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Recherche sur l'être humain: un plébiscite

Expérience mesurant l'activité électrique du cerveau réalisée à l'Université de Genève
Expérience mesurant l'activité électrique du cerveau réalisée à l'Université de Genève
Le nouvel article constitutionnel chapeautant la recherche sur l'être humain a facilement passé la rampe dimanche en votation. Il a été approuvé par 77,2% des votants. Tous les cantons, Suisse romande en tête, ont dit oui.

En revanche, les Suisses ont clairement rejeté les deux autres
objets qui leur étaient soumis. Ils ont balayé la baisse du taux de conversion du 2e pilier et on
massivement repoussé l'institution d'un avocat pour les animaux .



A l'instar du Conseil fédéral et du Parlement, plus de 1,707
million de citoyens ont estimé nécessaire d'ancrer dans la
Constitution une disposition encadrant les projets scientifiques.
Elle est axée sur la dignité humaine, les conditions de
participation aux recherches et la pertinence de ces dernières par
rapport aux risques et aux contraintes.



Les opposants, réunissant en particulier l'UDC, les adversaires du
génie génétique et certains milieux évangéliques, ont été suivis
par quelque 540'000 électeurs.

Les Romands favorables

La Suisse romande, réputée pour ses pôles de biotechnologies,
s'est montrée la plus enthousiaste. La palme du oui revient aux
Genevois, qui ont apporté leur soutien par 88% des voix. Ils sont
talonnés par les Vaudois, avec 87,6% d'avis favorables. Neuchâtel
décroche la 3e place (82,4%). Le oui des Fribourgeois (79,8%)
dépasse également la moyenne nationale. L'article a passé la rampe
par 77,3% dans le Jura, 75,4% à Berne et 72,7% en Valais.



En Suisse alémanique, les meilleurs résultats ont été enregistrés
dans le fief de l'industrie pharmaceutique et dans le canton qui
abrite l'EPFZ: 79,8% à Bâle-Campagne, 78% à Zurich et 76,9% à
Bâle-Ville. Viennent ensuite Zoug et Lucerne, avec un peu plus de
75%. Le taux d'approbation atteint 77,7% au Tessin. Seuls quatre
cantons ont accepté l'article avec moins de 70% des voix: Appenzell
Rhodes-extérieures (69,8%), Schaffhouse (67,9%), Schwyz (67%) et
Uri (66,7%).

Une loi déjà connue

L'article de la constitution relatif à la recherche sur l'être
humain sera détaillé dans une loi dont le contenu est déjà connu,
sauf correction future par le Parlement. Le Conseil fédéral a jugé
que les enjeux étaient suffisamment importants pour qu'un projet
soit ficelé avant le scrutin. La loi ne réserve pas de surprise par
rapport à l'amendement adopté dimanche, lui-même très complet pour
une disposition de niveau constitutionnel.



Elle confirme que le but principal est de protéger la dignité, la
personnalité et la santé de l'être humain dans la recherche. A
cette fin, elle fixe des principes contraignants pour tous les
domaines de recherche concernés et énumère les conditions à remplir
dans différents cas de figure.



L'autodétermination et le consentement des participants aux études
font partie des éléments récurrents. Des exceptions sont toutefois
possibles, en particulier dans les cas d'urgence. S'agissant d'un
enfant, sa participation à une étude est conditionnée au feu vert
de ses parents, qui sont ses représentants légaux.

Des règles sur les personnes vivantes

Le texte réglemente la recherche sur les maladies touchant
l'être humain ainsi que sur la constitution et les fonctions du
corps humain. Il englobe la recherche sur des personnes vivantes et
décédées, des embryons, des fœtus, du matériel biologique d'origine
humaine et des données personnelles liées à la santé.



La loi précise que les recherches qui ont pour but de "modifier
les caractéristiques de l'embryon ou du fœtus sans rapport avec une
maladie" sont illicites. Elle permettra également d'appliquer des
règlements internationaux, comme la Convention de
biomédecine.



L'expertise indépendante continuera d'être effectuée par les
commissions d'éthique cantonales, mais à des conditions uniformes
pour toute la Suisse. Quant aux projets de recherche menés sur
plusieurs sites, une pratique lente et coûteuse, ils seront
désormais soumis à une seule commission directrice. Cette dernière
sera chargée de l'évaluation complète des études dites
multicentriques.



ats/lan

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La situation dans les autres pays européens

En comparaison internationale, l'article constitutionnel relatif à la recherche sur l'être humain ouvre la voie à une loi très complète.

La Grande-Bretagne et les Etats-Unis par exemple ne réglementent que les études avec des médicaments et celles des autorités nationales de santé.

En Allemagne, il n'y a que des prescriptions nationales sur la recherche avec des médicaments, a expliqué à l'ATS Michael Gerber, de l'Office fédéral de la santé publique. Le reste de la recherche sur l'être humain est régi principalement par le droit corporatif médical.

La Belgique connaît une loi complète sur la recherche biomédicale avec des personnes. Ce texte règlemente non seulement les expériences avec des médicaments ou d'autres produits médicaux, mais aussi les essais menés par des chirurgiens, psychiatres ou psychologues.

La France et l'Espagne vont encore plus loin, comme la Suisse en cas d'acceptation de l'article le 7 mars. Les lois relativement nouvelles de ces pays incluent également la recherche sur du matériel biologique comme les cellules-souches, les foetus ou les tissus humains. Ces dispositions ont en commun de placer la protection de la dignité humaine au premier rang.

Selon Michael Gerber, le fait qu'elles soient libérales ou restrictives découle surtout de spécificités nationales. La Grande-Bretagne est traditionnellement très ouverte vis-à-vis de la recherche, au contraire de l'Allemagne, très réservée en raison de son passé nazi.