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"La crise prouve que l'école publique romande a raté le virage numérique"

Réouverture des écoles obligatoires: interview d'Alain Moser, directeur de l'école privée Moser (vidéo)
Réouverture des écoles obligatoires: interview d'Alain Moser, directeur de l'école privée Moser (vidéo) / La Matinale / 8 min. / le 28 avril 2020
En Suisse, de nombreuses questions restent en suspens en ce qui concerne la réouverture des écoles, programmée pour le 11 mai. Pour Alain Moser, directeur de l'école privée du même nom, c'est l'incompréhension qui prédomine. Il estime que les années scolaires ont été validées trop tôt et dénonce un retard de l'Ecole publique romande dans le numérique.

Dans quelles conditions les cours reprendront-ils? Si le Conseil fédéral a prévu d'inclure l'ouverture des écoles obligatoires dans la phase II de son plan de déconfinement, les contours de cette politique restent pour l'instant flous. Ainsi, il apparaît difficile en l'état de savoir si les élèves devront porter un masque en classe, s'ils seront forcés de s'y rendre ou s'ils pourront, au contraire, continuer à suivre un enseignement à distance.

Dans le post-obligatoire également, des questions ne sont pas tranchées, et des différences cantonales se forment. Faut-il maintenir les examens écrits de maturité? Fribourg s'y dit favorable, les autres cantons sont plus réticents.

"Aveu d'échec de l'enseignement à distance"

Une situation qui exaspère passablement Alain Moser: "Si on en arrive à annuler des examens écrits dans les cantons de Vaud et Genève alors qu'on les maintient à Fribourg, ce serait un aveu d'échec complet de l'enseignement à distance de l'Ecole publique (...) De notre côté, on maintiendra ces examens de toute façon, puisque notre Ecole promet aux parents l'ensemble d'un programme à l'année. Il est exclu que les élèves se rendent à l'université avec des lacunes. Car on parle bien ici de 5 à 6 mois qui ne seraient pas validés si les notes devaient être bloquées au 20 janvier."

Pour le Genevois, la situation romande du secteur public est d'ailleurs tout à fait symptomatique d'un manque d'anticipation. Questionné pour savoir si l'enseignement à distance n'avait pas d'effets sur les plus défavorisés, notamment par rapport au matériel numérique disponible (ordinateurs, tablettes, etc), le directeur explique: "Il y a eu des promesses de la part des Départements de l'instruction publique de remettre des tablettes à ceux qui n'en avaient pas, d'anticiper ce genre de situation (...) On a raté ce virage numérique dans les cantons romands. Je ne constate pas cela en Europe, ni dans le privé, ni dans les cantons suisses-allemands".

Et d'ajouter: "Il n'y a pas eu cette prise de conscience il y a quelques années. A l'EPFL et dans les Ecoles pédagogiques, on a dit à plusieurs reprises 'attention, nous sommes en train de rater ce virage' (...) Il est évident qu'aujourd'hui les jeunes doivent pouvoir accéder à toutes les données de l'école depuis chez eux (...) Il n'est pas normal qu'il faille encore prendre des dossiers et des classeurs pour travailler à la maison alors que tout le monde, dans tous les métiers, peut avoir accès à ses documents grâce au numérique."

Des réouvertures dictées par l'économie?

Alors qu'en est-il de la réouverture des écoles? Pour Alain Moser, cette décision suscite l'incompréhension car les années scolaires ont déjà été annoncées comme validées dans la plupart des degrés, ce qui aura selon lui comme résultat une perte de motivation et de sens: "Quelle sera la motivation des élèves, à part celle de se retrouver, de se serrer dans les bras et de jouer ensemble? On ne comprend pas très bien l'objectif de ce retour."

Une décision qui serait selon lui dictée par les besoins de l'économie, notamment en ce qui concerne l'école obligatoire: "Il faut dire les choses telles qu'elles sont. Si les enfants reviennent à l'école, qu'on le dise clairement, c'est pour l'économie. Ce n'est pas dans l'intérêt primordial des enfants de venir pour quelques semaines, avec une motivation très faible, si ce n'est celle de se retrouver (...) il faut aussi dire que les annonces sur la validation des années scolaires ont été tellement faites en amont..."

Propos recueillis par Romaine Morard

Adaptation web: Tristan Hertig

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Une helpline pour les enseignants vaudois

Depuis lundi, les enseignants vaudois peuvent trouver un soutien grâce à une helpline mise à leur disposition par la Haute école pédagogique du canton de Vaud www.hepl.ch/hotline . Ce sont des spécialistes du Département de la formation et de la jeunesse qui plancheront sur les problèmes posés par les enseignants. La HEP s’engage à répondre dans les 72 heures. La helpline restera en place jusqu’à la fin de l’année scolaire.