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Alain Berset a été une "boussole" lors du Covid, mais a un bilan politique "modeste", écrit la presse

La revue de presse - Par Valérie Droux
La revue de presse - Par Valérie Droux / La Matinale / 4 min. / le 22 juin 2023
Alain Berset, le président de la Confédération helvétique, a annoncé mercredi qu'il quitterait ses fonctions gouvernementales à la fin de l'année. La presse commente largement cette annonce, mais critique le bilan du Fribourgeois, notamment en matière d'assurance maladie.

Pour le journal fribourgeois La Liberté, le départ d'Alain Berset est somme toute logique. Et il arrive au bon moment: la population a accepté la révision de l'AVS et le sort du 2e pilier n'est plus entre ses mains.

L'échec de la réforme du système de santé est certes une ombre au tableau du Fribourgeois, "mais un autre ministre aurait-il fait mieux?", se demande la Liberté, qui rappelle que sa gestion de la pandémie a fait d'Alain Berset le conseiller fédéral préféré des Suisses.

"Quant à la médiatisation de ses affaires privées, elle aura certes malmené le premier de la classe, mais il s'en est sorti presque sans mal", juge le titre.

A moins que les résultats des prochaines élections viennent brouiller les cartes. Un nouveau succès des Verts et des Vert'libéraux suscitera immanquablement des vocations

La Liberté

Pour le Parti socialiste, ce départ est "une bonne et une mauvaise nouvelle", relève encore La Liberté. C'est "l'assurance d'avoir de la visibilité durant toute la campagne pour les élections fédérales d'octobre, de profiler des personnalités".

La Bernoise Simonetta Sommaruga ayant été remplacée par la Jurassienne Elisabeth Baume-Schneider, les Alémaniques ne laisseront pas passer leur tour, prévoit encore le journal. "A moins que les résultats des prochaines élections viennent brouiller les cartes. Un nouveau succès des Verts et des Vert'libéraux suscitera immanquablement des vocations".

>> Lire aussi : Qui pour prendre le siège de conseiller fédéral laissé libre par Alain Berset?

Un département "difficile"

Alain Berset a eu le mérite, que n'ont pas eu tous ses collègues, de rester douze ans à la tête d'un département difficile et usant, juge 24 heures. Le journal vaudois remarque également que le Fribourgeois aura aussi brisé les ambitions gouvernementales de plusieurs socialistes vaudois.

24 heures admet que "le guide a perdu une grande partie de son crédit - et un brin de sa popularité" dans les affaires qui l'ont éclaboussé, notant que "sa capacité de résilience vaut toutes les casseroles anti-adhésives du monde entier". "D'autres que lui seraient tombés pour bien moins que cela".

Sur un plan cantonal, 24 heures rappelle qu'Alain Berset avait barré la route du Conseil fédéral à Pierre-Yves Maillard en 2011. Et en ne démissionnant pas en même temps que Simonetta Sommaruga, il a à nouveau empêché son meilleur ennemi de retenter sa chance.

"Et puisque c'est déjà une femme romande qui siège désormais parmi les sept Sages, il risque bien, en partant, de fermer la porte à Nuria Gorrite ou Rebecca Ruiz. A moins que Guy Parmelin ne choisisse lui aussi de jeter l'éponge avant les fédérales", analyse encore 24 heures.

La campagne pour les fédérales est lancée

Avec ses capacités de compromis et son pragmatisme, Alain Berset a été l'un des conseillers fédéraux les plus puissants, juge Le Temps. Qui souligne que le socialiste fribourgeois a aussi lancé mercredi la campagne pour les élections fédérales.

Cette influence, dont il était très fier, il l'a aussi travaillée par son sens de la mise en scène

Le Temps

"Cette influence, dont il était très fier, il l'a aussi travaillée par son sens de la mise en scène", écrit l'éditorial du journal édité à Genève. Le titre relève ses capacités à sortir de la crise du Covid "malgré de très fortes pressions et des attaques d'une violence inégalée", ainsi que le succès de la révision de l'AVS.

Mais Le Temps rappelle aussi les échecs d'Alain Berset, en particulier les coûts de la santé et les primes maladie qui n'ont cessé d'augmenter. Et sur le dossier européen, le socialiste "s'est caché", regrette le journal.

L'annonce de mercredi n'arrange pas les affaires du PS, analyse encore Le Temps. Les Vert.e.s ont déjà annoncé qu'ils revendiquaient un siège au Conseil fédéral. En décembre, la majorité de droite pourrait tout à fait élire un écologiste pour diviser la gauche, selon le journal.

"N'a pas vraiment obtenu grand-chose"

Pour le Blick alémanique "Alain Berset n'a pas vraiment obtenu grand-chose: son projet prestigieux, la réforme commune de l'AVS et des caisses de pension, a échoué devant le peuple. Les coûts de la santé, le deuxième grand chantier du département, continuent eux de croître."

Certes, écrit l'éditorialiste, "Alain Berset a pu imposer des mesures d'économie - sur le prix des médicaments et, en partie, sur les tarifs médicaux. Mais là aussi, il manque un coup de pouce". "De manière cynique", dit-il, "on pourrait dire que le seul grand héritage est qu'un conseiller fédéral PS a relevé l'âge de la retraite des femmes à 65 ans".

On pourrait dire que grâce à la pandémie, Alain Berset se rappellera au bon souvenir de tous. Pour son plus grand bonheur

Le Blick

Alain Berset a globalement bien géré la pandémie, "même s'il y a eu des erreurs de décision et des pannes" et "même s'il a été traité plus durement que jamais", reconnaît toutefois le journal. "Il a été pour le pays la boussole dont il avait besoin, comme le montrent de manière impressionnante les sondages de popularité. Même ses scandales et ses escapades, la population les lui a pardonnés".

"De manière cynique", conclut le Blick, "on pourrait dire que grâce à la pandémie, Alain Berset se rappellera au bon souvenir de tous. Pour son plus grand bonheur."

Un bilan politique "modeste"

"(...) Quelqu'un s'en va qui donnait de plus en plus l'impression de se situer au-dessus. Sur qui la critique n'avait pas de prise. Qui a pu se permettre un nombre inhabituel de choses dans ce pays trop correct qu'est la Suisse", estime le Tages Anzeiger.

Et de lister: "'Coronaleaks', affaire de chantage, vol privé problématique (dans le ciel français): la pression n'a fait que s'amplifier récemment, mais Berset l'éloignait en souriant. Fort de son aura de 'ministre des crises'. (Mais) hormis son rôle dans la gestion de la pandémie, Alain Berset présente un bilan politique modeste. Même si, après des années de lutte, il a pu faire adopter l'automne dernier une réforme limitée de l'AVS. La réforme du 2e pilier se fait en revanche toujours attendre. Et les coûts de la santé explosent à nouveau (...).

"Mitterrand en miniature"

"C'est le bon moment pour s'en aller, après douze ans de fonction, a déclaré Alain Berset. (...) Mais dans la salle, il était clair pour les personnes présentes qu'Alain Berset avait manqué 'le bon moment' depuis un certain temps, estime la NZZ.

>> En lire plus : "C'est le bon moment pour partir" du Conseil fédéral, dit Alain Berset

Et de poursuivre: "Il aurait dû s'en aller après la levée des dernières mesures anti-Covid, au sommet de sa carrière et de sa force. (...) Aujourd'hui, il laissera le souvenir des affaires (de ces derniers mois), d'un Mitterrand en miniature à qui la Suisse romande a laissé passer plus de choses que la Suisse alémanique."

Alain Berset a accompli sa mission dans le dossier du Covid, reconnaît L'Agefi. Mais beaucoup reste à faire dans le domaine de l'AVS et de la prévoyance professionnelle, pointe le journal économique.

La victoire obtenue par le socialiste fribourgeois avec la réforme de l'AVS l'année dernière ne suffira pas pour combler les lacunes de financement dans ce domaine au-delà de l’an 2030, souligne L'Agefi, citant une étude publiée par l'UBS le même jour que l'annonce du départ du président de la Confédération. De nouvelles mesures seront nécessaires pour assurer l'avenir du 1er pilier.

Quant au remodelage de la prévoyance professionnelle, le projet a au moins été accepté par le Parlement avant le départ d'Alain Berset. Sa défense devant le peuple incombera toutefois à son successeur. Et dans le domaine de la santé, le bilan est encore plus mitigé, juge L'Agefi, rappelant les hausses des primes d'assurance maladie.

ats/vajo

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