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L'opposant russe Alexeï Navalny condamné à 19 ans de prison supplémentaires

L’opposant russe Alexeï Navalny condamné à 19 ans de prison supplémentaires pour «extrémisme»
L’opposant russe Alexeï Navalny condamné à 19 ans de prison supplémentaires pour "extrémisme" / Forum / 2 min. / le 4 août 2023
Le principal opposant russe Alexeï Navalny, déjà emprisonné, a été condamné vendredi à 19 années de prison supplémentaires pour "extrémisme", une peine qu'il devra purger dans une nouvelle colonie pénitentiaire aux conditions particulièrement difficiles.

"Alexeï Navalny a écopé de 19 ans de régime spécial", soit une réclusion dans l'un des établissements les plus rudes du système carcéral russe, a indiqué sur X (ex-Twitter) sa porte-parole Kira Iarmych. Ces prisons sont d'ordinaire destinées aux criminels les plus dangereux et aux condamnés à perpétuité.

Au 18e mois de l'assaut contre l'Ukraine, la Russie est confrontée à une vague de répression visant tant les opposants d'envergure, emprisonnés ou poussés à l'exil, que des milliers de Russes ordinaires ayant critiqué l'offensive. Dans cette nouvelle affaire, le Parquet avait requis 20 ans d'emprisonnement pour Alexeï Navalny, opposant de longue date à Vladimir Poutine.

>> Lire aussi : Vingt ans de prison requis contre l'opposant Alexeï Navalny

Audiences à huis clos

Les audiences se sont déroulés à huis clos dans la colonie pénitentiaire IK-6 à Melekhovo, 250 kilomètres à l'est de Moscou, où le militant anticorruption de 47 ans est détenu depuis juin 2022 après avoir écopé de neuf ans de prison pour "fraude", autre affaire qu'il dénonce comme étant une vengeance politique.

Détracteur de longue date du président russe, Alexeï Navalny a vu la justice s'acharner sur lui avant le conflit en Ukraine mais son sort s'est aggravé depuis. Il avait été emprisonné à son retour en Russie, début 2021, après avoir survécu in extremis à un empoisonnement qu'il impute aux services de sécurité russes ayant agi sur ordre du Kremlin, puis il a été condamné à désormais trois reprises.

Alexeï Navalny, régulièrement placé à l'isolement et confronté à des problèmes de santé, avait dit jeudi s'attendre à une "peine longue, stalinienne". Sa condamnation "est un sinistre acte de vengeance politique qui ne vise pas seulement Navalny personnellement mais qui sert d'avertissement aux détracteurs de l'Etat dans tout le pays", a réagi dans un communiqué l'ONG Amnesty International.

Opposant à la guerre en Ukraine

De sa prison, l'opposant s'est mué aussi en critique féroce du conflit en Ukraine. Pendant son procès, il a ainsi dénoncé les "dizaines de milliers de morts dans la guerre la plus stupide et la plus insensée du XXIe siècle". Le Kremlin présente l'opposant en simple criminel, assurant que les poursuites à son encontre n'ont rien de politique.

Toujours combatif, Alexeï Navalny raconte sur les réseaux sociaux, par le biais des messages transmis par ses avocats, sa vie carcérale et dénonce, souvent avec ironie, le harcèlement qu'il y subit.

Il a ainsi été envoyé 17 fois en cellule disciplinaire, où on l'oblige à écouter des discours de Vladimir Poutine. C'est d'ailleurs dans une de ces cellules qu'il a attendu son verdict, puni par treize jours d'isolement pour s'être "mal présenté" à ses gardiens, a expliqué fin juillet son avocat Vadim Kobzev sur X (ex-Twitter).

Le marathon judiciaire d'Alexeï Navalny risque aussi de ne pas s'arrêter là. Il dit être également poursuivi pour une affaire de "terrorisme" dans une autre procédure, dont peu de détails sont pour le moment connus.

>> Réécouter dans Forum l'interview d'Olga Prokopieva, porte-parole de l’ONG Russie-Libertés :

Les opposants russes emprisonnés tombent-ils dans l’oubli? Interview d’Olga Prokopieva
Les opposants russes emprisonnés tombent-ils dans l’oubli? Interview d’Olga Prokopieva / Forum / 6 min. / le 4 août 2023

afp/mera

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Condamnations unanimes du côté de l'Occident

L'Union européenne a jugé "inacceptable" la condamnation vendredi de l'opposant russe Alexeï Navalny à 19 années de prison supplémentaires, dénonçant un verdict "aux motivations politiques" et appelant de nouveau à sa libération "immédiate et inconditionnelle".

A l'issue d'un "procès truqué", "cette condamnation arbitraire est une réponse à son courage de critiquer le régime du Kremlin", a déclaré le président du Conseil européen, Charles Michel, sur X (ex-Twitter).

Du côté des Etats membres de l'UE, la cheffe de la diplomatie allemande, Annalena Baerbock, a dénoncé une "injustice flagrante". La France a condamné cette peine "avec la plus grande vigueur".

Un "harcèlement judiciaire", selon l'ONU

L'ONU a demandé vendredi la "libération immédiate" de l'opposant russe Alexeï Navalny. Cette condamnation "suscite de nouvelles inquiétudes concernant le harcèlement judiciaire et l'instrumentalisation du système judiciaire à des fins politiques en Russie", a dénoncé le Haut-Commissaire aux droits de l'homme, dans un communiqué.

Les Etats "ont l'obligation" de respecter "l'ensemble des droits à un procès équitable et à une procédure régulière pour tous les individus privés de liberté", a rappelé Volker Türk.