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Frappant plus de 280 millions de personnes, l'insécurité alimentaire s'aggrave

282 millions de personnes ont été menacées par la faim en 2023: interview de Dominique Burgeon
282 millions de personnes ont été menacées par la faim en 2023: interview de Dominique Burgeon / Forum / 8 min. / hier à 18:00
L'insécurité alimentaire s'est aggravée dans le monde en 2023, près de 282 millions de personnes ayant nécessité une aide d'urgence, alertent mercredi 16 organisations de l'ONU et humanitaires. Les conflits, les chocs économiques et les événements météorologiques extrêmes ont joué un rôle.

Pas moins de 24 millions de personnes supplémentaires sont concernées par rapport à 2022, détaille le dernier rapport mondial sur les crises alimentaires du Réseau d'information sur la sécurité alimentaire (FSIN), pour qui les perspectives restent "sombres" pour l'année en cours.

C'est aussi la cinquième année consécutive d'augmentation du nombre de personnes en état d'insécurité alimentaire aiguë, qui désigne une situation dans laquelle la vie ou les moyens d'existence d'une personne sont en péril imminent parce que celle-ci n'est pas en mesure de s'alimenter de manière adéquate.

Trois causes principales

Cette aggravation sur une année est en partie due à un élargissement des zones couvertes par le rapport. Cela fait suite à "des chocs nouveaux ou intensifiés" ainsi qu'à "une détérioration marquée dans des contextes de crises alimentaires clés tels que le Soudan et la bande de Gaza", explique Fleur Wouterse, directrice adjointe du bureau des urgences et de la résilience de l'agence des Nations unis pour l'agriculture FAO.

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Selon le rapport, les situations de conflit ou d'insécurité sont devenues en 2023 la principale cause d'insécurité alimentaire aiguë dans 20 pays ou territoires où 135 millions de personnes en ont souffert. Viennent ensuite les chocs économiques (principale cause pour 75 millions de personnes dans 21 pays) et les événements climatiques extrêmes comme les inondations ou les sécheresses (72 millions de personnes dans 18 pays).

>> Pour en savoir plus, lire : Le réchauffement climatique à l'origine de la famine à Madagascar et Les pénuries alimentaires aggravées par la guerre en Ukraine

Dominique Burgeon, directeur du bureau de liaison de la FAO à Genève, détaille dans Forum mercredi soir que "ce sont donc ces trois événements cumulés et souvent ensemble" qui expliquent ces chiffres.

Quelque 700'000 personnes étaient au bord de la famine en 2023, dont 600'000 à Gaza. Un chiffre qui a depuis encore grimpé dans le territoire palestinien miné par la faim et la guerre, à 1,1 million de personnes.

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Aide insuffisante

Depuis le lancement de ce rapport en 2016 par le Réseau mondial contre les crises alimentaires, une alliance fédérant des organisations onusiennes, l'Union européenne, les Etats-Unis et des organisations humanitaires, "le nombre de personnes en situation d'insécurité alimentaire est passé de 108 millions à 282 millions, tandis que la prévalence (la part de la population touchée au sein des zones concernées, ndlr) est passée de 11% à 22%", ajoute Fleur Wouterse.

Et la crise alimentaire se prolonge depuis cette date pour l'Afghanistan, la République démocratique du Congo, l'Ethiopie, le Nigéria, la Syrie et le Yémen, relève-t-elle.

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On va droit au précipice et le risque qu'une famine à grande échelle soit déclarée dans les prochaines semaines est réel

Dominique Burgeon, directeur du bureau de liaison de la FAO à Genève

"Les financements ne suivent pas les besoins. Les gouvernements doivent renforcer les ressources disponibles pour le développement durable", plaide le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres en avant-propos du rapport.

"Il est clair qu'on va droit au précipice et que le risque qu'une famine à grande échelle soit déclarée dans les prochaines semaines est réel", si l'on ne parvient pas à acheminer de l'assistance alimentaire ou pour soutenir les moyens agricoles existants dans ces populations, prévient encore Dominique Burgeon.

Le rapport note toutefois quelques signes d'améliorations. Fleur Wouterse ajoute que la situation s'est améliorée en 2023 dans 17 pays (en République démocratique du Congo ou en Ukraine par exemple). "Si on intervient en soutenant l'agriculture, il est possible de faire sortir les populations de l'insécurité alimentaire", relève-t-elle.

ats/juma

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