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"Pour sauver ses emplois, l'industrie suisse doit se moderniser"

Rolf Soiron. [Keystone - Georgios Kefalas]
Rolf Soiron, président du conseil d'administration de Lonza / L'invité de la rédaction / 22 min. / le 10 février 2016
Taux de chômage en hausse, Bourse suisse en dégringolade, rachat d'industries par la Chine: face à cette conjoncture morose, Rolf Soiron, président du conseil d'administration de Lonza, préconise plus de modernisme.

Le taux de chômage est passé à 3,8% en janvier, une augmentation de 0,1% par rapport à décembre. Si la situation de l'emploi reste enviable en comparaison internationale, la tendance à une lente dégradation du marché du travail est bien là.

>> Relire l'article publié mardi : Le taux de chômage en Suisse est monté à 3,8% en janvier

Pour Rolf Soiron, président du conseil d'administration de Lonza et invité du Journal du matin, cette tendance est logique et était attendue depuis que la BNS a changé ses taux, en janvier 2015. "Les chefs d'industrie avaient alerté que la situation deviendrait difficile. Voilà, nous y sommes", lance le Bâlois.

Au contraire de Johann Schneider-Ammann qui soutenait, il y a peu, que la plupart des industries ne pourront pas tenir plus de deux ans avec un franc aussi fort, Rolf Soiron se garde de tout pessimisme: "Il est vrai que les petites industries qui approvisionnent les grandes entreprises d'exportation doivent trouver des stratégies pour s'adapter à la situation." Mais des effets saisonniers ou une meilleure conjoncture sur les marchés mondiaux pourrait aussi se refléter sur le marché intérieur.

Les industries du passé vouées à disparaître

Pour survivre et ainsi sauver ses emplois, l'industrie doit se moderniser et se spécialiser, souligne Rolf Soiron. L'industrie des machines, qu'il cite en exemple, a un avenir, mais sa façon de produire est probablement "dépassée".

"Les entreprises suisses ne peuvent pas mener une stratégie concurrentielle qui se base sur les prix. C'est la spécialisation des produits eux-mêmes et les progrès en termes de productivité qui devront être notre recette."

Investisseurs "coupables"

Dans ce contexte, le président du conseil d'administration de Lonza s'interroge sur les bienfaits du rachat des entreprises locales par des grands groupes chinois, à l'instar du rachat de Syngenta par ChemChina la semaine dernière. Selon lui, le risque d'une fuite du savoir-faire est inévitable.

>> A relire : ChemChina rachète Syngenta pour 43,8 milliards de francs

A la question de savoir comment les autorités fédérales devraient protéger les entreprises, Rolf Soiron répond que le gouvernement n'est pas responsable. "Ce sont les investisseurs les coupables."

"La vision à court terme de beaucoup de nos investisseurs, qui n'ont plus aucun lien direct avec les entreprises, nous empêche de traverser les cycles difficiles." Coupés de tout lien émotionnel, ces investisseurs perdraient patience, selon lui, "alors même qu'ils savent que dans deux ans, le cycle aurait pris une nouvelle direction".

fme

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Les raisons du refus de Lonza au rachat de ChemChina

La SonntagsZeitung révélait dimanche dernier que ChemChina avait tenté d'acquérir Lonza. Son président du conseil d'administration, Rolf Soiron, explique les raisons de son refus:

"Je ne voulais pas courir le risque que la propriété intellectuelle d'une entreprise comme Lonza, avec sa technologie de pointe dans la lutte contre le cancer, se déplace vers la Chine", explique-t-il.

Rolf Soiron avance aussi qu'il n'a jamais obtenu de garantie absolue que ChemChina ne se dirigeraient jamais vers une majorité de l'actionnariat de Lonza.

"En refusant, j'ai froissé certains de nos investisseurs, qui ne suivent pas toujours les mêmes principes que nous", déplore-t-il.