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La Constituante valaisanne face à l’enjeu de la cohésion, toujours sensible dans les cantons bilingues

Quelle est la place de la minorité linguistique valaisanne dans la nouvelle Constitution?
Quelle est la place de la minorité linguistique valaisanne dans la nouvelle Constitution? / La Matinale / 4 min. / le 13 février 2024
En Valais, la place à accorder à la minorité linguistique est le point chaud du projet de nouvelle Constitution. Avant le scrutin du 3 mars, les tensions sont fortes entre le Haut-Valais qui s'estime lésé par la réforme et le Valais romand qui trouve que la minorité linguistique est déjà assez considérée.

La région germanophone du Valais craint d'être moins bien représentée, si le peuple accepte le projet de nouvelle Constitution le 3 mars prochain.

Aujourd'hui, la Constitution valaisanne garantit aux 24% de la population, un siège sur les cinq du Conseil d'Etat. Demain, ce serait toujours un siège, mais sur un total de sept conseillers d'Etat, puisque les élus germanophones à la Constituante ont bataillé sans succès pour obtenir une garantie de deux sièges.

Le Haut-Valais aurait également voulu s'approprier l'un des deux postes de sénateurs sous la Coupole, mais là aussi, les francophones ont dit non. Enfin, le Haut perdra des députés, suite à un changement dans la manière de répartir les sièges du Grand Conseil.

>> Lire aussi : Un recours déposé dans le cadre du futur vote sur la Constitution valaisanne

"Manque de sensibilité"

"Il incombe à la majorité de tendre la main à la minorité, ce qui n’a malheureusement pas été le cas dans ce projet. Ce qui se passe maintenant est dangereux pour le futur", s’émeut Flavio Schmidt. Le constituant du Centre haut-valaisan analyse "ce manque de sensibilité" par le fait que les francophones, minoritaires en Suisse, ont du mal à se considérer comme majoritaires en Valais.

La plupart des francophones contestent cette lecture. Ils estiment plutôt que le Haut s’est montré trop gourmand et rappellent qu’en 2015, une réforme des institutions avait échoué devant le peuple, en grande partie à cause d'un quota pour le Haut-Valais.

Egalité de traitement

Pour la constituante socialiste Corinne Duc-Bonvin, le Haut-Valais ne doit pas forcément être considéré comme une minorité et n’a pas besoin d'un régime de faveur. "La population haut-valaisanne n’est pas si fragile qu’elle en a l’air et n’a pas besoin d’être protégée. Avec la Constitution actuelle de 1907, elle est largement représentée dans toutes les chambres, qu’elles soient cantonales ou fédérales."

La population haut-valaisanne n’est pas si fragile qu’elle en a l’air et n’a pas besoin d’être protégée

Corinne Duc-Bonvin, constituante socialiste

Corinne Duc-Bonvin ajoute que la majorité de la Constituante a souhaité suivre le principe "une personne, une voix", pour traiter toutes les régions du canton sur un pied d’égalité.

Romain Carrupt/doe

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Pas de privilège à Fribourg

Dans les cantons bilingues, l'équilibre entre la majorité et la minorité est toujours délicat à trouver. A Fribourg où l’expression "guerre des langues" revient ponctuellement dans le débat public, la relation entre les francophones et les germanophones était aussi le point chaud de la Constituante, au début des années 2000.

Dans ce canton, l'enjeu tourne surtout autour du statut des communes, francophone, germanophone ou bilingue, et des conséquences que cela doit avoir en termes de traduction de documents officiels par exemple.

La question est moins celle de la représentativité politique des deux cultures. Il n'y a d’ailleurs aucune garantie de siège pour la minorité linguistique, ni au Conseil d'Etat, ni au Grand Conseil fribourgeois.

A Berne, un quota, même sans Moutier

Dans le canton de Berne, la minorité francophone du Jura bernois a, elle, droit à au moins un des sept sièges du Conseil exécutif, ainsi qu'à douze sièges au Grand Conseil.

A noter que le départ de Moutier dans le canton du Jura n'y changera rien, ce que salue le vice-chancelier du canton de Berne David Gaffino. "Les autorités politiques du canton ont heureusement échappé au piège de réduire les sièges du Jura bernois, parce qu’il perd mathématiquement sa plus grande commune. Cela aide beaucoup à ce que le débat soit aujourd’hui dépassionné."