Alimentées par la droite, les polémiques s'enchaînent autour des JO de Paris

Les polémiques s'enchaînent à propos des Jeux olympiques de Paris qui se tiendront du 26 juillet au 11 août. La dernière en date concerne la star franco-malienne Aya Nakamura, chanteuse francophone la plus écoutée dans le monde, qui aurait été choisie pour reprendre les classiques d'Edith Piaf lors de la cérémonie d'ouverture.

Si pour l'heure ni le président de la République, ni la chanteuse n'ont confirmé cette rumeur, il n'en aura pas fallu plus pour faire bondir l'extrême-droite, arguant notamment que la jeune femme "ne chante pas en français" ou que "la France n'assume pas ses racines", comme l'a déclaré mardi sur BFMTV Marion Maréchal, tête de liste de Reconquête pour les élections européennes de juin prochain.

Dimanche dernier, lors du premier grand meeting de campagne du parti d'Eric Zemmour, l'assemblée n'avait d'ailleurs pas manqué de huer l'artiste aux origines multiculturelles à la simple évocation de son nom. Et c'est sans compter également les nombreux messages hostiles la concernant, aux réminiscences parfois racistes, que l'on peut lire depuis quelques jours sur les réseaux sociaux.

Un dépôt de plainte envisagé

L'avocat de la chanteuse Me Karim Sebihat a d'ailleurs pris la parole mercredi sur la chaîne de radio française RMC. S'il avoue ne pas encore avoir échangé avec elle sur la suite à donner à cette affaire, il souligne que "des poursuites judiciaires seraient parfaitement adaptées et amplement justifiées". Avant d'ajouter: "Il faut rappeler que ces propos et ces actes tombent sous le coup de la loi. J’y vois carrément une provocation à la discrimination, de manière cumulative, et même à la violence."

Aya Nakamura, quant à elle, semble pour l'heure garder ses distances. L'artiste qui compte 7,38 millions d'abonnés pour 3 milliards de vidéos vues, dont 954 millions rien que pour le clip de "Djadja", a seulement posté un message rassurant sur X, remerciant sa communauté pour son soutien.

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L'affiche officielle pas épargnée

Cette énième polémique en rappelle une autre. En début de semaine dernière, le comité d’organisation a dévoilé l’affiche officielle des JO, qui a été placardée partout dans la capitale française. Mais des internautes ont repéré un petit détail: sur le dessin, qui est une représentation fantasmée de la Ville Lumière, la croix chrétienne au sommet du Dôme des Invalides a disparu.

Certains soulignent également l'absence du drapeau français. Là aussi, l'extrême-droite est montée au créneau, déplorant un irrespect de l'identité nationale.

Avec en toile de fond les élections européennes de juin prochain, les ténors des partis de droite et d'extrême-droite n'ont pas manqué de donner leurs avis cinglants. Le député européen Xavier Bellamy, tête de liste des Républicains, n'a par exemple pas hésité à dire que l'histoire de la France était reniée: "Ils sont prêts à nier la France jusqu'à travestir la réalité pour annuler son histoire", a-t-il écrit sur X.

"Pourquoi aucun drapeau français? Quel intérêt d'organiser les Jeux olympiques en France si c'est pour cacher ce que nous sommes?", a renchéri la zemmouriste Marion Maréchal. Et Jordan Bardella, tête de liste Rassemblement national, de taper sur le macronisme qui veut, selon lui, "effacer notre identité".

Ugo Gattoni, l’auteur de l’affiche, avance lui un parti pris artistique général. L'œuvre qui a nécessité 2000 heures de travail est un dessin surréaliste, une représentation foisonnante et poétique d'un Paris allégorique vu du ciel, qui regorge de milliers de petits détails, à l'image de ce que l'on trouve dans les livres pour enfants du style "Où est Charlie". Rien n'est réaliste: la tour Eiffel est rose, le métro passe sous l'Arc de Triomphe, la vraisemblance géographique n'est absolument pas respectée.

"J'évoque les objets et bâtiments tels qu'ils m’apparaissent à l'esprit et sans arrière-pensées", plaide Ugo Gattoni. Pas de censure woke donc, comme certains veulent le penser, mais un choix artistique qui met en avant le fait-main et l'imagination à l'ère de l’intelligence artificielle.

Une règle figurant dans la charte olympique

Sans compter que l'absence de tout signe religieux, en l'occurrence de la croix chrétienne au sommet des Invalides, n'est pas tout à fait un choix, mais une règle. En effet, écrite par Pierre de Coubertin aux environs de 1898, la charte olympique - document qui régit l’organisation, les actions et le fonctionnement du Mouvement olympique et fixe les conditions de la célébration des Jeux Olympiques -, stipule qu' "aucune sorte de démonstration ou de propagande politique, religieuse ou raciale n'est autorisée dans un lieu, site ou autre emplacement olympique" (article 50).

Et concernant l'absence du drapeau national, là aussi, la droite semble avoir mal regardé. Certes, aucun étendard tricolore n'est visible au premier plan. Toutefois, à y regarder de plus près, il est en fait bel et bien présent, de manière quelque peu détournée, au travers par exemple de cocardes dissimulées çà et là, ou encore sur les chaussures d'une mascotte dessinée, comme l'a notamment constaté l'émission française Quotidien.

Fabien Grenon