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En Suisse, trois trains par jour roulent avec une faille de sécurité reconnue

Un rapport d’enquête pointe des failles de sécurité sur le réseau ferroviaire suisse
Un rapport d’enquête pointe des failles de sécurité sur le réseau ferroviaire suisse / 19h30 / 2 min. / le 14 janvier 2023
Un rapport du Service suisse d'enquête de sécurité (SESE) montre que chaque jour, trois trains présentant un défaut reconnu d'un système de protection circulent sur le réseau ferroviaire, a découvert SRF. Les CFF confirment mais disent prendre des précautions.

Le 2 juin 2022, une locomotive entre en collision avec un train de chantier en gare de Zollikofen, dans le canton de Berne. L'accident ne fait pas de blessés graves. Plus de peur que de mal, mais de lourds dégâts matériels.

"On a eu de la chance", confirme l'enquêteur du Domaine rail et navigation du SESE Christoph Kupper. "Heureusement, ce n'était pas un train de marchandises dangereuses ou un train de voyageurs", a-t-il même confié devant la caméra de SRF.

Système de sécurité volontairement désactivé

Selon le rapport de l'accident, publié jeudi dernier, le conducteur a manqué un signal d'arrêt. Et le système de sécurité idoine n'a pas freiné le train ensuite, et pour cause: il était désactivé.

Le rapport d'enquête révèle aussi que si le conducteur a désactivé ce système de sécurité automatique, c'était en accord avec sa hiérarchie, parce qu'il avait connu par le passé des problèmes de freinages forcés et répétés sans cause apparente.

>> Lire aussi : Le frein d'urgence du téléphérique italien de Stresa avait été désactivé

Cet accident a dévoilé une réalité à l'échelle nationale: d'après le rapport, trois trains circulent chaque jour en Suisse avec ledit système de sécurité ne fonctionnant pas correctement, selon une estimation de CFF Infrastructure.

Prescriptions non suivies

Il existe certes des règles en cas de défaillances de ce genre. Mais "on a accordé une plus grande priorité à la disponibilité - c'est-à-dire à l'exécution de la prestation de conduite - qu'à la sécurité", constate Christoph Kupper.

Ainsi, après une panne du système de sécurité incriminé, les véhicules peuvent encore être déplacés pendant 12 heures au maximum. Un deuxième mécanicien doit toutefois rejoindre la cabine dès que possible, et tant qu'il n'est pas à bord, la vitesse doit être limitée à 80 km/h.

Lors de l'accident de Zollikofen, il n'y avait pas de deuxième personne dans la cabine de conduite de la locomotive défectueuse. "Dans ce cas, les prescriptions ont été interprétées de manière trop large", conclut l'expert.

Dans son rapport, le SESE émet des recommandations claires pour améliorer la sécurité et renvoie la balle à l'autorité de surveillance, l'Office fédéral des transports (OFT), qui doit examiner comment les directives doivent être adaptées. Le rapport préconise aussi de documenter systématiquement les pannes de système de sécurité, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.

L'OFT pas au courant de l'ampleur du problème

L'OFT, de son côté, se déclare surpris. Son porte-parole Michael Müller a reconnu ne pas avoir eu, jusqu'à présent, connaissance du nombre de trains qui traversent chaque jour la Suisse avec un système de sécurité déficient. Il concède que l'instance devrait procéder à des adaptations des prescriptions.

Interrogée, la porte-parole des CFF Sabrina Schellenberg explique elle que des mesures ont été prises pour faire face à cette situation. "Si le système de sécurité tombe en panne, une deuxième personne doit monter dans la cabine de conduite", informe-t-elle, se disant également favorable à l'introduction d'une réglementation valable pour toutes les compagnies dans toute la Suisse.

Les propositions de l'OFT sont actuellement en consultation et seront probablement appliquées à partir de la mi-2024, a déclaré le porte-parole de l'OFT à SRF. Le SESE, lui, prévient: si des trains continuent à circuler avec un système de contrôle non fonctionnel, cela pourrait entraîner à l'avenir des accidents encore beaucoup plus lourds de conséquences.

ther/vic avec srf

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