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Katharina Fromm veut rapprocher l'Université de Fribourg du grand public et des entreprises

L'invitée de La Matinale (vidéo) - Katharina Fromm, nouvelle rectrice de l’Université de Fribourg
L'invitée de La Matinale (vidéo) - Katharina Fromm, nouvelle rectrice de l’Université de Fribourg / L'invité-e de La Matinale (en vidéo) / 13 min. / le 10 avril 2024
Depuis février, Katharina Fromm est la nouvelle rectrice de l'Université de Fribourg. Cette chimiste mise sur la vulgarisation et l'interdisciplinarité pour ouvrir son institution au reste de la société.

D'origine allemande, mais également détentrice du passeport suisse, Katharina Fromm a succédé à une autre Allemande, la juriste Astrid Epiney. En tant que chercheuse en science fondamentale, elle présente donc un profil très différent, et paradoxalement plutôt atypique à la tête d'une université. À Fribourg, ce n'était pas arrivé depuis le biologiste Hans Meier (1991-1995).

>> En savoir plus à son sujet : Katharina Fromm élue rectrice de l'Université de Fribourg

Diffusion et vulgarisation des sciences

Réputée pour la création de spectacles de chimie ludiques, qui lui permettent de "transmettre son enthousiasme pour la science" aux jeunes, elle se donne notamment pour mission de rendre la recherche plus accessible et de tisser des liens plus profonds avec le reste de la société.

"L'Université de Fribourg est déjà au service de la société, puisqu'on forme des jeunes qui vont aller dans l'économie", explique-t-elle. "Mais on va encore renforcer le contact avec le grand public pour faire connaître un peu mieux la recherche, pour ne plus avoir autant de questions autour de ce qu'on fait concrètement à l'université."

"Tous les domaines se justifient"

Pour elle, ces interrogations sont parfaitement légitimes. "On a quand même une grande partie de nos fonds qui viennent des taxes, donc ce sont les gens qui payent l'université", souligne-t-elle.

Et alors que le monde universitaire est parfois confronté à des critiques sur certaines formations jugées insuffisamment professionnalisantes, la docteure en chimie balaie: "Je crois que tous les domaines se justifient. À l'université, on apprend à penser et à résoudre des problèmes, et pas nécessairement dans un seul domaine. Par exemple, un chimiste ne va peut-être pas faire toute sa vie dans la chimie. Il ou elle va aussi travailler dans une assurance par exemple, et contribuer, avec sa façon de penser, à être innovant, à résoudre les problèmes de demain."

Une "vallée de la mort" vers l'industrie

Ces ponts avec le reste de la société passent aussi par un renforcement de la collaboration avec l'économie locale. "Dans toute université, on a de la recherche de base qui peut s'appliquer quelque part. Mais il y a un long chemin vers son application", explique-t-elle.

"Il y a la fameuse 'vallée de la mort' entre la découverte dans la recherche fondamentale et son application dans l'industrie. C'est ce transfert de savoirs de l'université vers l'économie qu'il faut renforcer", poursuit l'Allemande. "J'ai gardé mon dicastère de Recherche et innovation que j'avais en tant que vice-rectrice. Je crois que je suis la seule rectrice en Suisse qui a gardé un tel dicastère, donc ça me tient beaucoup à cœur de renforcer ce pipeline."

"C'est nous qui fixons les règles du jeu"

Ces liens avec l'économie peuvent toutefois s'avérer pernicieux. En janvier, la RTS révélait que l'Université de Neuchâtel employait des chercheurs du cigarettier Philip Morris, suscitant un tollé dans les milieux de la prévention. Mais cette présence ne choque pas Katharina Fromm.

"Si ça sert à donner des exemples et à renforcer le savoir des jeunes, pourquoi pas? Ils peuvent donner des informations sur des technologies, sur ce qui s'applique actuellement... Par contre, il ne s'agit évidemment pas de faire la théologie d'une certaine entreprise", commente-t-elle.

Elle souligne toutefois l'importance d'un règlement strict sur ces partenariats: "Le privé n'a rien à dire sur ce qu'on fait au niveau de la recherche fondamentale. Et surtout sur les résultats. C'est exclu. La recherche doit rester libre, c'est très important."

La rectrice estime qu'actuellement, moins de 1% du financement de son université provient du privé. "Mais ça pourrait devenir plus important dans le futur. Et là, les règles doivent être claires et les partenariats toujours établis selon nos règles de jeu."

Propos recueillis par Pietro Bugnon

Texte web: Pierrik Jordan

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Un centre agroalimentaire bien ancré dans le paysage fribourgeois

L'Université de Fribourg vient de lancer un nouveau Centre de recherche et d'innovation sur l'alimentation (FRIC), qui mise en particulier sur l'interdisciplinarité.

"Fribourg est un canton traditionnellement beaucoup orienté sur l'agriculture", rappelle-t-elle, citant l'Agroscope - qui va créer un campus central à Posieux - ou l'Institut agricole de Grangeneuve.

"Donc pour compléter cette offre qui est très appliquée, on souhaite renforcer la place de Fribourg avec la recherche fondamentale autour de l'agroalimentaire. Évidemment, on pense dans un premier temps à la biologie, mais il y a aussi la chimie qui va contribuer, le management, la communication" ou encore la psychologie.

"Si on pense par exemple aux protéines artificielles, on a beaucoup de questions autour de la santé, mais aussi des questions légales sur les autorisations de mise sur le marché. Donc tous ces scientifiques vont contribuer", illustre-t-elle.