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Pour Mathieu Avanzi, "on ne va plus échapper au partage de données"

L'invité de La Matinale (vidéo) - Mathieu Avanzi, directeur du centre de dialectologie et d’étude du français régional (UNINE)
L'invité de La Matinale (vidéo) - Mathieu Avanzi, directeur du centre de dialectologie et d’étude du français régional (UNINE) / La Matinale / 12 min. / le 26 juillet 2023
Dès la rentrée, l’Université de Neuchâtel proposera un nouveau master "Patrimoine régional et humanités numériques". Une formation qui combine le patrimoine régional aux outils informatiques.

Si l'informatique a longtemps été l'une des bêtes noires des étudiants de lettres et des sciences humaines, ces disciplines n'échappent maintenant plus aux nouveaux outils informatiques. "Jusqu'ici, le traitement des données était réservé aux spécialistes ou aux scientifiques. Mais aujourd'hui, dans notre société de plus en plus connectée, il est très important de donner aux étudiants ces outils et leurs méthodes", a plaidé le directeur du centre de dialectologie et d’étude du français régional à Neuchâtel, Mathieu Avanzi, mercredi dans la Matinale de la RTS.

Pour l'initiateur de la nouvelle formation "Patrimoine régional et humanités numériques" de l'Université de Neuchâtel, la possession de données implique aussi la maîtrise d'outils spécifiques nécessaires à leur investigation. Le nouveau master de l'Université de Neuchâtel ne vise pas à former des informaticiens, mais des chercheurs. Il n'est donc pas nécessaire de posséder un solide background en informatique, précise Mathieu Avanzi.

Tous les domaines de recherche sont concernés

Les sciences humaines et sociales sont confrontées à une masse de données. Elles proviennent notamment des réseaux sociaux, de la presse ou encore des archives.

Aujourd'hui, on ne peut plus recourir aux méthodes d'antan en gérant manuellement ces informations, observe Mathieu Avanzi: "Par exemple, si on fait de la linguistique, pour comprendre l'évolution d'un mot, on commence par prendre des données qui remontent au Moyen Âge. Là, elles ont été organisées par d'autres. Puis on ira jusqu'au 21ème siècle, donc on aura parfois une dizaine de siècles au travers desquels on doit naviguer. Pour cela, une formation aux nouveaux outils est nécessaire", illustre-t-il.

Savoir rassembler ces données est également important, ajoute le professeur: "Il y a des scanners très puissants, il n'est plus nécessaire de numériser feuille après feuille [...]. A partir de là, quand vous avez 1000 pages, qu'allez-vous en faire? Comment fonctionnerez-vous sans recopier des textes à la main? Il y a des logiciels de numérisation qui sont capables de reconnaître les caractères. Vous ne chercherez pas certaines occurrences manuellement". Ces outils informatiques ont désormais totalement investi les sciences humaines, résume le professeur.

Transition numérique en expansion

Les universités présentent de plus en plus de recherches cosignées par des informaticiens, des spécialistes ou des ingénieurs. "Quand on présente ces recherches à des étudiants et qu'on leur demande de les reproduire, on voit qu'il y a un problème, une absence de méthode pour reprendre ce qui est fait", analyse Mathieu Avanzi. Or, pour rester compétitifs notamment sur le marché du travail, les étudiants devront performer dans l'utilisation et la maîtrise de ces outils, estime-t-il.

Aujourd'hui, la pression de la transition numérique se ressent fortement. En terme de mandats, le Fonds national suisse de la recherche scientifique se concentre sur la gestion des données, affirme le scientifique: "On ne va plus y échapper, parce que l'on a besoin de ce partage. On est à un moment où il y a du télétravail, des réunions en ligne. Par respect de l'environnement, on évite de faire des déplacements inutiles. Dans ce sens, le partage de données est crucial. La numérisation est la clé d'une société plus écologique."

L'intelligence artificielle fait également partie du cursus des étudiants. La question se pose sur la manière de l'intégrer dans l'enseignement. Selon Mathieu Avanzi, il ne faut pas l'interdire, "il faut faire avec, en sensibilisant les étudiants aux problèmes et aux limites de ces technologies. De toute façon, on va devoir travailler avec de plus en plus", conclut le scientifique.

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Propos recueillis: Aleksandra Planinic
Adaptation web: Miroslav Mares

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