Instituée par le Conseil fédéral en novembre 2014, la CIE a recueilli et analysé ces quatre dernières années des milliers de documents d'archives. En s'appuyant aussi sur les témoignages des survivants, elle a déjà publié en mai une première série de livres sur la question. La commission livrera ses recommandations en septembre.
Les trois ouvrages publiés lundi présentent la vie quotidienne de ces internés, qui se retrouvent enfermés sans savoir pourquoi, ni quand ils pourront sortir, ainsi que la pratique des autorités en la matière. Le travail était central dans le processus, il devait permettre d'opérer une transformation chez les personnes internées.
L'appât du gain des directeurs d'établissements
"Les prisons de l’époque étaient-elles à ce point vides qu'il faille à tout prix les remplir... avec des enfants abandonnés?", se demande une victime des internements administratifs, dont le témoignage est retranscrit dans ces ouvrages. "J’ignorais pourquoi je me retrouvais enfermée là et pour combien de temps", précise-t-elle en témoignant des violences dont elle a été victime au centre de Bellechasse (FR).
Mais les directeurs de ces établissements semblaient avant tout préoccupés par la rentabilité et la recherche de mandats. Des internés se retrouveront ainsi jusque dans les entreprises privées. Le centre de Bellechasse enverra notamment de la main-d'oeuvre chez Micarna, Selecta ou Saia.
Rapport final pour septembre
Les travaux de la CIE couvrent une période allant du début du 20e siècle à 1981. Il est impossible de fixer une date précise au début des internements administratifs en Suisse. Chaque canton a fixé ses propres lois.
Un rapport final destiné au Conseil fédéral sera publié en septembre 2019.
ats/jfe
Internement administratif, définition
L'internement administratif désigne des mesures qui ont mené à une privation de liberté dans un établissement fermé. Les personnes emprisonnées n'avaient pas commis de délit, mais leur mode de vie ne correspondait pas aux attentes des autorités.
A défaut de base légale, l'internement administratif était utilisé à de nombreuses fins. Il a servi tout autant à faire la "police de la pauvreté" qu'à lutter contre l'alcoolisme ou faire respecter des normes sociales et morales, surtout pour les femmes. La mesure est ensuite devenue un instrument de "rééducation" pour les jeunes jugés rebelles.