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Confinement, frontières fermées ou dépistage massif, aperçu des mesures contre le Covid-19 dans le monde

Graphique: aperçu des mesures contre le COVID-19 prises dans une sélection de pays dont la Suisse. Photo (Keystone): la gare de Zurich quasi-déserte. [Keystone]
Graphique: aperçu des mesures contre le COVID-19 prises dans une sélection de pays dont la Suisse. Photo (Keystone): la gare de Zurich quasi-déserte. - [Keystone]
De nombreux Etats imposent désormais à leur population des restrictions pour limiter la propagation du Covid-19, mais les mesures varient dans leur forme, leur intensité et le moment où elles ont été adoptées. Aperçu dans une sélection de pays.

En matière de lutte contre les épidémies, la fermeture des écoles (crèches, universités, etc.), les restrictions sur les rassemblements et les déplacements de la population ou encore l'instauration de cordons sanitaires sont les mesures traditionnelles que peuvent adopter les pouvoirs publics.

La pandémie de Covid-19 a entraîné une forme de réponse plus radicale encore, inspirée par le succès affiché des autorités chinoises dans la province de Hubei: le confinement total, soit "l'extension des cordons sanitaires à des régions aussi grandes que des pays", résume Antoine Flahault, directeur de l'Institut de santé globale à l'Université de Genève. D'après ce spécialiste, "c'est une première".

A Wuhan, berceau de la pandémie, le confinement extrêmement strict de la population a été prononcé le 23 janvier, deux mois après l'apparition de la maladie, alors que près de 450 cas et 17 victimes avaient été recensés.

La progression du virus a commencé à ralentir significativement aux alentours de la mi-février, près de 4 semaines après l'introduction de cette sévère mise en quarantaine. D'après les chiffres communiqués par Pékin, la courbe est stabilisée depuis début mars, près de 6 semaines plus tard.

Aujourd'hui en Europe, des mesures de confinement total sont en vigueur en Italie, en Espagne et en France. L'Italie les a décidées le 9 mars, alors qu'elle dénombrait plus de 9000 cas et 460 décès; l'Espagne le 14 mars (6400 cas et 200 morts); la France le 16 mars (6600 cas et 150 morts).

Plusieurs autres pays européens ont opté pour un semi-confinement ou des restrictions sociales strictes. Les populations sont invitées à rester chez elles sauf déplacements indispensables, les rassemblements sont interdits et la plupart des lieux non essentiels fermés.

C'est le cas par exemple en Allemagne, au Royaume-Uni ou en Suisse. Ici, la mesure a été instaurée le 16 mars alors que le pays comptait 2300 cas confirmés et une vingtaine de décès. Le Conseil fédéral a écarté la piste du confinement total, estimant que les nouvelles règles étaient déjà bien assez restrictives.

Aux Etats-Unis, pays qui recense de loin le plus grand nombre de cas confirmés (environ 188'000 près de 4000 morts à ce jour), Donald Trump s'en est tenu à des recommandations de distanciation sociale mais de nombreux Etats appliquent des règles strictes.

Les mesures italiennes parmi les plus strictes

La semaine passée, l'Université d'Oxford a partagé avec le public un outil qui évalue le niveau de sévérité des mesures contre le COVID-19 dans une septantaine de pays - mais ne se prononce pas sur leur pertinence ou leur efficacité.

L'institution a établi un indice simple appelé "stringency index" ("index de rigueur") tenant compte de 7 types de mesures: fermetures d'écoles, fermetures de lieux de travail, annulations d'événements publics, arrêt des transports publics, existence de campagnes publiques d'information, restrictions de déplacements à l'intérieur du pays et contrôles des voyages internationaux.

Il regarde également si les mesures existantes sont des obligations ou des recommandations, et si elles sont générales ou ciblées/localisées. En résumé, pour obtenir le score de 100, un pays devrait avoir adopté au moins une mesure imposée à l'intégralité de la population dans chacune des 7 catégories (la méthode de calcul est expliquée ici).

D'après cet indicateur, l'Italie se situe aujourd'hui quasiment tout en haut du classement (95/100); la Suisse et l'Espagne affichent un indice de 90; malgré ses mesures de confinement, la France se situe légèrement en dessous (86) car les transports publics circulent toujours sans restriction.

L'Allemagne, le Royaume-Uni et l'Iran sont à 71, les Etats-Unis à 67 (les mesures qui existent sont localisées) et le Japon à 62 (seules des recommandations ont été émises mais pas d'obligation).

Corée du Sud et Taïwan pas les plus sévères

Souvent cités en exemple dans leur gestion de cette crise sanitaire, la Corée du Sud et Taïwan n'affichent pas des indices de rigueur très élevés, respectivement 74 et 48.

La Corée du Sud se distingue entre autres dans sa réponse à la pandémie par sa "politique de frontières ouvertes". A l'exception des vols en provenance de la province chinoise la plus touchée, Séoul s'est jusqu'à présent refusé à prononcer des interdictions d'entrée sur le territoire ou de fermer, ne serait-ce que partiellement, ses frontières. Un dépistage massif et des quarantaines préventives à l'entrée sur le territoire ont été privilégiés.

Touchée par l'épidémie dès le mois de janvier, la Corée du Sud est à ce stade l'un des pays qui a le mieux contenu la propagation du virus et maintenu la mortalité à un niveau très faible. Le gouvernement sud-coréen reste toutefois sur ses gardes, et s'est résolu le 22 mars à adopter des mesures de distanciation sociale généralisées.

Pour sa part Taïwan ne totalise actuellement que 320 cas de coronavirus et 5 décès. Cette île située à 160 kilomètres des côtes chinoises a privilégié des restrictions ciblées mais a, à l'inverse, pris très tôt des mesures strictes de contrôle des entrées sur son territoire.

Point commun entre les deux pays: une réponse précoce. Taipei comme Séoul ont pris leurs premières décisions dès que la Chine a révélé l'existence de cas début janvier.

>> Lire : Ces Etats asiatiques qui ont réussi à juguler l'avancée du coronavirus

Près de 60'000 décès pourraient avoir été évités en Europe

Il faudra plus de temps et de recul pour tirer des conclusions sur l'efficacité globale de la réponse apportée par la plupart des pays évoqués ici. Les spécialistes soulignent qu'ils faut compter au moins deux à trois semaines entre le moment où des mesures agissant sur la transmission du virus sont prises et celui où leur impact sur la mortalité commence à être observable.

Toutefois la croissance de l'épidémie semble montrer des signes de ralentissement dans certains pays dont la Suisse:

>> Lire : Cas positifs, décès, hospitalisations: la progression du virus ralentit en Suisse

Une étude de l'Imperial College parue lundi et portant sur 11 pays européens articule pour sa part un premier chiffre: elle estime que les diverses "interventions non pharmaceutiques" auront permis d'éviter 59'000 décès jusqu'au 31 mars et que "de nombreux décès supplémentaires seront évités si l'on veille à ce que les mesures restent en place jusqu'à ce que la transmission tombe à de faibles niveaux".

Pauline Turuban

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