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Affaire Tinner: la justice face au gouvernement

L'affaire des documents détruits puis retrouvés continue de faire des vagues.
L'affaire des documents détruits puis retrouvés continue de faire des vagues.
Le Tribunal pénal fédéral (TPF) autorise en principe l'Office fédéral des juges d'instruction à consulter les pièces les plus explosives du dossier Tinner. Il tient à souligner que les juges dépendent, dans cette affaire, du bon vouloir du Conseil fédéral.

L'accord de principe des juges de Bellinzone, diffusé mercredi,
tient très largement compte des préoccupations du gouvernement.
Celui-ci invoque la défense de la sécurité du pays pour s'opposer à
la consultation des documents les plus sensibles du dossier
Tinner.

Relations tendues

Interrogé mercredi, le juge d'instruction fédéral Andreas Muller
s'est refusé à tout commentaire. Le mois dernier, l'instruction
ouverte contre les frères Tinner, dont il a la charge, avait
empoisonné les relations entre le pouvoir exécutif et le pouvoir
judiciaire.



Pour accéder aux pièces ultrasensibles du dossier, le juge Muller
avait fait perquisitionner les locaux de la Police fédérale. Dans
la foulée, il avait fait saisir un coffre-fort contenant une clé
donnant accès aux documents les plus controversés. Il avait ensuite
déposé une demande de levée des scellés.



Dans son arrêt, le TPF accepte la requête mais constate que
l'Office fédéral des juges d'instruction ne dispose pas, de facto,
d'une marge de manoeuvre illimitée. Il reste tributaire du bon
vouloir du Conseil fédéral.

Droit de consultation limité

Ce dernier, révèle mercredi le TPF, a déjà autorisé l'Office
fédéral des juges d'instruction à consulter, le 3 août dernier,
certains documents. Il ne lui a cependant pas donné accès aux plans
de la bombe atomique, dont il avait ordonné la destruction, ni à un
autre classeur, qui contient des informations concernant la
collaboration entre les Tinner et les services secrets
américains.



Le TPF ne cache pas que ces informations sont importantes pour la
procédure ouverte contre les frères Urs et Marco Tinner et leur
père Friedrich Tinner car les inculpés se prévalent de leur lien
avec la CIA pour justifier les actes qui leur sont reprochés.



Pour le TPF, la justice ne pourra qu'accorder aux parties un droit
de consultation limité du dossier. Elles ne pourraient être
autorisées qu'à feuilleter ou lire certains documents, sans pouvoir
les photocopier.



ats/dk

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La suite de la procédure

Pour ce qui concerne la suite de l'instruction du procès Tinner, le TPF lance une forme de mise en garde. Il souligne que le Conseil fédéral portera la responsabilité de ses décisions si la justice est empêchée d'avoir accès aux pièces sensibles du dossier.

Le TPF enjoint également l'Office des juges d'instruction à terminer rapidement son enquête. L'Office devra s'abstenir de retarder la procédure en recourant à l'entraide judiciaire internationale pour tenter de se procurer des documents que le Conseil fédéral aurait détruits ou refuserait de rendre accessibles.

En novembre 2007, le Conseil fédéral avait ordonné la destruction des documents les plus sensibles du dossier Tinner. Certaines copies avaient échappé à cette destruction et étaient réapparues en avril dernier.

L'Office fédéral des juges d'instruction enquête contre les frères Tinner, leur père et d'autres personnes pour d'éventuelles violations de la loi fédérale sur le matériel de guerre.

Ces derniers auraient travaillé pour le compte d'Abdul Qader Khan, le père de la bombe atomique pakistanaise, qui avait aidé la Libye a développé un programme d'armes nucléaires.