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"Comme pour le climat, le citoyen doit se mobiliser pour acheter local"

L'invité d'actualité (vidéo) - Yves Defferrard sur les négociations des CCT dans le commerce de détail
L'invité d'actualité (vidéo) - Yves Defferrard sur les négociations des CCT dans le commerce de détail / La Matinale / 9 min. / le 16 octobre 2019
Invité de La Matinale pour s'exprimer sur la crise que traverse, à Nyon, le secteur du commerce de détail, le syndicaliste vaudois Yves Defferrard estime que prolonger les horaires d'ouverture des magasins est inutile, et que le consommateur a un rôle à jouer.

Le canton de Vaud vit actuellement avec un conflit ouvert à Nyon. Après le refus dans les urnes d'ouvrir une heure de plus les commerces le samedi, la faîtière des commerçants de la ville a démissionné en bloc mardi. Elle dénonce une confiance rompue avec les syndicats et affiche sa volonté de dénoncer la convention collective de travail existante au niveau communal.

>> Lire aussi : En crise, le comité des commerçants de Nyon démissionne en bloc

Pourquoi est-il si difficile de négocier des conventions collectives de travail dans le commerce de détail? En Suisse romande, seuls les cantons de Neuchâtel et du Jura y sont parvenus. Invité de La Matinale de la RTS mercredi, le secrétaire régional du syndicat Unia Vaud Yves Defferrard met en avant les particularités de la branche: "Pour trouver un accord, il faut mettre autour de la table des grands et des petits commerces, qui n'ont pas les mêmes intérêts. On l'a vu à Nyon, ça pose de grosses difficultés dans les négociations", explique le syndicaliste.

"Une branche qui peine à trouver des intérêts communs"

Il pointe du doigt la difficulté qu'ont les commerçants à parler d'une seule voix, contrairement, par exemple, au secteur de la construction. "C'est une branche qui peine à trouver des intérêts communs, à s'organiser entre employeurs. On est dans une situation compliquée, mais pas perdue. Historiquement, les CCT ont souvent pris du temps. Il faut persévérer, parce que le dialogue social n'est pas quelque chose, en Suisse, qui se fait du jour au lendemain".

Autre difficulté: la particularité vaudoise qui veut que chaque commune puisse décider de ses propres heures d'ouverture. "Chaque ville ou village décide elle-même de ses horaires. Ça complexifie la situation", estime Yves Defferrard. Il a toutefois bon espoir que la négociation d'une CCT puisse entraîner, par la suite, une harmonisation des horaires au niveau cantonal. Mais pour cela, "il faut que les conditions de travail des salariés soient d'abord réglées avant qu'on commence à discuter de modifier les horaires", prévient-il. "C'est ce que nous ne sommes pas arrivés à faire à Nyon".

Le pouvoir d'achat n'est pas extensible, on n'a qu'un salaire à la fin du mois... Même avec des horaires d'ouverture 24h/24, vous n'aurez de toute façon pas assez d'argent à dépenser

Yves Defferrard, secrétaire régional d'Unia Vaud

S'il ne nie pas les difficultés traversées par la branche du commerce de détail, confrontée notamment à la concurrence grandissante du commerce en ligne, il insiste sur le fait qu'étendre les horaires des magasins ne réglera pas les problèmes: "Le pouvoir d'achat n'est pas extensible, on n'a qu'un salaire à la fin du mois... Même avec des horaires d'ouverture 24h/24, vous n'aurez de toute façon pas assez d'argent à dépenser". Et d'ajouter qu'à peu près 75% des votes qui ont eu lieu sur ces questions d'extension des horaires ont abouti à des échecs pour les employeurs, "parce que la population suisse est attentive aux conditions de travail des salariés".

>> Lire à ce sujet : Les Nyonnais refusent l'extension des horaires d'ouverture des commerces

Lutter contre les achats sur internet

Selon Yves Defferrard, l'ennemi commun, ce sont les achats en ligne. "Ils sont la source la plus grande du problème. Comme pour le climat, le citoyen doit se mobiliser pour acheter local, et plus particulièrement lorsque les conditions de travail des employés sont bonnes", estime le secrétaire régional d'Unia Vaud.

Allez acheter à Lausanne, car il y a une CCT! Ça mettra la pression sur les autres villes

Yves Defferrard

"Aujourd'hui, il ne reste plus qu'une CCT dans le canton de Vaud, celle de Lausanne. Les employés lausannois sont les seuls qui ont droit à un week-end de congé par mois. Tous les autres devront travailler tous les week-ends. Ce sont des situations qu'on doit modifier". Sa recommandation? "Allez acheter à Lausanne, car il y a une CCT! Ça mettra probablement la pression sur les autres villes".

Propos recueillis par Valérie Hauert
Adaptation web: Vincent Cherpillod

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