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Le dédommagement des exploitants de centrales, une question à plusieurs milliards

La centrale nucléaire de Beznau, dans le canton d'Argovie. [Keystone - Alessandro Della Bella]
Le dédommagement des exploitants de centrales, une question à plusieurs milliards / Le Journal du matin / 2 min. / le 24 octobre 2016
Risque-t-on de devoir verser des milliards de francs de dédommagements aux exploitants de centrales en cas de oui à l'initiative "Sortir du nucléaire", comme l'affirment les opposants au texte? Cette question divise les deux camps.

Accepter le texte pour une sortie programmée du nucléaire pourrait coûter très cher au contribuable, estime le comité interpartis opposé l'initiative "Sortir du nucléaire".

Celui-ci met en garde contre les dédommagements que ne manqueront pas d'exiger les exploitants des centrales nucléaires. Mais la légitimité des ces prétentions divise fortement les deux camps.

Atteinte au droit de propriété

Les centrales nucléaires ont en effet obtenu de la Confédération un permis d'exploitation illimitée et seuls des critères de sécurité pourraient justifier une obligation de fermeture. Un oui du peuple le 27 novembre serait ainsi une atteinte au droit de propriété, selon un avis de droit de l'Office fédéral de la justice.

On parle de plusieurs milliards de francs de dédommagements pour compenser la perte de valeur des entreprises et l'éventuel manque à gagner. Rien que pour Axpo, propriétaire de la centrale de Beznau et actionnaire de Leibstadt et de Gösgen, le chiffre de 1,5 à 2 milliards de francs est avancé.

>> La présentation de l'initiative : Une votation "Pour sortir du nucléaire" en fermant les centrales d'ici à 2029

Un changement des "règles du jeu"

Opposé à l'initiative, le libéral-radical genevois Benoît Genecand justifie le dédommagement des exploitants de centrales en raison d'un changement des "règles du jeu". "Ces entreprises diront qu'elles ne peuvent pas amortir ce qu'elles ont investi, en bonne foi, en écoutant le gouvernement", argumente-t-il.

Les Verts, de leur côté, doutent du bien-fondé de ces prétentions, notamment parce qu'aucune centrale nucléaire suisse n'est rentable. "Je vois mal quelqu'un venir dire: 'vous devez me dédommager parce que je n'aurai plus la possibilité de perdre de l'argent'", affirme Robert Cramer.

Une "course en avant absurde"

Pour le conseiller aux Etats genevois, il s'agit d'ailleurs d'un faux débat car les exploitants ne couvriront jamais les coûts du nucléaire. Il dénonce "une course en avant absurde": les entreprises doivent investir constamment pour continuer d'exploiter les centrales, et ensuite les exploiter plus longtemps encore pour amortir les montants investis.

Selon Robert Cramer, la conséquence est que le contribuable ou le consommateur devra de toute façon, à terme, passer à la caisse pour sortir du nucléaire, que ce soit aujourd'hui ou dans 20 ans.

Stéphane Deleury/dk

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