Modifié

Face à la menace d'une expulsion de Londres vers le Rwanda, les migrants affluent à Dublin

Les autorités irlandaises ont transféré environ 200 migrants à bord de cars vers des logements en dehors du centre de Dublin. [Reuters - Clodagh Kilcoyne]
En Irlande, une opération d'envergure pour démanteler un campement de demandeurs d'asile / La Matinale / 1 min. / le 2 mai 2024
Une vaste opération de démantèlement d'un campement de demandeurs d'asile a eu lieu mercredi dans le centre-ville de Dublin. L'adoption d'une loi permettant l'expulsion des migrants du Royaume-Uni vers le Rwanda semble pousser de nombreux migrants à se réfugier en Irlande.

Les demandeurs d'asile s'étaient établis dans des tentes à Mount Street, devant l'Office de la protection internationale, depuis que le gouvernement irlandais a cessé, il y a quelques mois, de leur fournir un hébergement, dans un contexte d'aggravation de la crise du logement et de montée du sentiment anti-immigration.

Les autorités irlandaises ont évacué les tentes et transféré environ 200 migrants à bord de cars vers des logements en dehors du centre de Dublin, afin qu'ils aient de meilleures conditions d'hébergement, avec des toilettes, des douches, des espaces intérieurs où se procurer de la nourriture. Selon les médias irlandais, plusieurs dizaines de migrants n'ayant pas réussi à monter dans les cars à temps se sont retrouvés sans abri mercredi soir, leur tente ayant été retirée.

Menace d'expulsion vers le Rwanda

Pour beaucoup de demandeurs d'asile, l'adoption d'une loi permettant l'expulsion des migrants vers le Rwanda a déclenché leur départ du Royaume-Uni. Selon la ministre de la Justice irlandaise Helen McEntee, 90% des arrivées récentes se sont faites par la frontière terrestre avec l'Irlande du Nord.

>> Lire aussi : Adoption au Royaume-Uni du projet controversé sur l'expulsion de migrants au Rwanda

L'adoption d'une loi permettant l'expulsion des migrants du Royaume-Uni vers le Rwanda semble pousser de nombreux migrants à se réfugier en Irlande. [AFP - Artur Widak - Anadolu]
L'adoption d'une loi permettant l'expulsion des migrants du Royaume-Uni vers le Rwanda semble pousser de nombreux migrants à se réfugier en Irlande. [AFP - Artur Widak - Anadolu]

Le gouvernement a précisé lundi que ce chiffre couvrait "l'année ou les deux dernières années" mais marquait un changement: jusque-là, les migrants arrivaient principalement dans les ports et aéroports irlandais, où ils demandaient l'asile. "Nous nous attendons à voir beaucoup plus de gens nous dire qu'ils étaient en Grande-Bretagne, mais qu’ils ont dû partir par peur d'être envoyés au Rwanda", estime Gary Daly, avocat qui défend l’accueil des migrants, dans La Matinale de la RTS.

"On est en sécurité nulle part", dénonce Pirsami, originaire de Turquie, qui a vécu dans une tente à Dublin pendant près d'un an. "Le plan Rwanda est raciste. Demander l'asile n'est pas un crime". "Le Rwanda n'est pas sûr", renchérit Lucas, un demandeur d'asile originaire du Nigeria, qui raconte avoir pris l'avion pour Belfast, en Irlande du Nord, avant de prendre un bus pour rejoindre Dublin.

Tensions avec le Royaume-Uni

Le Premier ministre irlandais Simon Harris, qui veut se montrer ferme face à l’immigration à l’approche de plusieurs élections, a averti dimanche que Dublin prendrait des mesures pour endiguer l'afflux, notamment en légiférant pour expulser les demandeurs d'asile vers le Royaume-Uni.

>> Lire aussi : Dublin veut légiférer pour renvoyer des migrants au Royaume-Uni

Mais pour Gary Daly, la situation ne sera pas aisée. "Une récente décision de la Haute cour de justice irlandaise considère la Grande-Bretagne comme un 'pays dangereux' vers lequel renvoyer les demandeurs d'asile, en raison justement de ce plan Rwanda", explique-t-il. "Cela va mettre le gouvernement irlandais dans une position très difficile."

Le sujet provoque en effet des tensions avec le Royaume-Uni. Londres a prévenu qu'il refuserait ces expulsions depuis l'Irlande, car, après le Brexit, les pays de l'Union européenne n'acceptent pas les demandeurs d'asile que le Royaume-Uni veut y renvoyer.

Selon des médias irlandais, une centaine de policiers vont être déployés à la frontière avec l'Irlande du Nord. Il n'y a pas de frontière physique entre la province britannique et l'Irlande, celle-ci ayant été supprimée en 1998 dans le cadre de l'accord de paix après les décennies de conflit sanglant en Irlande du Nord.

Sujet radio: Clémence Pénard

Adaptation web: Emilie Délétroz avec afp

Publié Modifié