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Isabelle Harsch: "Il faut qu'on puisse s'aider mutuellement entre femmes"

#Helvetica
#Helvetica : Isabelle Harsch / #Helvetica / 19 min. / le 25 février 2023
Devenue patronne d'une entreprise de déménagement à 28 ans, Isabelle Harsch dirige l'entreprise familiale créée par son grand-père en 1957 à Genève. Elle y insuffle un nouveau style de management et milite pour que l'on confie plus de postes à responsabilités à des femmes en Suisse.

A 35 ans, Isabelle Harsch a déjà une solide expérience de cheffe d'entreprise au sein de la société que son père lui a transmise alors qu'elle avait 28 ans.

"C'est peut-être peu commun de commencer aussi jeune, et c'est vrai que ça n'a pas été simple", confie-t-elle samedi dans l'émission #Helvetica de la RTS. "J'étais encore très inexpérimentée, donc j'ai dû faire mes preuves sur le terrain et apprendre de mes erreurs".

Elle a débuté il y a douze ans au sein de la logistique, pour se former. "J'ai connu l'entreprise par ce biais-là, les collaborateurs ont appris à me connaître aussi. Je pense que cela a favorisé un lien de confiance", dit-elle. "C'est ce dont j'avais envie, ce dont mon père avait envie", poursuit la CEO.  "J'ai beaucoup connu l'entreprise quand j'étais enfant, mon père en parlait beaucoup à la maison, j'ai grandi avec. Il y avait aussi une notion de fierté".

On peut mettre en danger l'entreprise en fonction des décisions que l'on prend.

Isabelle Harsch

Ce n'est pourtant pas toujours une bonne chose de prendre de telles responsabilités très jeune, reconnaît-elle. "Je pense que ça peut aider, ça amène quelque chose à l'entreprise, mais ça peut être aussi un risque". Par manque de l'expérience, "on peut mettre en danger l'entreprise en fonction des décisions que l'on prend". Cela dit, Isabelle Harsch voit aussi l'opportunité de sortir un peu des sentiers battus. "Et on a peut-être moins peur de la critique".

Besoin d'un management plus proactif

Son père Bertrand gérait l'entreprise de manière plus traditionnelle, un peu patriarcale même. Elle a voulu moderniser la manière de la gérer. "J'ai fait en sorte que ce soit une évolution et pas une révolution", souligne Isabelle Harsch.

Mais j'avais besoin d'un management un peu plus proactif, ajoute-t-elle. "J'ai souhaité élargir la strate hiérarchique en mettant plus de responsables opérationnels (…) pour que, finalement, les décisions soient prises plus vite, que les collaborateurs soient aussi plus proches des centres de décision.

On a besoin d'être agile dans le contexte que l'on connaît, ajoute la Genevoise. "Je pense que les collaborateurs ont vu le résultat, peut-être que cela donnait plus de sens dans leur quotidien. Et ça a aussi augmenté la motivation".

Le pire pour un entrepreneur c'est les licenciements, mais on est tributaire du marché.

Isabelle Harsch

Reste qu'un chef d'entreprise doit aussi, parfois, prendre des décisions impopulaires. "Le pire, pour un entrepreneur, c'est les licenciements", relève-t-elle. Mais parfois, "il faut prendre cette décision pour alléger l'entreprise, la redimensionner en fonction du volume d'affaires. On est tributaire du marché sur lequel on évolue".

Isabelle Harsch estime néanmoins qu'on est plutôt dans une relation de confiance entre employés et employeurs en Suisse. "Le droit du travail est fait sur un modèle de confiance. Je pense que la perception est plutôt positive, même si ça ne veut pas dire qu'on est tout le temps populaire".

Et face aux crises actuelles, le maître-mot est l'adaptation, dit-elle. "Il faut être résilient, c'est une qualité que l'entreprise et moi nous avons".

S'aider mutuellement entre femmes

Aujourd'hui, il n'y a que 2,9% de femmes aux postes de CEO d'entreprise en Suisse. "Je milite vraiment pour que l'on confie des postes à responsabilités à des femmes", réagit-elle. "Dans les actions que je peux mener, j'ai toujours cet élément en considération, parce qu'il faut qu'on puisse s'aider mutuellement entre femmes".

Je pense que le combat pour valoriser les femmes est aussi un combat de droite.

Isabelle Harsch

Membre du Centre, Isabelle Harsch a brièvement siégé au Conseil municipal (législatif) de la Ville de Genève il y a quelques années. "Je pense que le combat pour valoriser les femmes est aussi un combat de droite", fait-elle remarquer même si elle a désormais laissé de côté la politique. "Moi, je m'engage au sein de mon entreprise".

L'exemple d'Alain Berset pendant le Covid

Parmi les personnalités suisses qu'elle affectionne, elle dit avoir été très impressionnée par Alain Berset pendant la crise du Covid. "J'ai trouvé qu'il a géré cette crise comme un vrai patron d'industrie, ça m'a beaucoup inspiré sur la manière de communiquer, sur l'humilité qu'il avait à dire la situation". Et la cheffe d'entreprise dit s'en être largement servi dans les communications à ses collaborateurs "par rapport aux mesures que l'on devait prendre et à l'incertitude dans laquelle on vivait".

La société Harsch, dont le siège est à Genève, compte 150 employés pour un chiffre d'affaires de plus de 25 millions de francs par an. Elle est spécialisée dans le transport d'oeuvres d'art, les déménagements internationaux et d'entreprises, ainsi que dans la gestion d'archives.

Propos recueillis par Elisabeth Logean/oang

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