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Strauss-Kahn: les partis veulent tourner la page

Dominique Strauss-Kahn a été "entendu en qualité de témoin". [Michel Gangne]
La prestation de Dominique Strauss-Kahn a été suivie par plus de 13 millions de personnes. - [Michel Gangne]
La prestation télévisée de Dominique Strauss-Kahn a été diversement appréciée lundi dans la classe politique. En pleine primaire, la gauche a exprimé un certain embarras, alors que la droite s'est montrée plutôt discrète.

A gauche, les soutiens de François Hollande, en tête dans les sondages pour la primaire PS, ont surtout retenu de l'entretien ( lire: Affaires Strauss-Kahn) la confirmation par DSK d'un "pacte" entre Martine Aubry et lui, selon lequel ils n'iraient pas l'un contre l'autre dans cette compétition.

"J'ai noté qu'il a mentionné un pacte, pacte que Martine Aubry elle-même niait il y a encore peu de temps. J'ai noté qu'il avait dit lui-même qu'il allait être candidat alors qu'elle nous disait il y a quelque temps qu'il n'y avait rien de fait", a déclaré Pierre Moscovici.

"Coup de tonnerre". Les mots de la première secrétaire du PS, Martine Aubry, témoignent de la stupéfaction du parti après l'arrestation de celui qui apparaissait comme le favori des sondages pour la présidentielle de 2012. La plupart des ténors du parti lui apporte son soutien. [Denis Charlet]
"Coup de tonnerre". Les mots de la première secrétaire du PS, Martine Aubry, témoignent de la stupéfaction du parti qui ne "veut pas croire" à l'arrestation de celui qui apparaissait comme le favori des sondages pour la présidentielle de 2012. La plupart des ténors du parti lui apporte son soutien. [Denis Charlet]

Martine Aubry candidate de substitution?

Manière de signifier que, pour lui, la maire de Lille est une candidate de substitution. Benoît Hamon, porte-parole du PS et soutien de Mme Aubry, a répliqué que cela faisait "quelques semaines" que la maire de Lille "démontrait qu'elle était tout sauf une candidate par défaut".

Autre candidate à la primaire, Ségolène Royal a dit retenir de l'intervention de l'ex-patron du FMI "l'envie de tourner la page". Au point que si elle était élue à la présidence de la République, elle ne prendrait pas DSK dans son gouvernement.

La présidente de la région Poitou-Charentes a aussi souhaité "tourner la page" et "élever le débat politique". "Je pense que cette émission a permis de clore quelque chose qui nous a déjà beaucoup trop occupés", a-t-elle avancé sur RTL.

Le député (PS) du Pas-de-Calais Jack Lang a, au contraire, estimé que l'intervention de Dominique Strauss-Kahn avait été "pleine d'émotion et de justesse" (voir la vidéo ci-dessous). "Dominique a parlé la langue du coeur, de la vérité et de l'intelligence", considère l'ancien ministre de la Culture dans un communiqué, en saluant la "haute stature intellectuelle et morale" de l'ancien favori socialiste pour la présidentielle.

Séquences choisies - Jack Lang soutient DSK
Séquences choisies - Jack Lang soutient DSK / L'actu en vidéo / 1 min. / le 19 septembre 2011

A droite, le secrétaire général de l'UMP, Jean-François Copé, s'est déclaré "choqué" par les allusions de l'ancien ministre des Finances à un éventuel "complot". "La théorie du complot, ça va bien, je ne peux accepter les sous-entendus", a-t-il dit, estimant que c'était "extrêmement choquant qu'on vienne rajouter une théorie du complot à tout ce que nous venons de vivre". "Un piège? C'est possible, un complot? Nous verrons", avait lancé dimanche soir Dominique Strauss-Kahn.

Le rapport de Jean-François Copé a été critiqué avant sa sortie.
Le rapport de Jean-François Copé a été critiqué avant sa sortie.

Le patron de l'UMP a encore lâché: "Je ne veux même pas en parler, c'est ridicule, ça suffit". "Il est temps maintenant de tourner cette page", a dit le maire de Meaux de l'affaire Strauss-Kahn. "Il est vraiment grand temps maintenant d'entrer dans les sujets de fond".

La présidente du Front national, Marine le Pen, a estimé que "cet homme avait le plus grand mépris pour les femmes, à qui il accorde une fonction utilitaire", en ajoutant qu'il avait "menti" sur le contenu du rapport du procureur qui "en aucun cas, n'innocente Dominique Strauss-Kahn".

Féministes écoeurées

Les féministes se sont elles dites "écoeurées". La confession publique d'une "faute morale" n'a pas convaincu l'avocate féministe Gisèle Halimi, jugeant qu'"il s'est mis dans la peau du comédien qui devait être pugnace et incisif". "Ce qui est grave, c'est que chaque fois que la dignité des femmes est en cause comme cela, on tente de faire passer les femmes qui sont de pures victimes pour des affabulatrices", a-t-elle ajouté.

La porte-parole d'Osez le féminisme, Thalia Breton, s'est dite "écoeurée", et la présidente de l'association Paroles de femmes, Olivia Cattan, a jugé que les déclarations de l'ancien directeur général du Fonds monétaire international (FMI) étaient "lamentables".

Dominique Strauss-Kahn a nié fermement dimanche soir avoir agressé la femme de chambre de l'hôtel Sofitel de New York, Nafissatou Diallo, pas plus que la romancière Tristane Banon.

Record d'audience

Nafissatou Diallo, DSK, Strauss-Kahn, Sofitel, plainte [AFP - Stan Honda]
Nafissatou Diallo, DSK, Strauss-Kahn, Sofitel, plainte [AFP - Stan Honda]

L'interview de Dominique Strauss-Kahn dimanche soir sur la chaîne TF1 a battu le record d'audience pour un journal télévisé en France depuis novembre 2005, en rassemblant plus de 13 millions de téléspectateurs, a annoncé lundi l'institut Médiamétrie.

La séquence du journal de 20h09 à 20h33, où l'ancien patron du Fonds monétaire international (FMI) a été interrogé par la journaliste Claire Chazal, a rassemblé 13'446'000 téléspectateurs, soit 47% de part d'audience, selon l'institut.

Nafissatou Diallo, une femme de chambre du Sofitel de Manhattan, accuse Dominique Strauss-Kahn de l'avoir contrainte à une fellation. Arrêté le 14 mai à New York, DSK a été inculpé d'agression sexuelle et de tentative de viol, avant de voir les charges contre lui abandonnées au pénal le 23 août. Nafissatou Diallo a intenté une procédure civile, qui est toujours en cours aux Etats-Unis.

agences/cab

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Tristant Banon répond sur Canal+

Tristane Banon a répondu lundi, par presse interposée, à Dominique Strauss-Kahn, qu'elle accuse d'avoir tenté de la violer.

La jeune femme a accordé sa première interview télévisée à Canal+ au lendemain de celle de DSK sur TF1, où l'ancien favori de la présidentielle a nié devant 13 millions de téléspectateurs toute tentative de viol.

"Pourquoi on ne nous croit jamais? Qu'est ce que j'ai à gagner à tout ça? Pourquoi j'en voudrais à Dominique Strauss-Kahn ?", a rétorqué Tristane Banon, 32 ans.

"Quand on accepte de faire enfin cette démarche de porter plainte, ce n'est pas normal qu'on vous crache dessus comme ça, ce n'est pas normal qu'on offre le JT vingt minutes, comme une rock star", à quelqu'un qui est "encore sous le coup de deux procédures dans deux pays", a regretté Tristane Banon.

Tristane Banon a prévenu qu'en cas de classement, elle déposerait une autre plainte, cette fois en se constituant "partie civile", ce qui entraînerait la désignation d'un juge d'instruction.

Réactions de la presse

La presse française critique lundi le flou des explications de Dominique Strauss-Kahn, son "égoïsme" et son manque de sincérité. Une intervention calibrée sur mesure par ses communicants, relève-t-elle.

Si Le Figaro regrette que le "débat passionnant entre Nicolas Sarkozy et Dominique Strauss-Kahn" n'ait pas lieu, Les Dernières nouvelles d'Alsace stigmatisent "l'égoïsme" de l'ancien directeur du FMI qui a "anéanti un avenir qui n'était pas seulement le sien pour '7 à 9' minutes de 'plaisir' officiellement 'précipité'."

Beaucoup d'éditorialistes, comme dans Libération, s'indignent de l'allusion faite par DSK à la thèse "abracadabrante" du complot. Selon Libération, DSK n'a pas évité "la maladresse, sinon le faux pas" en évoquant le complot "sans apporter l'once d'une preuve à cet invraisemblable scénario".

"DSK ! Formidable avocat de sa propre cause, il atteint alors au sublime dans le registre de l'honneur bafoué et du mari repenti" s'exclame le Progrès de Lyon qui lui décerne un tonitruant "Chapeau l'artiste, et un grand bravo aux communicants d'Euro RSCG."

Les grands quotidiens américains ont fait lundi de sobres comptes rendus de l'interview en s'en tenant essentiellement à rapporter ses déclarations.

Le Washington Post relève que, "à travers une interview de 20 minutes qui semblait avoir été très préparée, Dominique Strauss-Kahn a réussi à se présenter en homme contrit" même s'il "a souligné qu'il n'avait contraint aucune des femmes" ayant déposé plainte contre lui pour tentative de viol, la femme de chambre Nafissatou Diallou à New York et l'écrivain Tristane Banon à Paris.

Pour le New York Times, "Strauss-Kahn était mal à l'aise, parfois en colère et semblait amer". "Même si Dominique Strauss-Kahn a admis que son comportement avait été mauvais, il l'a fait les dents serrées. Les mots étaient pleins de regret mais le ton était combatif", ajoute le journal.