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L'imposition des entreprises entrera en vigueur au 1er janvier

Vue sur le siège mondial de Nestlé à Vevey. [Keystone - Gaëtan Bally]
Les multinationales seront imposées à 15% dès 2024 / La Matinale / 2 min. / le 27 décembre 2023
La réforme de l'imposition minimale des entreprises de l'OCDE et du G20 va entrer en vigueur au 1er janvier, a indiqué le Conseil fédéral juste avant Noël. La Suisse pourra percevoir un impôt complémentaire sur les grandes entreprises dès cette date.

Dès le 1er janvier, les grandes multinationales basées en Suisse devront payer au moins 15% d'impôts sur le bénéfice, un impôt mondial approuvé par 140 pays et validé cet été par le peuple suisse.

De nombreux pays tardent à mettre en oeuvre cet impôt. En effet, deux ans après un élan mondial pour limiter la concurrence fiscale, deux camps se dessinent. Il y a d'un côté ceux qui avancent comme prévu comme l'Union européenne, l'Australie et le Canada. Et ceux qui prennent plus de temps voire qui, comme la Chine ou l'Inde, n'appliqueront pas du tout l'impôt minimal de l'OCDE.

Le Conseil fédéral aurait pu lui aussi retarder l'arrivée de cet impôt, comme le demandaient les commissions parlementaires compétentes. Mais le gouvernement a choisi d'agir rapidement.

>> Lire aussi : Une commission préconise de reporter l'imposition minimale des grandes entreprises

Inquiétudes pour les entreprises implantées en Suisse

Les commissions demandaient de tenir compte du contexte international dans l'intérêt des entreprises implantées en Suisse. Le gouvernement a répliqué que la grande majorité des pays de l'UE, le Royaume-Uni et la Corée du Sud mettent en oeuvre leur réglementation au 1er janvier.

Cet impôt permet d'éviter que la Suisse ne perde du substrat fiscal au profit de l'étranger, a rappelé le Conseil fédéral.

Economiesuisse demandait aussi des compensations pour les entreprises suisses. Il incombe aux collectivités publiques de soutenir l'économie suisse par des mesures ciblées, plaide l'organisation. Avec l'introduction de ce nouvel impôt, la Suisse "fera partie de la minorité d’Etats qui prélèveront le nouvel impôt déjà l’année prochaine", s'inquiète notamment Economiesuise vendredi dans un communiqué.

"L'argent sera restitué aux multinationales"

Les ONG saluent les efforts du Conseil fédéral pour appliquer cette réforme. Mais elles estiment que cela devrait aller plus loin, comme l'explique dans La Matinale Dominik Gross, expert en politique fiscale pour la coalition d'ONG Alliance Sud.

"Nous sommes heureux que le Conseil fédéral n'ait pas cédé aux exigences des associations économiques, qu'il soit resté indépendant et qu'il introduise la réforme de cette manière."

"Par contre, nous estimons que cette introduction reste totalement insuffisante pour construire un meilleur système fiscal global. Le problème de la mise en œuvre suisse est que le Conseil fédéral renonce à imposer les bénéfices de sociétés suisses à l'étranger."

"Par ailleurs, les recettes fiscales que l'on va percevoir avec l'impôt 15% seront compensées à travers des subventions et d'autres instruments fiscaux spéciaux. En fait, cet argent sera restitué aux multinationales!"

>> L'interview de Dominik Gross :

Dominik Gross, Expert en politique fiscale et financière pour AllianceSud. [LinkedIn]LinkedIn
Les multinationales seront imposées à 15% dès 2024: interview de Dominik Gross / La Matinale / 1 min. / le 27 décembre 2023

Taux minimal de 15%

La réforme prévoit un taux minimal de 15% au niveau mondial. Il sera appliqué sur le bénéfice des groupes dont le chiffre d'affaires dépasse 750 millions d'euros. En Suisse, quelques centaines d'entreprises helvétiques et quelques milliers de filiales de groupes étrangers sont concernées. Les entreprises opérant uniquement en Suisse et les PME ne seront pas touchées.

La Suisse met en vigueur cette réforme via un impôt complémentaire national. Ce dernier couvrira la différence entre la charge fiscale actuelle, en dessous de 15% dans une majorité des cantons, et l'impôt minimal. La manne supplémentaire est évaluée entre 1 et 2,5 milliards de francs pour la première année. 75% reviendront dans les caisses des cantons, premiers concernés, et 25% dans celles de la Confédération.

Si un Etat ne joue pas le jeu, des impôts supplémentaires pourront être exigés dans un autre pays qui abrite le siège de l'entreprise concernée. La Suisse a donc tout intérêt à reprendre la révision pour éviter de voir filer de l'argent à l'étranger, selon les partisans. Le peuple avait largement adopté le texte le 18 juin dernier.

Pas de 2e partie de la réforme

Lle Conseil fédéral a annoncé qu'il renonçait pour l'heure à instaurer une deuxième partie de la réforme, portant sur l'impôt complémentaire international. Il entend suivre l'évolution internationale et décider "en temps utile" de son introduction.

Malgré tout, Economiesuisse estime que la réforme est risquée pour la Suisse et son économie. "Le projet de l’OCDE implique d’augmenter la charge fiscale et de neutraliser l’effet des allègements fiscaux acceptés jusqu’ici. Cela réduit l’attractivité fiscale, qui a toujours joué un rôle important pour notre pays", écrit la faîtère.

fgn et asch avec ats

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