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«Apollo 11, le rêve de l'homme moderne réalisé»

Claude Nicollier a vécu le 20 juillet l'une des nuits les plus extraordinaires de sa vie.
Claude Nicollier a vécu le 20 juillet l'une des nuits les plus extraordinaires de sa vie.
Claude Nicollier, 65 ans, est le 1er et unique astronaute suisse à ce jour. L'astrophysicien veveysan a effectué 4 missions spatiales à bord de 4 navettes différentes entre 1992 et 1999. Il se souvient avec émotion et respect du 21 juillet 1969, le jour où l'homme a marché sur la Lune.

TSR: Comment avez-vous vécu ce
moment historique du premier pas sur la Lune?




Claude Nicollier: j'avais 25 ans. Nous étions
chez une tante à La Tour-de-Peilz. Nous avions passé toute la nuit
devant une télévision noir et blanc. C'était un moment magique,
l'une des nuits les plus extraordinaires de ma vie, essentiellement
en raison du sens historique de l'événement. Du fait que ce moment
ait lieu, sous nos yeux.... En outre, j'étais déjà pilote militaire
et j'avais suivi toutes les missions qui avaient précédé Apollo 11.
Je me souviens d'Apollo 8 en décembre 1968, qui avait réalisé une
performance similaire, avec l'alunissage en moins! Cette mission
m'avait déjà fortement impressionné. Mais Apollo 11 était
l'aboutissement. C'était la réalisation d'un rêve, celui de l'homme
moderne. Fascinant!

C'est aussi fou
qu'avec les moyens de l'époque on ait réussi pareil
exploit..
.



Effectivement. C'était un exploit fabuleux car à cette époque les
communications n'étaient pas ce qu'elles sont aujourd'hui. Or, on
arrivait, depuis les postes de télévision du monde entier à avoir
des images de l'événement en temps réel ! Je me rappelle que, lors
d'une mission ultérieure, les astronautes avaient aussi installé
une caméra pour filmer le départ de l'étage supérieur du module
lunaire. Les téléspectateurs avaient ainsi pu voir en direct le
moment où les astronautes ont quitté la surface de la Lune. C'était
fou ! Il y a eu un talent et un savoir-faire technique absolument
extraordinaires.

Etait-ce
vraiment un grand bond pour l'humanité, comme le disait Neil
Armstrong
?



Cet événement a tout d'abord changé les relations entre les USA et
l'URSS. Car le programme Apollo n'avait pas de but commercial ou
scientifique. Il était uniquement politique et destiné à battre les
Russes dans le domaine spatial. Marcher sur la Lune a donc été le
premier clou planté dans le cercueil de l'URSS. Par ailleurs, il a
fallu développer, dans le cadre du programme Apollo, d'importantes
techniques au niveau des télécommunications, des systèmes de
navigation et de propulsion. Cela a permis à la technologie
spatiale d'effectuer un grand bond. Et lorsque la technologie
spatiale avance, la technologie en général progresse. En effet, cet
environnement est si difficile et pointu, que ce qui est développé
pour le spatial stimule le développement d'applications sur Terre.
Par exemple pour tout ce qui est miniaturisation ou fiabilité des
systèmes.


Auriez-vous pu aller dans l'espace sans le programme
Apollo?




Difficile de refaire l'histoire. Sans doute que oui. Cela dit, de
nombreuses techniques utilisées dans les navettes sont dérivées
d'Apollo. Tels le système des interrupteurs, les systèmes de
navigation, de contrôle de l'orientation, les propulseurs... Ce
programme était formidablement ambitieux. Rendez-vous compte: entre
le fameux discours en mai 61 de Kennedy pour annoncer que l'Homme
marcherait sur la Lune et le moment où cela s'est produit, il ne
s'est passé que 8 ans! Mais c'est parce que c'est difficile, voire
impossible, que l'on découvre des moyens novateurs pour résoudre
les problèmes. Et Apollo a permis de rassembler l'énergie et le
talent d'une nation.

Comment expliquez-vous que depuis 1972, plus
personne n'y soit retourné?




L'objectif unique d'Apollo était de battre les Russes en allant
sur la Lune. La mission était donc accomplie dès Apollo 11. Les
Américains ont continué d'envoyer des hommes en mission jusqu'à
Apollo 17 pour des raisons d'exploitations technique et
scientifique. Mais il n'y avait aucune raison de penser que les USA
continueraient de faire des voyages réguliers vers la Lune.
D'autant que cela coûtait très cher. En outre, il y avait tellement
de possibilités d'exploiter les propriétés de l'orbite terrestre
basse, grâce au télescope Hubble ou la Station spatiale
internationale (ISS) par exemple, qu'il n'y avait plus besoin de la
Lune pour poursuivre un programme spatial intéressant et
productif.

Aujourd'hui la Lune
redevient un lieu de convoitise. Les USA, mais aussi des pays comme
la Chine, l'Inde voire le Japon veulent lancer des vols habités
vers la Lune avec mars en point de mire. Rivalités politiques entre
pays ou réel intérêt scientifique
?



La Lune est intéressante en raison de l'exploitation possible de
certains minéraux. Mais elle est surtout une station spatiale
naturelle, sur laquelle on pourrait installer des laboratoires, des
télescopes. Cette idée a toujours été présente. L'étape suivante,
c'est l'exploration habitée de la planète Mars, un objectif
réalisable d'ici une trentaine d'années, je pense. Mais c'est
beaucoup plus difficile d'y arriver. En effet, si on met 3 jours
pour aller jusqu'à la Lune, il faut 8 mois pour atteindre Mars.
Ensuite, il faut compter 1 an pour y séjourner et 8 mois pour le
retour.

Trois ans de voyage dans l'espace, est-ce
humainement réalisable?




Ce n'est pas un immense problème. Les astronautes restent
aujourd'hui déjà 6 mois dans l'ISS sans trop de difficultés. C'est
un peu moins que la durée du voyage aller ou retour. Le reste de la
mission sera dans un environnement à 1-3 de la gravité terrestre,
plutôt agréable... Il s'agit là d'une aventure tellement
extraordinaire que cela permet psychologiquement de tenir le coup!
Pour moi, il s'agit d'une mission de rêve pour un astronaute.



Certains prétendent que l'on n'a jamais mis le pied
sur la Lune et que les images ont été montées de toutes pièces par
la Nasa voire Hollywood. Votre avis?




Le doute est sain. Mais continuer à douter quand il y a une
évidence est puéril. Le plus grand challenge du programme Apollo a
été la fusée Saturn V. Et personne n'a remis en cause son
existence. Certes, personne n'a jamais revu les traces laissées par
les astronautes sur la Lune, ni les modules lunaires, etc. Par
contre, des instruments ont été laissés sur place, tels des
réflecteurs lasers qui, lorsque qu'on pointe un laser dans leur
direction, provoquent un retour. Mais ce n'est pas une preuve. Je
ne peux donc pas apporter de preuves totalement irréfutables. Mais
il y a un ensemble d'éléments qui font que j'y crois à 200%. Car si
l'on connaît un peu le programme spatial en général, on arrive à la
conclusion que c'était un programme difficile mais faisable.

L'exploration spatiale coûte très cher. N'est-ce pas
indécent de consacrer autant d'argent à ce domaine alors que la
crise sévit comme jamais?




On imagine souvent que l'argent destiné au spatial est de l'argent
qui s'évapore. Mais il est utilisé pour donner du travail à des
ingénieurs, des techniciens, du personnel. Ainsi, les 140 millions
de francs que la Suisse consacre chaque année au budget de l'Agence
Spatiale Européenne reviennent en grande partie sous forme de
contrats industriels qui font travailler de nombreux Suisses et
Suissesses. Le spatial permet en outre de réaliser des travaux dans
le domaine de la haute technologie qui ont ensuite des retombées
positives pour toute l'humanité.

La Lune, c'est la
banlieue de la Terre.

Claude Nicollier,
astronaute

Rêvez-vous parfois en
contemplant la Lune
?



Oh oui. C'est un bel astre, romantique et esthétique. Mais je la
vois aussi comme un corps céleste dont je me rappelle l'histoire,
sa formation il y a 4 milliards d'année suite à l'impact d'un gros
objet sur la Terre. Et puis, elle a un côté très familier. C'est la
banlieue de la Terre, elle est à nous. Quand on la voit par ciel
clair, ou depuis l'orbite terrestre, on croit passer tout près
d'elle, on peut presque la toucher avec la main!



Regrettez-vous de n'y être jamais
allé
?



Oui. Evidemment, pour un astronaute, poser le pied sur un autre
corps céleste que la Terre, c'est quelque chose d'incroyable que
j'aurais aimé faire. Mais il y a un tas d'autres objectifs fabuleux
dans le système solaire. J'aurais aussi adoré aller sur un
satellite de Saturne, ou sur le noyau d'une comète...

Vous avez
bientôt 65 ans, l'heure de la retraite. Or vous donnez toujours des
cours à l'EPFL et l'EPFZ et vous avez pris de nouvelles
responsabilités en dirigeant les essais en vols de l'avion Solar
Impulse. Ne vous arrêterez-vous jamais
?



Cela ne figure pas pour l'instant dans mes plans! J'ai accepté
l'aventure Solar Impulse car je partage tout simplement le noble
objectif de Bertrand Piccard et d'André Borschberg de faire le tour
du monde en avion sans carburant. Mais mon intérêt personnel réside
en l'avion lui-même. C'est une machine volante vraiment
intéressante et j'ai toujours été fasciné par tout ce qui vole,
vite ou lentement, haut ou bas.... J'ai eu le privilège de voler à
bord de l'un des engins les plus rapides jamais réalisés par
l'homme : la navette spatiale, et suis impliqué dans un programme
d'un avion particulièrement lent: Solar Impulse, mais avec la même
passion...



Propos recueillis par Christine Talos

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Il y a 40 ans, l'homme marchait sur la Lune

Le 20 juillet 1969, l'Américain Neil Armstrong devenait le premier homme à poser le pied sur la Lune, réalisant l'un des plus vieux rêves de l'humanité. Les Etats-Unis s'imposaient dans la conquête naissante de l'espace qui les opposait à l'Union soviétique.

Armstrong a saisi l'ampleur historique de l'événement, vécu en direct par des centaines de millions de téléspectateurs dans le monde, avec sa phrase légendaire: «C'est un petit pas pour l'homme mais un bond de géant pour l'humanité».

L'aventure du programme Apollo, qui a permis à douze astronautes de poser le pied sur la Lune lors de six missions, entre 1969 et 1972, avait commencé huit ans plus tôt avec l'annonce du président John F. Kennedy, en mai 1961, «de mettre un Américain sur la Lune avant la fin de la décennie».

Une décision avant tout politique. La Guerre froide battait alors son plein et l'Union soviétique devançait les Etats-Unis dans la course spatiale après la mise en orbite en 1957 du premier satellite, Spoutnik, suivi en 1961 du premier homme dans l'espace Youri Gagarine.

Forts de leur prospérité et de leurs capacités scientifiques et technologiques, les Etats-Unis mettent rapidement en route le programme Apollo, estimé à 25 milliards de dollars en 1969, équivalant aujourd'hui à environ 115 milliards ou six fois et demie le budget annuel actuel de la Nasa.

Mais Apollo connaît des revers. En 1967 un accident au sol coûte la vie à trois astronautes. La première mission importante a lieu en décembre 1968 avec Apollo 8 qui marque le premier vol habité autour de la Lune.

Le 16 juillet 1969, Neil Armstrong, Buzz Aldrin et Mike Collins, s'installent dans le module de commande Columbia du vaisseau Apollo 11 juché au sommet de la fusée Saturn V. L'énorme fusée de 111 mètres de haut s'arrache du pas de tir du Centre spatial Kennedy à 15h32 heure suisse. Quatre jours plus tard, à 22h18 heure suisse, Neil Armstrong pose manuellement et de justesse le module lunaire, baptisé Eagle (l'aigle), dans la Mer de la Tranquillité.

Le 20 juillet, à 04h50 heure suisse, Neil Armstrong sort du module lunaire en empruntant une échelle trop courte et doit faire un petit saut pour atteindre le sol lunaire qu'il touche très exactement à 04h56 et 48 secondes. Vingt minutes plus tard Buzz Aldrin le rejoint. Les deux hommes passeront 21 heures sur la Lune et ramèneront 21 kilos de roches. Ils laisseront un drapeau américain et une plaque d'acier avec un message de paix.

Le module décollera ensuite pour rejoindre en orbite lunaire le module Columbia dans lequel les attend Michael Collins, avant de rentrer sur Terre. Leur capsule amerrit dans l'océan Pacifique le 24 juillet.

40 ans après, certains refusent toujours d'y croire

Quarante ans après les premiers pas de Neil Armstrong sur la Lune, certains croient toujours dur comme fer que le "bond de géant pour l'humanité" a eu lieu sur un plateau de cinéma quelque part dans l'Arizona.

Ces incrédules continuent de penser que la Nasa mis en scène l'alunissage le 20 juillet 1969 afin de distraire les Américains lassés de la guerre du Vietnam ou afin de leur faire croire qu'ils avaient battu les Russes dans la course à la conquête spatiale. Ou bien encore parce que reproduire un alunissage dans des studios de cinéma se serait révélé bien moins coûteux et risqué que d'envoyer vraiment des hommes sur la Lune.

Ils mettent en avant des arguments, tel que celui de dire que les astronautes n'auraient pas survécu aux radiations qu'ils auraient reçues lors de leur voyage vers l'astre, afin de soutenir l'idée qu'un alunissage était impossible.

La plupart de ces personnes ont basculé dans le royaume de l'incrédulité après avoir vu les images des premiers pas sur la Lune de Neil Armstrong et Buzz Aldrin, a expliqué l'astronome Phil Plait lors du programme radiophonique "Are we Alone" du SETI, l'Institut de recherche d'une vie intelligente extraterrestre, une organisation à but non-lucratif.

La première chose qu'ils ont remarqué dans ces images c'est l'absence d'étoiles dans le ciel. "Il n'y a pas d'atmosphère sur la Lune, donc on s'attend à ce que les étoiles brillent encore plus", a-t-il dit. Toutefois, même les photos du ciel la nuit prises depuis la Terre ne montrent pas les étoiles, à moins qu'elles soient prises avec une ouverture de plusieurs secondes, a indiqué l'astronome. Avec l'ouverture avec laquelle les astronautes ont pris leurs photos, "on ne voit tout simplement pas les étoiles, que l'on se trouve sur Terre ou sur la Lune", a-t-il assuré.

Les incrédules font aussi remarquer que les images vidéo du drapeau américain planté sur le satellite en 1969 montre que ce dernier flotte, alors qu'il n'y a pas d'air sur la Lune. Ils contestent également les ombres que l'on voit sur les photographies rapportées de l'expédition. Autant d'arguments balayés par les scientifiques.

Ces sceptiques sont restés silencieux pendant de nombreuses années, jusqu'à la diffusion sur la chaîne Fox en 2001 d'une émission intitulée "Théorie du complot: avons-nous été sur la Lune?" Ceux qui nient ces premiers pas sur le sol lunaire vont probablement se taire à nouveau lorsque les Etats-Unis y retourneront, mais vont-ils disparaître à tout jamais?

Probablement non, estime Seth Shostak, qui avait conduit l'émission diffusée sur la chaîne Fox en 2001. "Nous allons retourner sur la Lune et retrouver tout le matériel que nous y avions laissé et prendre des photos et dire 'Regardez! Leurs empreintes de pas!'", a-t-il dit. "Et les gens qui aiment à penser que les Etats-Unis n'ont rien d'autre à faire que de faire croire à un alunissage qui ne se serait jamais produit diront 'Vous avez falsifié cela aussi!'", a-t-il ironisé.