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Présidentielle en Russie: les enjeux d'un scrutin sans surprise

Une découpe en papier de Vladimir Poutine dans les rues de Moscou. [AFP - YURI KOCHETKOV]
Diffusion des clips de campagne des candidats à l’élection présidentielle en Russie / Le 12h30 / 1 min. / le 14 mars 2024
Vladimir Poutine, au pouvoir depuis près de 25 ans, est assuré de remporter un nouveau mandat de six ans lors d'une élection présidentielle sans opposition qui commence vendredi et durera trois jours. A la veille du vote, le président a appelé à aller voter pour exprimer "une position civile et patriotique".

Plus de 112 millions de Russes sont appelés aux urnes à partir de vendredi pour choisir leur nouveau président. Un scrutin sans surprise puisqu'il doit maintenir Vladimir Poutine au pouvoir jusqu'en 2030. Avec un mandat supplémentaire potentiel jusqu'en 2036 grâce à une modification sur mesure de la Constitution menée il y a quatre ans.

Organisé sur trois jours, du 15 au 17 mars, le scrutin se déroule alors que le président russe a multiplié récemment les satisfécits, auréolé de succès relatifs sur le champ de bataille ukrainien, notamment la prise de la ville-forteresse d'Avdiïvka. Parallèlement, l'économie russe résiste malgré une pluie de sanctions internationales.

A la veille du vote, Vladimir Poutine, 71 ans, a appelé les Russes à ne pas se "détourner du chemin" qu'il a fixé et à voter pour exprimer "une position civile et patriotique". "Il nous faut confirmer notre unité et détermination à aller de l'avant", a ajouté le président

Une élection sans opposition

Nikolai Kharitonov, candidat du Parti communiste russe à la présidentielle, aux côtés de ses partisans se rassemblent devant le monument de Karl Marx, le 23 février 2024. [AFP - NATALIA KOLESNIKOVA]
Nikolai Kharitonov, candidat du Parti communiste à la présidentielle, aux côtés de ses partisans devant le monument de Karl Marx, le 23 février 2024. [AFP - NATALIA KOLESNIKOVA]

Le Kremlin entend faire de cette élection une démonstration de la confiance de Vladimir Poutine qui jouit toujours d'un soutien d'une importante frange de la population. Le chef d'Etat a interdit de participation les opposants déclarés qui souhaitaient prendre part à l'élection. Ekaterina Dountsova et Boris Nadejdine ont ainsi été barrés du scrutin.

Outre le président sortant, seuls trois candidats ont été autorisés: le nationaliste Léonid Sloutski, le communiste Nikolaï Kharitonov et l'homme d'affaires Vladislav Davankov. Tous soutiennent l'attaque en Ukraine.

Selon l'opposition, les autorités disposent d'outils éprouvés pour obtenir les résultats électoraux attendus: trucage des votes, pressions sur des millions de fonctionnaires pour introduire le bon bulletin, voire, dans les territoires occupés en Ukraine, menaces et intimidations massives.

>> Lire aussi : Boris Nadejdine, l'homme qui veut défier Vladimir Poutine à la présidentielle

L'ombre d'Alexeï Navalny

Le Kremlin rejette ces accusations et assure que les autorités organiseront le type d'élections que "souhaite" le peuple russe. Il a aussi mis en garde contre toute "ingérence" occidentale.

Ioulia Navalnaïa, la veuve de l'ex-ennemi numéro un du Kremlin Alexeï Navalny, mort en prison en février, a elle appelé les électeurs à voter pour "n'importe quel candidat sauf Poutine" ou à invalider leur bulletin en y écrivant "Navalny" en grosses lettres.

Bien que l'issue du vote soit certaine, les autorités se sont investies pour pousser les Russes à se rendre aux urnes, en jouant sur la corde patriotique et en présentant le scrutin comme une étape essentielle vers la "victoire" en Ukraine.

Vladimir Poutine a enchaîné les apparitions médiatiques aux côtés des héros de "l'opération militaire spéciale", de jeunes Russes et de familles nombreuses, sans toutefois se soumettre à un quelconque débat électoral. Il a invoqué un emploi du temps "trop chargé".

>> Revoir l'émission Géopolitis consacrée à la Russie de Poutine :

Geopolitis
L’Histoire selon Poutine / Geopolitis / 26 min. / le 10 mars 2024

>> Lire aussi : En Russie, l'instrumentalisation de l'Histoire au service du pouvoir

Au pouvoir depuis 1999 et peut-être jusqu'en 2036

Vladimir Poutine, ancien lieutenant-colonel du KGB, a été nommé président par intérim par Boris Eltsine le 31 décembre 1999. Il a remporté l'élection présidentielle de 2000 avec 53% des voix et celle de 2004 avec 71,3% des voix. En 2008, Dmitri Medvedev s'est présenté à l'élection présidentielle et Poutine a occupé le poste de Premier ministre avant de remporter 63,6% des suffrages à la présidentielle de 2012, et 76,7% des suffrages à celle de 2018.

Vladimir Poutine a déjà été président plus longtemps que n'importe quel autre dirigeant russe depuis Staline.

La Constitution russe de 1993 prévoyait qu'un président ne pouvait effectuer que deux mandats de quatre ans consécutifs. Mais des amendements, en 2008, ont étendu le mandat présidentiel à six ans. Une nouvelle révision constitutionnelle, en 2020, a remis à zéro le nombre de mandats présidentiels effectués par Vladimir Poutine à partir de 2024, ce qui pourrait lui permettre de rester au pouvoir jusqu'en 2036. Il aurait alors 84 ans

>> Lire aussi : "Poutine 4.0" ou colosse aux pieds d'argile, les réactions à l'élection russe

Hélène Krähenbühl avec afp

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L'Ukraine appelle la communauté internationale à rejeter le résultat

L'Ukraine a appelé jeudi la communauté internationale à rejeter le résultat de la présidentielle russe, exhortant "les Etats étrangers et les organisations internationales à ne pas envoyer d'observateurs internationaux pour participer à une énième farce que le Kremlin fait passer pour une élection présidentielle" et à ne pas en "reconnaître les résultats".

"La dictature russe n'a depuis longtemps rien à voir avec la démocratie" et le président Vladimir Poutine "est au pouvoir depuis 24 ans, non pas par la libre expression de la volonté du peuple, mais par la manipulation de la Constitution", une "propagande totale" et la "destruction" de toute concurrence politique, assène le communiqué.

L'Ukraine, dont presque 20% du territoire dans l'Est et le Sud sont sous contrôle russe, a également appelé ses compatriotes vivant en occupation ou transférés en Russie à "ne pas participer à la pseudo-élection".