François Légeret a été condamné à la prison à vie pour le meurtre le 24 décembre 2005 de sa mère, d'une amie de celle-ci et de sa soeur, dont le corps n'a jamais été retrouvé.
Les nombreuses demandes de révision du procès formulées par le condamné, qui a toujours clamé son innocence, ont été rejetées jusqu'à présent. Le Tribunal fédéral a encore refusé une requête en octobre dernier.
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Après la voie juridique, François Légeret emprunte désormais la voie politique pour tenter de se faire entendre. Il exhorte le Grand Conseil vaudois à se saisir de son cas et a rédigé à son attention un document compilant des années de procédure juridique, a appris la RTS.
En 28 chapitres et 180 pages, agrémentés de coupures de presse, le condamné déroule ce qu'il présente comme les preuves de l'erreur judiciaire dont il s'estime victime, parlant entre autres d'"accusations sans preuve" et de "condamnation injuste". Le document a été envoyé vendredi au bureau du Grand Conseil.
"Un véritable manifeste"
François Légeret "rêvait depuis longtemps de tout mettre sur papier et d'écrire un véritable manifeste, dans lequel il dit tout ce qui n'a pas fonctionné depuis le début", a expliqué à la RTS Me Etienne Campiche, l'avocat qui s'occupe des affaires civiles de François Légeret.
"Toutes les requêtes de révision ont été rejetées parce que l'enquête a été polluée par de nombreux petits dysfonctionnements que François Légeret dénonce dans sa requête au Grand Conseil", a affirmé Me Campiche.
"Son idée est de dire: 'puisque de toute façon on ne m'écoute pas, c'est à l'Etat de faire la lumière sur ce qui s'est passé', non seulement [au moment des faits] à Vevey mais aussi lors de l'enquête qui a suivi", a encore détaillé l'avocat.
Démission du procureur Cottier demandée
Ce dossier est nommément dirigé contre le procureur général du canton de Vaud Eric Cottier, dont la démission est demandée. Selon François Légeret, le procureur n'a pas rempli ses obligations "d'établir la vérité" et "d'assurer l'application des droits fondamentaux", et n'a plus l'indépendance nécessaire pour se prononcer sur ses demandes de révision.
Le refus du procureur Cottier de considérer le témoignage oculaire de Gisèle Egli est particulièrement dénoncé dans le document, qui évoque un "mépris de l'intérêt public".
Pour rappel, l’heure du crime fixée par la justice est au coeur de l'affaire. Selon le scénario retenu par les juges, François Légeret aurait agi vers midi le 24 décembre 2005. Le témoignage d'une boulangère, qui affirmait avoir servi deux des victimes après la date de leur mort, avait été écarté.
Or, Gisèle Egli a livré un nouveau témoignage manuscrit à Eric Cottier au printemps 2017. Comme la boulangère, elle a assuré avoir vu Ruth Légeret en vie au centre de Vevey peu après 17h00, ce même 24 décembre 2005. Le procureur général a fait savoir qu'il n'entendait donner aucune suite judiciaire à ce nouveau témoignage.
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Le bureau du Grand Conseil a bien reçu la demande de François Légeret. Il va désormais analyser le dossier pour voir s'il est compétent pour statuer. Contacté par la RTS, Eric Cottier n'a pas souhaité commenter.
Interview radio: Tania Barril
Article web: Pauline Turuban
Rappel des faits
En janvier 2006, les corps de deux octogénaires sont retrouvés dans une villa veveysane. La fille de la maîtresse de maison, Marie-Josée, a quant à elle disparu.
Rapidement les soupçons se portent sur le fils adoptif, François Légeret. Son mobile: l’argent omniprésent dans la famille. En 2008, il est condamné à la prison à perpétuité. Le verdict est confirmé deux ans plus tard dans un procès en révision.
Une boulangère assure avoir vu les deux femmes en vie après l’heure du crime retenue par la justice, mais son témoignage est écarté par le tribunal en 2010. Depuis, François Légeret ne cesse de clamer son innocence et multiplie les demandes de révision, toutes rejetées par le Tribunal fédéral.