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Tunisie: couvre-feu décrété dans la capitale

Mercredi, l'armée a fait irruption dans la capitale avec ses blindés.
Mercredi, l'armée a fait irruption dans la capitale avec ses blindés.
Mercredi, le gouvernement a décrété un couvre-feu nocturne à Tunis et dans sa banlieue, quelques heures après que l'armée s'y est déployée pour la première fois depuis le début de la contestation initiée en fin d'année par la jeunesse en manque de perspectives. De plus, le ministre de l'Intérieur a été limogé.

Tunis était sous tension mercredi à la suite d'accrochages entre des manifestants et la police qui se sont produits à plusieurs endroits du centre-ville, a constaté un journaliste de l'Associated Press sur place. Face à ces troubles qui secouent la Tunisie depuis plus de trois semaines, le président Zine El Abidine Ben Ali a limogé le ministre de l'Intérieur.

Des soldats armés, camions, jeeps et blindés, ont fait leur apparition dans la capitale mercredi. Outre des renforts importants de police et unités d'intervention spéciales, deux véhicules de l'armée et des soldats montaient la garde sur la place reliant les avenues de France et Habib Bourguiba, face à l'ambassade de France et à la grande cathédrale de Tunis. Des renforts militaires étaient également visibles autour de la radio-télévision.

Un mouvement qui se propage

L'armée avait aussi pris position au centre et à l'entrée de la cité populaire d'Ettadhamen (Solidarité), une banlieue où des jeunes et des policiers se sont affrontés la veille au soir.

Mardi, les heurts se sont propagés à la capitale Tunis.
Mardi, les heurts se sont propagés à la capitale Tunis.

C'était la première fois que des violences se produisaient près de Tunis, l'épicentre du mouvement se situant jusqu'à présent dans le centre du pays. Un blindé et des soldats étaient positionnés à l'entrée du faubourg où des carcasses de voitures et d'un bus incendiés n'avaient pas encore été enlevées, près de la sous-préfecture attaquée.

Des bris de verre et des pneus brûlés jonchaient la route de Bizerte qui traverse les cités populaires d'Ettadhamen, Intilaka et El Mnihla, à l'ouest de la capitale. La crise a pris un tour dramatique ce week-end avec des affrontements violents dans des villes du centre qui ont fait 21 morts selon le gouvernement et plus de 50 selon une source syndicale.

Chef de l'armée de terre aussi limogé

Des sources de l'opposition ont fait état du limogeage du chef d'état-major de l'armée de terre, le général Rachid Ammar. Celui-ci aurait refusé de donner l'ordre aux soldats de réprimer les émeutes et exprimé des réserves sur un usage excessif de la force, selon les mêmes sources.

Il aurait été remplacé par le chef des renseignements militaires Ahmed Chbir, selon ces informations qui n'ont pu être confirmées officiellement.

Le président Ben Ali âgé de 74 ans, était intervenu lundi à la télévision, promettant la création de 300'000 emplois en deux ans. Il avait aussi qualifié les violences d'"actes terroristes" et accusé des "éléments hostiles à la solde de l'étranger". L'opposition et les ONG ont jugé la réponse du pouvoir insuffisante, un parti radical appelant même à la démission du gouvernement. Selon dix ONG dont la Ligue de défense des droits de l'homme, les véritables causes de la crise sont "la corruption, le népotisme et l'absence de libertés politiques".

afp/mej

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Recours à la force condamné par l'UE

La diplomatie européenne a condamné mercredi l'usage "disproportionné" de la force par la police en Tunisie, où le ministre de l'Intérieur vient d'être limogé à la suite des violentes manifestations sociales. "Cette violence est inacceptable, les auteurs doivent être identifiés et traduits en justice", a déclaré la porte-parole de la cheffe de la diplomatie européenne Catherine Ashton.

"Nous sommes inquiets du recours à la force disproportionné de la police envers les manifestants pacifiques", a-t-elle ajouté, précisant que l'UE demandait une enquête à ce sujet. Lundi, Mme Ashton avait demandé la "libération immédiate" des manifestants, blogueurs et journalistes arrêtés ces dernières semaines en Tunisie.

Le co-président du groupe des Verts au Parlement européen, Daniel Cohn-Bendit a demandé de son côté l'ouverture d'une commission d'enquête internationale indépendante et la suspension immédiate des négociations d'un statut avancé UE-Tunisie. Le chef de file des Verts européens a également souhaité que la situation en Tunisie soit à l'ordre du jour de la prochaine session plénière du Parlement européen la semaine prochaine à Strasbourg.

Il a dénoncé la réaction "pas à la hauteur" de l'UE et estimé que le président Zine El Abidine Ben Ali "n'est autre que le meilleur fomenteur de l'intégrisme". Il a accusé la France d'être "le paillasson du président Ben Ali" en "entretenant un leurre comme celui de la réussite économique de la Tunisie".

Mardi soir, la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton s'est dit "inquiète quant aux troubles et à l'instabilité" dans ce pays dirigé depuis 23 ans par le président Zine El Abidine Ben Ali. Elle s'est également déclarée préoccupée par "la réaction du gouvernement, qui a malheureusement provoqué la mort de certains jeunes protestataires" et a appelé à une "solution pacifique".

Trois civils tués dans le sud mercredi

Deux civils ont été tués mercredi par des tirs de la police à Douz, dans le sud de la Tunisie, lors d'une manifestation ayant dégénéré, a annoncé un témoin à l'AFP. Quatre à cinq autres personnes ont été blessées, dont certains grièvement, a-t-il précisé.

C'est la première fois depuis le début des émeutes il y a un mois en Tunisie que cette ville de 30'000 habitants, située à 550 km au sud de Tunis, connaît de telles violences, a affirmé ce témoin, sous couvert d'anonymat.

Mercredi, un homme de 23 ans a été abattu lors d'affrontements avec la police à Thala, dans l'ouest du pays, ont rapporté à Reuters deux témoins et le frère de la victime.

C'est ce week-end que la crise a pris un tour dramatique, avec des affrontements violents dans des villes du centre qui ont fait 21 morts selon le gouvernement et plus de 50 selon une source syndicale.

Le mouvement a débuté le 17 décembre après l'immolation par le feu d'un jeune marchand de rue de Sidi Bouzid, dans le centre-ouest, à 265 km de Tunis, qui protestait contre la saisie de sa marchandise par la police. Il a gagné mardi soir une banlieue de Tunis, la capitale, où l'armée a été déployée mercredi.