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Les successeurs potentiels de Micheline Calmy-Rey

Conseil national Berne Parlement fédéral [Pascal Lauener]
L'Assemblée fédérale élira les sept Conseillers fédéraux le 14 décembre prochain. - [Pascal Lauener]
Avec l'annonce du départ de Micheline Calmy-Rey, les prochaines élections du Conseil fédéral, le 14 décembre 2011, s'annoncent mouvementées. Deux favoris socialistes se dégagent de la mêlée.

Le scrutin pour remplacer Micheline Calmy-Rey sera le dernier des sept prévus. Le Parlement devra d'abord se prononcer sur la reconduction des ministres en poste. Dans l'ordre: Doris Leuthard (PDC), Eveline Widmer-Schlumpf (PBD), Ueli Maurer (UDC), Didier Burkhalter (PLR), Simonetta Sommaruga (PS) et Johann Schneider-Ammann (PLR). Les résultats des élections fédérales pèseront de tout leur poids. Des évictions ne sont pas exclues.

Le siège d'Eveline Widmer-Schlumpf est convoité par l'UDC. Si le parti de Christoph Blocher devait ne pas arriver à ses fins, il pourrait ensuite menacer les deux sièges radicaux. Si l'affaire tourne mal, le PS pourrait y laisser des plumes, bien que cette éventualité semble peu vraisemblable.

L'élection du successeur de Micheline Calmy-Rey dépendra sans doutes fortement de ce qui aura précédé.

Deux favoris

Si le siège de Micheline Calmy-Rey devait revenir à un socialiste, le conseiller d'État vaudois Pierre-Yves Maillard et le conseiller aux États fribourgeois Alain Berset sont sans conteste les deux favoris à la succession de la démissionnaire. Le président du PS, Christian Levrat ayant immédiatement annoncé qu'il ne se porterait pas candidat.

Les candidats officiels du parti seront connus au plus tard le 6 décembre. Les candidatures devront venir de Suisse romande ou italienne; le sexe n'a pas d'importance, a annoncé le Parti socialiste. Les aspirants conseillers fédéraux auront jusqu'au 31 octobre, date fixée aux sections cantonales pour annoncer leurs poulains. Le groupe parlementaire socialiste mènera une première discussion le 4 novembre lors d'une séance extraordinaire. Il poursuivra son analyse de la situation les 25 et 26 novembre. Le nombre de candidats sur le ticket sera alors défini.

Le Parlement ne devrait pas se tourner pas vers un Alémanique pour remplacer la Genevoise. Le gouvernement ne compterait en effet plus qu'un Latin (le Neuchâtelois Didier Burkhalter), ce qui passerait pour un affront.

Les chances de voir une femme succéder à Micheline Calmy-Rey semblent en revanche plus maigres, tant les candidatures de poids masculines sont pléthores. Le PS dispose en outre déjà d'une autre conseillère fédérale, Simonetta Sommaruga.

Pierre-Yves Maillard

Pierre-Yves Maillard. [Keystone/Martial Trezzini]
Pierre-Yves Maillard. [Keystone/Martial Trezzini]

Pierre-Yves Maillard, 43 ans, a de l'expérience au niveau fédéral, au Conseil national (1999 à 2004), et peut surtout faire valoir sa solide expérience au sein d'un exécutif cantonal. L'ancien syndicaliste dirige le département de la Santé du canton de Vaud depuis 2004, et occupe la présidence de la Conférence des chefs de départements de la santé. Il s'est profilé comme un ministre pragmatique, tout en étant combatif et volontaire, sur le dossier des assurances maladie notamment.

Le Vaudois ne siège cependant plus à Berne depuis 2004, ce qui pourrait entraver ses chances. Cet ancien syndicaliste a de plus une image de socialiste très à gauche, qui pourrait déplaire à certains parlementaires.

Il a déclaré qu'il déciderait s'il sera candidat, seulement après les élections fédérales du 23 octobre. Il mesurera la possibilité "d'être utile" en fonction du rapport de force qui se dégagera des élections.

Alain Berset

Les Etats, à l'image d'Alain Berset, ont dit oui à la loi sur les banques "too big to fail". [Lukas Lehmann - Keystone]
Copy of Les Etats, à l'image d'Alain Berset, ont dit oui à la loi sur les banques "too big to fail". [Lukas Lehmann - Keystone]

Alain Berset, 39 ans, compte plusieurs atouts dans la course au Conseil fédéral. Le Fribourgeois est très connu sous la Coupole, où il a été élu au conseil des États en 2003, à 31 ans. Il a déjà assumé la présidence du Conseil des États en 2009. Le parlementaire a la réputation d'être très investi dans ses dossiers, et très compétent en matière d'économie. Il est par ailleurs très proche du président du parti socialiste Christian Levrat.

Principal reproche dans l'optique d'une élection, Alain Berset ne dispose d'aucune expérience dans un exécutif, un bon parlementaire ne faisant pas forcément un bon ministre.

D'autres noms circulent

Le nom du conseiller d'État neuchâtelois Jean Studer circule aussi. Il a avoué réfléchir à se lancer dans la course, mais la présence d'un autre Neuchâtelois au Conseil fédéral en la personne de Didier Burkhalter, "est un des paramètres à prendre en considération", selon lui. Ancien conseiller aux États, déjà candidat en 2002 pour succéder à Ruth Dreifuss, Jean Studer s'était alors fait chahuter: le siège qu'il convoitait était destiné à une femme.

Le Tessin pourrait entrer dans la course. Certains évoquent le nom de Marina Carobbio. Mais la conseillère nationale doit encore faire ses preuves.la tessinoise n'exclut pas une candidature. "Mais il est encore trop tôt pour prendre une décision", a-t-elle précisé.

Traditionnellement, les parlementaires fédéraux ont plus de chances d'accéder au Conseil fédéral. Parmi les candidats potentiels siégeant à l'Assemblée fédérale pourrait figurer le conseiller national valaisan Stéphane Rossini, qui s'est dit intéressé. La conseillère aux États vaudoise Géraldine Savary ou

La conseillère aux États genevoise Liliane Maury-Pasquier pourrait également être une candidate.

Cette dernière n'exclut pas la possibilité de se mettre sur les rangs. "La question reste ouverte; il n'y a pas de tabou", a-telle déclaré. Ce n'est pas parce qu'une Genevoise part qu'une autre Genevoise devrait renoncer, a-t-elle ajouté.

Stéphane Rossini, vice-président du Parti socialiste suisse, envisage de se lancer dans la course. Sa section cantonale et lui-même vont se donner le temps d'analyser la situation. "Nous allons discuter et mener une réflexion plus large", a-t-il indiqué. Le parti informera jeudi des modalités devant mener à une décision.

L'absence d'expérience fédérale n'a pas empêché Micheline Calmy-Rey d'être élue. Et le vivier existe dans les gouvernements cantonaux: le Genevois Charles Beer, la Vaudoise Anne-Catherine Lyon ou la Jurassienne Elisabeth Baume-Schneider.

L'UDC dans la course

Mais les socialistes pourraient bien ne pas être seuls sur les rangs. L'UDC compte bien tenter d'obtenir un deuxième siège le 14 décembre et entend aussi s'attaquer aux ministres déjà en poste. Le parti n'a pas dévoilé ses cartes mais plusieurs noms circulent. Le conseiller national fribourgeois, Jean-François Rime, déjà candidat lors des élections de Simonetta Sommaruga et de Johann Schneider-Ammann, avait alors ratissé large sans parvenir toutefois à ses fins. Son collègue vaudois Guy Parmelin pourrait aussi être tenté.

Côté alémanique, les noms du conseiller d'État thurgovien Roland Eberle, qui s'était déjà présenté pour succéder à Samuel Schmid, ainsi que du chef de groupe parlementaire Caspar Baader sont aussi cités. Certains entrevoient aussi la possibilité que l'UDC tente un coup de force en relançant Christoph Blocher.

Et les Verts

Les Verts souhaitent aussi se lancer dans la course. Ils assurent ne pas vouloir s'attaquer au siège socialiste mais visent un fauteuil UDC ou PLR. Leur président Ueli Leuenberger a déjà cité des noms: le président du gouvernement bâlois Guy Morin, la conseillère d'État argovienne Susanne Ochuli ou son collègue bernois Bernhard Pulver, Ruth Genner, membre de l'exécutif de la ville de Zurich ou le conseiller aux États et ex-conseiller d'État genevois Robert Cramer.

ats/ffi

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Composition du futur Conseil fédéral

Le PS conscient des risques

Le PS est conscient des risques posés par le départ de Micheline Calmy-Rey avant le renouvellement intégral du Conseil fédéral. Il ne décidera qu'après les élections fédérales d'octobre s'il soutient Eveline Widmer-Schlumpf. Le PS reconnaît le droit de l'UDC d'obtenir un second siège mais il a de l'estime pour Eveline Widmer-Schlumpf.

Comme ce peut être antinomique, le parti préfère attendre le 23 octobre pour définir sa stratégie. En attendant, il est confiant. Sur les grands dossiers importants, le PS obtient raison plus souvent qu'à son tour, a justifié le président du parti Christian Levrat.

Le parti se réjouit d'être au centre de l'attention. L'annonce assez rapide de Mme Calmy-Rey donne à la population l'occasion de se prononcer sur la représentation du PS au gouvernement dans le cadre d'un débat public. Cette manière "transparente" devrait éviter que l'élection se décide dans les coulisses et les tractations de dernière minute, a assuré le conseiller national fribourgeois.

L'UDC propose un marché au PS

L'UDC profite de l'occasion pour présenter un marché au PS. Lors des élections de décembre prochain, l'UDC soutiendra le droit du PS à un deuxième siège, si le PS de son côté élit deux représentants UDC.

Sinon, le PS "ne peut revendiquer deux mandats gouvernementaux". La question de la concordance se pose à nouveau après l'annonce du départ de Micheline Calmy-Rey. La composition actuelle du gouvernement ne correspond plus aux raports de force actuels, relève l'UDC.

Le PBD pour la continuité

Le Parti bourgeois-démocratique (PBD) ne peut pas exiger de siège au Conseil fédéral d'un point de vue purement arithmétique. Mais son président Hans Grunder estime qu'Eveline Widmer-Schlumpf doit malgré tout être réélue.

"Dans la situation actuelle, la Suisse a besoin de stabilité et de continuité" a expliqué Hans Grunder. Celui-ci faisait allusion à l'exigence de l'UDC d'obtenir un deuxième siège au Conseil fédéral. Selon la tactique adoptée par les autres partis, cela pourrait coûter le fauteuil de Micheline Calmy-Rey au PS.

Il demande donc au PS, qui a contribué à l'élection d'Eveline Widmer-Schlumpf, de renoncer à un quelconque marchandage. A ses yeux, il n'y a aucune raison objective justifiant sa non-réélection.

Le PDC pour deux sièges socialistes

Le président du PDC, Christophe Darbellay, ne remet pas en cause le deuxième siège socialiste au gouvernement après la démission de Micheline Calmy-Rey. Il s'attend à de la stabilité lors de l'élection du Conseil fédéral en décembre prochain.
Personnellement, Christophe Darbellay réélira Eveline Widmer-Schlumpf dont, selon lui, les compétences sont reconnues. Le Valaisan ne veut pas en dire davantage sur le processus d'élection du 14 décembre prochain.
Après les élections fédérales de cet automne, la situation sera certes nouvelle mais au gouvernement fédéral, il s'attend à de la stabilité. Aucun parti ne tirerait avantage à une déstabilisation ou à une attaque frontale.