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En Egypte, la "journée de la colère" des islamistes vire au bain de sang

caire, égypte [Hassan Ammar]
Des supporters de l'ex-président Morsi transportent l'un des leurs, blessé, près de la place Ramsès au Caire, le 16 août 2013. - [Hassan Ammar]
La mobilisation des partisans du président déchu Mohamed Morsi, qui s'est traduite par des affrontements avec les forces de l'ordre dans toute l'Egypte, s'est soldée par un nouveau bilan meurtrier d'au moins 75 victimes.

La "journée de la colère" décrétée vendredi par les Frères musulmans en Egypte a dégénéré en de nouveaux affrontements meurtriers au Caire et dans d'autres villes du pays.  On comptait au moins 75 morts en soirée. Un appel des islamistes à manifester samedi fait craindre une nouvelle escalade.

Alors que des quartiers entiers du Caire ont été transformés en champs de bataille tout au long de la journée, les manifestations ont quasiment cessé une heure après l'entrée en vigueur du couvre-feu nocturne, à l'appel de "l'Alliance contre le coup d'Etat".

Les islamistes appellent à manifester encore

La coalition a toutefois appelé à des manifestations quotidiennes durant une semaine dès samedi pour dénoncer le "massacre" de mercredi, journée la plus sanglante depuis la chute du régime Moubarak en février 2011 avec 578 morts, en majorité des islamistes tués dans la dispersion de leurs camps au Caire.

Le pouvoir mis en place par l'armée après la destitution de Mohamed Morsi le 3 juillet affirme désormais se battre contre un "complot terroriste malveillant des Frères musulmans", la confrérie du président déchu. Elle a autorisé ses hommes à ouvrir le feu sur les manifestants.

Les principaux affrontements au Caire

Des milliers d'islamistes ont convergé à la sortie des grandes prières du vendredi vers la place Ramsès, dans le centre de la capitale, où des affrontements ont éclaté. Les principaux affrontements ont eu lieu au Caire, mais des tirs ont également été entendus dans d'autres grandes villes du pays où les pro-Morsi manifestaient comme à Alexandrie (nord), Beni Soueif et Fayoum au sud du Caire, et dans la ville touristique de Hurghada sur la mer Rouge. Le ministère de l'Intérieur a fait état de plusieurs attaques des pro-Morsi contre des postes de police.

Retrouvez tous les détails de la journée sur notre minute par minute: Heurts meurtriers entre manifestants et policiers en Egypte

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agences/rber

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Inquiétudes à l'étranger

Alors que de nombreux pays occidentaux ont condamné les violences, le Conseil de sécurité de l'ONU a appelé à un "maximum de retenue" en Egypte.

La cheffe de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, a invité les Etats membres de l'Union européenne à prendre "des mesures appropriées", alors qu'une réunion des représentants des 28 États membres est prévue lundi à Bruxelles.

Les Etats-Unis ont de leur côté annulé des exercices militaires communs, sans aller jusqu'à interrompre l'aide annuelle (1,5 milliard de dollars) versée en grande partie à la toute-puissante armée de leur allié. Ils ont exhorté cette dernière à ne pas recourir à "la force létale" contre des manifestants non violents.

Les réactions des pays arabes

La majorité des dirigeants arabes ont appuyé tacitement le coup de force sanglant contre les Frères musulmans en Egypte. Selon des experts, ils y voient un coup d'arrêt à la menace que représente la confrérie pour leur pouvoir.

Seuls le Qatar, parrain des Frères musulmans, et la Tunisie, où le parti au pouvoir appartient à la même mouvance, ont condamné de manière virulente le bain de sang.

"Toutes les monarchies du Golfe, sauf le Qatar, ainsi que la Jordanie et d'autres pays arabes craignaient l'exportation de la révolution des Frères musulmans chez eux. C'est pour cela qu'elles ont misé sur un retour au schéma classique d'un pouvoir fort en Egypte, pays pivot du monde arabe", estime Khattar Abou Diab, professeur à Paris-Sud.