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Le lanceur d’alerte des Football Leaks encourt jusqu’à 25 ans de prison

Rui Pinto, Février 2019, Budapest.
Le lanceur d’alerte des Football Leaks encourt jusqu’à 25 ans de prison / Le Journal horaire / 32 sec. / le 17 janvier 2020
Rui Pinto, le lanceur d’alerte des Footballs Leaks toujours détenu dans une prison de Lisbonne, sera jugé pour extorsion. La juge Claudia Pina l’a annoncé vendredi, 93 chefs d’accusation ont été retenus contre lui, une décision inédite au Portugal.
Football Leaks, une enquête du consortium European Investigative Collaborations. [RTS]
Football Leaks, une enquête du consortium European Investigative Collaborations. [RTS]

Après une très brève audience, la décision du tribunal de Lisbonne est tombée en fin d’après-midi. Le lanceur d'alerte des Football Leaks, en détention provisoire depuis 10 mois, sera poursuivi pour tentative d’extorsion, sabotage technologique, 6 accès illégitimes, 68 accès impropres et 17 violations de mails, soit 93 chefs d’accusations, contre les 147 demandés en septembre dernier par le Ministère public.

Une décision qui ne satisfait qu’à moitié l’avocat de Rui Pinto. "La juge n’a pas totalement expliqué les fondements légaux de sa décision, mais cela correspond pour la plupart à ce que nous avions plaidé lors de la pré-audience", a déclaré Me Francisco Teixeira Da Mota.

Pour rappel, Rui Pinto, 31 ans, a fourni au réseau de journalistes d'investigation, European Investigative Collaborations (EIC), 3,4 téraoctets de données. Grâce à ces documents, l'EIC a publié plus de 1000 articles dénoncant des violations des règles du football. La justice portugaise lui reproche d’avoir accédé de manière illégale aux boîtes mails de nombreux grands clubs et cabinets d’avocats européens. Il aurait aussi accédé à celles de Doyen Sports Investments, de l’Association portugaise de football et du procureur général. Des tentatives d’intrusions informatiques que le lanceur d’alerte a toujours contestées, mais qui pourraient aujourd’hui lui coûter très cher.

"Pas un lanceur d'alerte"

Rien que pour les piratages, Rui Pinto risque 30 ans de prison.  En théorie, car pour chaque accès jugé illégitime, la peine peut aller jusqu’à 5 ans d’emprisonnement. Idem pour les "accès indus", le jeune Portugais encourt à chaque fois un an de prison supplémentaire et jusqu’à 5 ans s’il est prouvé qu’il a eu accès à des secrets commerciaux, ou 2 ans s’il est prouvé qu’il a eu accès à des données personnelles ou s’il a tiré un quelconque avantage économique de ces données.

Lors de cette audience, la juge a pris quelques minutes pour expliquer pourquoi elle ne considère pas Rui Pinto comme un lanceur d’alerte. "Un lanceur d’alerte est de bonne foi et comprend que l’intérêt du public est au-dessus de ses intérêts personnels", a déclaré Claudia Pina. Sofia Ribeiro Branco, l’avocate de Doyen Sport, s’est refusée à tout commentaire.

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La date du procès de Rui Pinto n’a toujours pas été fixée mais une chose est sûre: il devra rester en prison en attendant. La justice a maintenant dix mois pour se prononcer, jusqu’au 22 septembre 2020, faute de quoi Rui Pinto devra être libéré.

Cécile Tran-Tien/Dimitri Zufferey/kkub

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