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Exportation d'armes: la gauche pour une suspension

Ruag Ammotec à Thoune (BE) aurait vendu au Qatar des munitions qui se seraient retrouvées entre les mains des rebelles libyens. [Alessandro della Valle]
Ruag Ammotec à Thoune (BE) aurait vendu au Qatar des munitions qui se seraient retrouvées entre les mains des rebelles libyens. - [Alessandro della Valle]
Des élus de gauche exigent un arrêt des exportations de matériel de guerre, réagissant ainsi aux informations selon lesquelles les rebelles libyens utilisent des munitions fabriquées par Ruag et livrées initialement au Qatar. Dans le camp bourgeois, on parle d'un cas isolé.

Comme l'a révélé mercredi soir la télévision publique alémanique, les rebelles libyens utilisent des munitions fabriquées par Ruag Ammotec à Thoune (BE) (lire: Combats en Libye).

Le Secrétariat d'Etat à l'économie (SECO) avait autorisé en 2009 l'exportation de ces munitions vers le Qatar, mais celui-ci n'a apparemment pas respecté son engagement à ne pas transmettre ce matériel plus loin.

C'est pourquoi le SECO n'autorise actuellement plus de livraisons de matériel de guerre vers ce pays, a indiqué jeudi une porte-parole interrogée par l'ats. Ce cas doit d'abord être éclairci.

Grande demande d'armes

Pour le conseiller national vert Jo Lang (ZG), membre de la commission de la politique de sécurité, la suspension des autorisations ne suffit pas. Il exige un arrêt immédiat des livraisons vers le Qatar, tout le Proche et Moyen-Orient ainsi que vers la région du Maghreb, a-t-il dit à l'ats.

L'élu a déjà déposé en mars une motion en ce sens, que le Conseil fédéral propose de rejeter. "Dans ces régions de conflits, la demande en armes et munitions est tellement forte qu'on ne peut pas savoir si le matériel de guerre ne sera pas revendu plus loin", estime M. Lang. Ce matériel peut en outre aussi être utilisé pour s'attaquer à des mouvements démocratiques.

La conseillère nationale Evi Allemann (PS/BE), également membre de la commission de la politique de sécurité, exige aussi de renoncer à exporter dans les régions en crise, comme elle l'a déjà demandé dans plusieurs interventions parlementaires. Invoquer le fait que les acheteurs n'ont pas le droit de réexporter, ce ne sont "que de jolis mots sur le papier", a-t-elle dit à l'ats, car un contrôle est pratiquement impossible.

La loi fonctionne

Cet exemple de réexportation de munition est "un cas déplaisant isolé", a dit Jakob Büchler (PDC/SG), président de la commission de la politique de sécurité du Conseil national. Ce qui s'est passé n'est pas correct, et il serait donc bien de ne plus autoriser d'exportations vers le Qatar pendant que l'on éclaircit les faits.

"Le feu est maintenant au rouge", estime-t-il. Selon lui, la Suisse dispose d'une législation sévère, qui fonctionne en principe bien. Elle ne doit pas être "passée pardessus bord" à cause de cet incident.

Jakob Büchler ne veut pas entendre parler d'un arrêt général des livraisons. "De toute façon, il est interdit de livrer vers les régions en conflit".

Aucune indication sur l'enquête

Le SECO, de son côté, refuse pour le moment de donner d'autres informations sur ses investigations. Au total, les entreprises suisses d'armement ont livré en 2009 pour 1,85 million de francs de munitions vers le Qatar, selon les statistiques. L'année passée, les sociétés helvétiques y ont vendu pour plus de 500'000 francs d'armes légères.

Le Qatar ne représente qu'une petite partie des exportations suisses de matériel militaire. Le peuple suisse a nettement refusé en votation une interdiction des exportations par 68,5% des voix en novembre 2009. Il s'agissait d'une initiative populaire.

ats/cmen

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