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Fédérales 2011: des financements bien inégaux

En mai, le PLR a dépensé 370'000 francs pour sa campagne, contre 5'700 fr. pour les Verts, soit plus de 60 fois plus. [Martin Ruetschi]
De 15 millions pour l'UDC à 180'000 francs pour Les Verts: les partis n'entrent pas en campagne à armes égales. - [Martin Ruetschi]
Tous les partis préparent la campagne des élections fédérales de 2011: affiches, annonces dans les journaux, sites Internet, autant de projets pour lesquels des millions ont été mis de côté. Mais tous ne partent pas à armes égales.

Alors que le PS a prévu de consacrer 1,5 million de francs pour la campagne électorale, selon les indications de ses responsables, l'UDC devrait engager au minimum dix fois plus, avec 15 millions au minimum. Mais le parti au plus gros budget ne veut rien révéler sur ce qu'il va investir.

L'estimation de 15 millions de francs ressort d'observations lors des élections de 2007. Un montant de cet ordre voire supérieur est cependant réaliste pour les prochaines élections, relève le politologue zurichois Louis Perron, interrogé par l'ATS. Il pourrait selon lui être supérieur de 30 à 50%.

3 millions pour le PLR

Les libéraux-radicaux disposent de la plus grosse enveloppe après l'UDC avec 2,6 millions de francs, a indiqué leur président Fulvio Pelli qui a levé un coin de voile de la campagne dans la presse dominicale. S'ajouteront des contributions de sections cantonales et de certains candidats.

Le PDC indique qu'il disposera de quelque 3 millions de francs pour les élections fédérales, soit le double des socialistes. Mais le montant n'est pas encore définitif, a déclaré le secrétaire général démocrate-chrétien Tim Frei.

En comparaison, les autres partis apparaissent sous dotés. Le budget des Verts, du PBD et des Verts libéraux ne devrait pas passer la barre du million. Les écologistes disent même ne pas avoir plus de 180'000 francs dans leurs caisses pour les fédérales.

Les Verts sur le terrain

Les Verts comptent mobiliser leur électorat autrement: par leur mobilisation sur le terrain en s'engageant dans plusieurs votations cantonales sur des objets nucléaires ou en défendant leur initiative pour une économie verte. "Nous ne pouvons pas nous permettre une campagne onéreuse, alors nous occuperons la rue et adopterons une stratégie de proximité", a expliqué la secrétaire générale Miriam Behrens à l'ATS.

Une carte que joueront également les autres formations. Presque tous les grands partis ont sur le feu une ou plusieurs initiatives populaires susceptibles de capter l'attention des électeurs et des médias.

Le PS a lancé la récolte de signatures pour son initiative "Cleantech" en faveur des énergies renouvelables, le PLR a dans son pipeline l'initiative "Stop à la bureaucratie", l'UDC envisage une nouvelle initiative en matière d'immigration.

Sections cantonales en action

Mais tous affûtent leurs armes pour une campagne électorale classique, essentiellement menée par les sections cantonales. Celles-ci seront assistées par des équipes spéciales 'Elections', chargées de coordonner les actions et d'animer le débat d'idées.

Les partis ne comptent pas engager beaucoup de personnel supplémentaire pour renforcer leur staff. L'UDC, par exemple, bat le rappel dans ses troupes ce qui amène le Zurichois Hans Fehr à travailler partiellement au secrétariat général.

Le PDC a choisi deux collaborateurs scientifiques pour épauler les deux permanents. Le PLR recrute des étudiants. Mais l'argent et les équipes de campagne ne sont pas aptes à convaincre les électeurs.

L'important réside dans le message et la stratégie du parti. Le succès sourira à celui "qui en plus d'une ligne claire dispose de l'argent, du savoir-faire et de la discipline", résume Louis Perron. "Si l'UDC a gagné cinq fois de suite des élections fédérales, c'est parce qu'elle domine complètement ses concurrents dans tous ces domaines", conclut le politologue zurichois.

ats/sbo

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"Une république bananière"

Le financement des partis en Suisse fait penser à une république bananière, estime le politologue zurichois Louis Perron. Aux Etats-Unis, il n'y a pas de limites au financement des formations politiques sous condition de déclarer l'origine de ces fonds. L'Etat ne leur verse rien.

En Europe en revanche, les partis sont partiellement financés par l'Etat au pro rata de leur électorat, ce qui implique un certain devoir de transparence.

La Suisse est un cas particulier: les partis sont totalement libres dans leurs dépenses, leurs caisses étant alimentées par des dons et des contributions de membres. Mais l'origine des fonds n'a pas à être déclarée. Ils ne reçoivent pratiquement aucun soutien public.

Le cas helvétique, dénué de toute transparence, ressemble à ce qui se passe en Amérique latine ou en Asie, selon Louis Perron. Dans un tel système, selon lui, la gauche se retrouve désavantagée, l'économie étant plus disposée à soutenir des partis de droite et du centre qui défendent mieux leurs intérêts.

Ces milieux ont jusqu'à présent fait barrage avec succès à tout projet imposant davantage de transparence en matière de financement des partis. Seuls les cantons de Genève et du Tessin ont adopté des règles plus strictes.

Le système suisse favorise les abus et la corruption, estime l'organisation Transpency International. Les partis politiques peuvent aussi devenir dépendants de puissants groupes d'intérêt. L'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a également recommandé à la Suisse une plus grande transparence.

Profitant de l'opacité actuelle en matière de financement de partis et d'associations politiques, certains lobbies seraient en mesure d'avoir une influence sur la politique sans que personne ne s'en rende compte.