait Trump pour changer la donne.

Derrière sa moustache, Scott ne décolère pas quand il entre dans un supermarché Walmart: les Etats-Unis sont bien trop dépendants de la Chine. “Tous les produits sont chinois, nos ennemis. Si une guerre se déclare, comment les gens continueront à s’approvisionner ?”

Sur les armes, sur l'immigration, Scott suit aussi la ligne de son président : “j’adore pouvoir manger mexicain. Mais ce n’est pas une raison pour m’obliger à parler espagnol dans un fast-food.” Le mur? Il y est favorable: “C’est le seul moyen de stopper la drogue véhiculée par les clandestins”.

Scott Hagan est un vétéran. Il habite aujourd'hui en Caroline du Nord. [RTS - Cédric Guigon]
Scott Hagan est un vétéran. Il habite aujourd'hui en Caroline du Nord. [RTS - Cédric Guigon]

Passionné d’Histoire et cultivé, Scott est intarissable sur la Guerre de Sécession. Il réprouve d’ailleurs le déboulonnage des statues de généraux esclavagistes, “c’est notre patrimoine” dit-il. Quant au drapeau confédéré, là aussi, c’est sa réappropriation par les milieux suprémacistes blancs qu’il critique avant tout. 

Car sous ses airs de républicain dogmatique, Scott est bien plus modéré sur certains points. Comme avec l’environnement: “comment pouvoir continuer à aller camper ou à pratiquer la chasse si la nature n’est pas préservée ?”. Il milite pour un meilleur équilibre: ne déclasser qu’une partie des parcs nationaux, pour permettre une exploitation économique raisonnée.

Fervent chrétien, fermement opposé à l’avortement, il se heurte néanmoins à la frange la plus conservatrice du parti républicain. Car depuis quelques mois, il assume sa bisexualité. “Je lutte encore parce que c’est un péché. Mais j’essaie de vivre avec.” Et il n’hésite pas à tancer les éléphants du parti aux idées parfois rétrogrades. 

Pour lui, le parti doit se renouveler: plus vert, plus jeune, plus ouvert sur les questions sociétales.

Les récents événements l’ont également convaincu: face à la pandémie, “Trump n’est pas Churchill et il divise plus qu’il unit le pays”. Et pour lutter contre les violences policières, il y a du boulot à faire. Quelle que soit la couleur de peau.

Ce qui ne va pas l’empêcher de voter Donald Trump en novembre: “J’aime Trump et il n’a pas la tâche facile. Mon cœur est à droite, et comme c’est notre candidat, je n’ai pas vraiment le choix.”

>> Ecouter le portrait de Scott Hagan :

Scott Hagan est un vétéran. Il habite aujourd'hui en Caroline du Nord. [RTS - Cédric Guigon]RTS - Cédric Guigon
Born in the USA: Scott Hagan, vétéran et électeur convaincu du parti républicain / Le 12h30 / 2 min. / le 10 septembre 2020

Jane Edelman

Journaliste retraitée en Californie

Jane vit à Laguna Niguel, en Californie. Cette retraitée de 77 ans a deux enfant et quatre petits-enfants.

Ancienne journaliste de presse écrite et de télévision, Jane aime la randonnée et les voyages. Elle a notamment visité l’Europe et l’Amérique du Sud. Avant la pandémie, elle préparait une aventure en rafting sur le fleuve Colorado. Ouverte sur le monde, elle aime aussi s’occuper de son jardin et passer du temps avec ses amis.

>> Voir le portrait de Jane Edelman, tourné en mars 2020 :

Grands témoins USA - Jane Edelman
Grands témoins USA - Jane Edelman / L'actu en vidéo / 3 min. / le 6 septembre 2020

L’élection de Donald Trump, en 2016, l’a poussée à s’engager dans l’activisme politique, sur le tard. Elle oeuvre actuellement pour la réélection de Harley Ruda, son élu démocrate local. Le climat et la lutte contre le changement climatique sont aussi ses principales préoccupations.

Jane a été mariée deux fois. C'est auprès de son premier époux qu'elle a appris le français. Aujourd'hui, elle partage sa vie avec Larry, un New-Yorkais pure souche établi en Californie.

Jane Edelman s'inquiète du réchauffement climatique qui a des répercussions directes sur les plages californiennes. [RTS - Raphaël Grand]
Jane Edelman s'inquiète du réchauffement climatique qui a des répercussions directes sur les plages californiennes. [RTS - Raphaël Grand]

Jane est une retraitée hyper-active avec une vision résolument progressiste. Durant la pandémie, elle a confectionné des masques pour les personnes âgées de son quartier. "La gestion du coronavirus par le président est une catastrophe", estime-t-elle.

Elle craint pour l’avenir de son pays et de ses petits-enfants si Donald Trump devait être réélu.

>> Ecouter le portrait de Jane Edelman :

Jane Edelman s'inquiète du réchauffement climatique qui a des répercussions directes sur les plages californiennes. [RTS - Raphaël Grand]RTS - Raphaël Grand
Born in the USA: le portrait de Jane Edelman, ancienne journaliste / Le 12h30 / 2 min. / le 11 septembre 2020

Born in the USA

Le regard de cinq Américain(e)s

Les élections américaines, c’est dans un peu moins de 2 mois. Et pour suivre la campagne présidentielle, la rubrique internationale radio lance l'opération spéciale "Born in the USA".

La parole est donnée aux Américains eux-mêmes. Ces témoins s'appellent Jane, Linda, Felicia, Scott et Tim. Ils sont tous les cinq nés aux Etats-Unis et ont vécu ces quatre dernières années sous la présidence de Donald Trump.

Ils comptent bien aller voter le 3 novembre prochain. Et, en attendant, ils nous feront vivre cette campagne à travers leurs yeux et leurs voix.

>> Ecouter l'explication d'Anouk Henry et Cédric Guigon sur cette opération spéciale :

Tim, Scott, Linda, Felicia et Jane sont les cinq témoins de l'opération "Born in the USA" [RTS - Mouna Hussain]RTS - Mouna Hussain
Born in the USA: opération spéciale élections américaines qui donne la parole aux Américains / La Matinale / 3 min. / le 7 septembre 2020

Le choix des témoins

Ces cinq personnes ne sont ni experts, ni politiciens. Ce sont des citoyens américains qui vivent chacun dans une réalité différente. Et forcément, cela influence leur regard sur le monde et sur cette élection.

Côté républicain, il y a Tim, agriculteur dans l'Iowa, et Scott, un vétéran de Caroline du Nord.

Coté démocrates, Linda est psychothérapeute en Arizona; Jane est journaliste retraitée en Californie, et Felicia est militante écologiste en Géorgie.

Chacun d'entre eux et elles représente un groupe social qui va peser dans l’élection. Mais chacun a également des aspérités qui montre que les Etats-Unis ne sont pas binaires.

Une opération sur deux mois

Dans cette page et sur l'antenne de La Première, le portrait de chaque témoin est dépeint en images et en audio.

Vous pourrez également entendre leurs avis sur les grandes thématiques qui divisent les Etats-Unis, comme le bilan de Donald Trump, la crise du coronavirus, les questions des minorités, du changement climatique et des emplois.

Rencontrés en mars, la communication n'est désormais possible que virtuellement, coronavirus oblige. Mais c'est par téléphone et via les réseaux sociaux que Jane, Linda, Felicia, Scott et Tim continueront à témoigner de la campagne présidentielle américaine.