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Une vaste étude révèle l'ampleur du marché vaudois de la cocaïne

Ce sont les consommateurs réguliers, même peu nombreux, qui font tourner le marché. [Fotolia - Orlando Bellini]
Une vaste étude suisse révèle l'ampleur du marché vaudois de la cocaïne / La Matinale / 1 min. / le 12 juillet 2018
Trois instituts de recherche ont mené conjointement une vaste enquête de terrain sur une année pour analyser le marché vaudois de la cocaïne. Elle révèle une demande forte mais hétérogène.

La fondation d'utilité publique Addiction suisse, l'Ecole des sciences criminelles de l'Université de Lausanne et l'Institut de médecine préventive du CHUV ont interrogé des dizaines de consommateurs et de policiers durant toute l'année 2016. Ils ont également collecté des échantillons d'eaux usées dans les stations d'épuration.

Le résultat de cette collaboration inédite est une photographie détaillée du marché de la cocaïne sur tout le canton de Vaud: ses acheteurs, ses filières, ses prix ou encore la composition des produits.

20% des usagers achètent 80% de la drogue

On y découvre que la demande est forte mais très hétérogène: les consommateurs réguliers - marginaux ou personnes dont la consommation de cocaïne a envahi la vie professionnelle et sociale - représentent  20% des usagers mais achètent 80% de la drogue en circulation. Même s'ils sont peu nombreux, ce sont eux qui font tourner le marché de la cocaïne.

"Parmi les usagers réguliers, il y a deux groupes que tout oppose: les personnes dépendantes, qui consomment d’autres drogues et qui sont marginalisés, et des usagers bien intégrés et qui utilisent la cocaïne pour fonctionner socialement dans leur travail par exemple", explique à la RTS Frank Zobel, directeur adjoint d'Addiction suisse.

Et le spécialiste de relativiser: "On n’est pas dans une banalisation généralisée de la cocaïne. Il y a environ 2% de la population qui consomment de la cocaïne, alors qu’ils sont 25% pour le tabac et 80% pour l’alcool."

La moitié vendue dans la rue

La drogue est vendue pour moitié dans la rue, le reste du trafic s'opérant en circuit fermé ou par livraison à domicile. Au total, les quantités qui circulent annuellement dans le canton de Vaud sont estimées entre 416 et 500 kilos. Extrapolé à la Suisse, cela pourrait représenter cinq tonnes de cocaïne par an.

Une première étude avait déjà analysé le marché de l'héroïne l'an passé. Une troisième étude, à venir, se penchera sur celui du cannabis.

1000 francs en Colombie, 150'000 francs à Lausanne

L’étude montre également le parcours d’un kilo de poudre blanche depuis l’Amérique latine jusqu'à Lausanne. "Il y a beaucoup d’intermédiaires, dont beaucoup la coupent, ce qui implique une certaine insécurité du produit", rapporte Frank Zobel.

Le grand nombre d'intermédiaires engendre une explosion du prix de la drogue. "La consommation quotidienne de cocaïne dans le canton de Vaud représente 1000 francs à la sortie du laboratoire en Colombie. Elle vaut ensuite 150'000 francs à Lausanne." Qui sont les principaux bénéficiaires? "Il y a beaucoup de gens qui se font de l’argent sur le marché noir. C’est le prix du risque, indique le spécialiste. Le paradoxe est que la drogue reste peu chère pour le consommateur. Une dose à Lausanne coûte environ 15 francs."

>> Ecouter l'interview de Frank Zobel, directeur adjoint d'Addiction suisse, dans La Matinale :

Frank Zobel, directeur adjoint d'Addiction Suisse. [RTS]RTS
Frank Zobel commente une étude sur le marché des stupéfiants dans le canton de Vaud / La Matinale / 7 min. / le 12 juillet 2018

oang avec Virginie Langerock

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Réseaux pas seulement africains

Le marché de la cocaïne est aussi caractérisé par la diversité des trafiquants.

Les réseaux les plus importants et visibles sont ceux d’Afrique de l’Ouest (Nigeria, Guinée, etc.). Leur activité repose sur différents facteurs (absence de perspectives au pays et en Europe, facilité d’entrée dans le marché, solidarité, perspectives de revenus croissants), ainsi qu’une organisation souvent flexible.

Des personnes originaires d’Amérique latine, des Balkans, de pays de l’UE, ainsi que des Suisses sont cependant aussi actifs dans la cocaïne.