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Tunisie: 42 prisonniers meurent dans un incendie

L'armée a de nouveau été déployée dans la capitale, à la demande de la population cette fois-ci. [Zohra Bensemra]
L'armée a de nouveau été déployée dans la capitale, à la demande de la population cette fois-ci. - [Zohra Bensemra]
Au moins 42 prisonniers ont péri dans l'incendie samedi d'une prison de Monastir, dans le centre-est de la Tunisie, a déclaré un médecin de l'hôpital local. Dans la capitale comme dans de nombreuses villes de province, des heurts attribués aux partisans de Ben Ali ont été rapportés.

"Trent et un corps ont été transportés dans la morgue et onze ont suivi", a déclaré le Dr Ali Chatli, chef du service de médecine légale à l'hôpital Fatouma Bourguiba de Monastir (160 km au sud de Tunis).

Selon ce médecin, l'incendie s'est déclaré lorsque un détenu a mis le feu à un matelas dans un dortoir hébergeant près de 90 détenus lors d'une tentative d'évasion qui a tourné à la panique en raison de coups de feu tirés près de la prison.

Il a précisé que toutes les victimes du premier groupe ont été identifiées et ont été transportées dans l'hôpital avant l'aube, et que les 11 autres venaient d'arriver. "Les corps sont arrivés carbonisés mais on a pu les identifier", a-t-il ajouté, précisant que les victimes sont mortes de suffocation et de brûlures graves.

Il s'agit de l'incident le plus meurtrier depuis le début, il y a un mois des émeutes qui ont conduit à la fuite vendredi de l'ancien chef de l'Etat Zine El Abidine Ben Ali.

Nuit agitée en banlieue

Plusieurs quartiers de la proche banlieue de Tunis ont vécu une nuit d'angoisse en raison de destructions et de pillages menés par des bandes de personnes encagoulées, selon les témoignages d'habitants apeurés, qui ont été relayés par les télévisions locales durant la nuit.

Des appels ont été lancés à l'armée, qui protège dans le cadre de l'état d'urgence décrété samedi des bâtiments publics, pour qu'elle intervienne d'urgence contre ces bandes. L'armée a fait survoler la ville par des hélicoptères alors que les spéculations allaient bon

Les enseignes françaises, proches du pouvoir déchu, constituent des cibles privilégiées pour les pilleurs. [KEYSTONE - Hassene Dridi]
Les enseignes françaises, proches du pouvoir déchu, constituent des cibles privilégiées pour les pilleurs. [KEYSTONE - Hassene Dridi]

train sur l'identité des responsables des violences et des pillages.

Partisans de Ben Ali pointés du doigt

Des partisans du président en fuite seraient impliqués dans les attaques et les exactions contre la population à Tunis, selon le témoignage d'un diplomate français. Ce diplomate, qui a personnellement assisté à une scène de violences contre des civils dans le centre de Tunis samedi avant l'aube a raconté, sous le couvert de l'anonymat, ce qu'il a vu.

Son témoignage constitue l'indication la plus claire jusqu'ici de l'implication de partisans du président en fuite, dont des membres des forces de sécurité, dans la vague d'attaques contre des civils, la nuit, et alors qu'un couvre-feu est imposé à la ville en vertu de l'état d'urgence décrété vendredi.

Jusqu'ici, de nombreuses informations laissaient supposer l'implication de partisans de Ben Ali dans les violences qui se sont intensifiées après son départ vendredi, touchant de nombreuses banlieues de la capitales.

Le président de la Ligue Tunisienne de défense des droits de l'Homme (LTDH) Mokhtar Trifi a estimé que les bandes de casseurs étaient formées de "commandos téléguidés ayant pour objectif de discréditer les manifestants".

Des habitants ont raconté que les casseurs circulaient parfois sous couvre-feu dans des voitures 4X4 sans plaques d'immatriculation ou des voitures de location reconnaissables à leurs plaques bleue. De nombreux témoins ont évoqué la participation aux exactions de miliciens du parti de Ben Ali, le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), voulant déstabiliser le pays.

Incidents signalés dans tout le pays

L'armée a saisi des armes cachées dans les coffres de voitures de location conduites par des membres de gangs dans la cité Ettahir (ouest de Tunis) et à El Manar (nord), ont rapporté samedi deux témoins.

En province, des violences ont été signalées dans des villes du nord (Bizerte) du centre (Kairouan) et du sud (Gafsa), dont les habitants ont décrit un état d'insécurité, une population terrorisée et des saccages  perpétrés par des individus camouflés en l'absence des forces de sécurité.

afp/jeh

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Commerces français en première ligne

L'hypermarché Géant, à la sortie nord de Tunis, a été pillé samedi après avoir été attaqué vendredi.

Des dizaines de personnes sortaient du centre commercial emportant tout ce qui leur est tombé sous la main, en l'absence de tout représentant des forces de l'ordre, a indiqué un photographe.

"Un poste proche de la garde nationale a été déserté", a-t-il poursuivi.

L'hypermarché avait été partiellement incendié vendredi.

Certains pilleurs fracassaient samedi les vitrines de magasins qui ont été épargnés par les flammes et des chariots vides étaient éparpillés jusqu'à une autoroute proche.

Des manifestants ont attaqué et pillé ces derniers jours des magasins des enseignes françaises Carrefour et Casino auxquels sont associés des proches du pouvoir en Tunisie.

Deux autres magasins Carrefour, à la Marsa (nord de Tunis) et au quartier Ghazala ont été pillés vendredi après-midi, selon de nombreux témoins.

Trois autres magasins, Monoprix et Magasin Général, ont été pillés dans d'autres quartiers de Tunis vendredi, ont rapporté des habitants.

Ces pillages se sont déroulés en l'absence des forces de sécurité, selon ces témoins.