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L'OFSP ne connaît pas le nombre de guérisons du coronavirus en Suisse

L'OFSP ne donne pas le nombre de personnes guéries du coronavirus, car il ne le connaît pas. [KEYSTONE - Laurent Gillieron]
Au-delà des chiffres - Le nombre de guérisons du Covid-19 / Forum / 3 min. / le 23 avril 2020
Contrairement à l'Italie, l'Office fédéral de la santé publique (OFSP) ne communique pas le nombre de patients guéris du coronavirus. Il souhaiterait le faire, parce que c'est une information rassurante, mais il ne l'a pas.

C’est une remarque que vous avez peut-être entendue: "Pourquoi ne nous dit-on pas combien de personnes guérissent du coronavirus? Ce serait réconfortant". Si l'OFSP ne livre pas ces chiffres, ce n’est pas pour entretenir une alerte, une forme de discipline préventive dans la population, mais c'est simplement parce qu'il ne dispose pas de cette information, explique Virginie Masserey, cheffe du contrôle de l’infection.

Elle précise que le système de santé suisse repose sur les déclarations de maladie, c'est-à-dire les cas déclarés, annoncés. Mais on ne sait pas combien de personnes sont guéries.

Tous les jours en Italie

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande pourtant d’inclure ce chiffre dans les données communiquées chaque semaine par les pays. L'Italie le fait même quotidiennement. Ce chiffre y atteint 54'543.

Mercredi soir, elle annonçait un nouveau record de personnes guéries en une journée: 2943. Une information relayée par les médias, partagée largement sur les réseaux sociaux. Comme un baume pour entrer en phase de résilience et se projeter vers le déconfinement.

Guérison difficile à définir

Mais plutôt que de parler de personnes guéries, il faudrait dire: de retour à la maison. Parce que la plupart des pays qui décomptent les patients guéris le font sur la base des hospitalisations. Ce sont ceux qui ont pu quitter l’hôpital.

Pour l’OMS, un patient est considéré comme "libéré" lorsqu’il a passé deux tests négatifs au coronavirus à 24 heures d’intervalle.

L’université américaine Johns-Hopkins, qui collecte des données sur la pandémie depuis janvier déjà, donne aussi cette information, pays par pays. Mais elle s’appuie, elle, sur les médias pour comptabiliser les guérisons, un chiffre très incomplet.

Données manquantes en Suisse

La Suisse pourrait faire ce même décompte, sur la base des entrées et sorties en hôpital. Mais l’OFSP n’a pas non plus cette donnée. Il l’a uniquement pour les soins intensifs, pour le suivi épidémiologique, soit la donnée qui est importante pour la Confédération. Le but est de pouvoir piloter le système de santé et savoir combien de lits sont disponibles. Donc impossible de décompter les entrées et sorties globales pour établir un nombre de guérisons.

"Guéri" au sens médical

Une autre question est celle de savoir quand on est guéri au sens médical. Est-ce que c’est quand on a été dépisté et que le virus n’est plus présent? C’est la notion retenue par l’OMS pour la statistique. Ou est-ce quand on a "recouvré la santé"? Et si on prend cette notion-là, le temps pour guérir varie beaucoup.

Parfois, quelques jours à peine suffisent. Le virus nous effleure et disparaît rapidement. Une, peut-être deux semaines maximum, et on s’en remet. Mais il peut aussi épuiser, même les personnes qui ont des symptômes modérés. La phase de récupération peut alors être plus longue.

Patients hospitalisés

C'est surtout le cas pour les patients hospitalisés, puisqu'un malade sur 5 doit l’être, selon l’OMS. Eux peuvent mettre longtemps à s’en remettre. Selon la durée du séjour, et s’ils ont dû être intubés, sous anesthésie. Après des soins intensifs, les séquelles peuvent durer jusqu'à 12, voire 18 mois.

Etre guéri, c’est peut-être ça finalement: au-delà du fait qu’on a quitté l’hôpital, au-delà d’un test diagnostic, c’est plutôt avoir retrouvé une vie normale, avec toute son énergie et sans séquelles.

Alexandra Richard/Jean-Philippe Rutz

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