Publié

Comment la Chine contrôle son image médiatique à travers le monde

L'art du soft-power chinois dans les médias du monde. [Keystone - Ng Han Guan]
L'art du soft-power chinois dans les médias / Tout un monde / 4 min. / le 26 juin 2020
La Chine développe sa présence médiatique hors de ses frontières. Elle a compris comment utiliser les médias étrangers pour façonner son image. Tout un monde est revenu sur cette stratégie jugée efficace par une étude.

La Chine n'a pas de paysage médiatique varié et libre mais elle sait très bien comment cela fonctionne ailleurs. Publi-reportages dans des quotidiens d'autres pays, investissements dans des médias étrangers et invitations de journalistes tous frais payés, Pékin a développé une stratégie d'influence. L'objectif est de faire raconter des histoire positives sur le pays, selon la formule du président chinois Xi Jinping.

Une étude de la Fédération internationale des journalistes publiée jeudi souligne l'efficacité de cette démarche. Dans deux tiers des 58 pays sondés, la visibilité médiatique de la Chine est croissante. Et les voyages de presse organisés par Pékin sont très largement perçus comme positifs.

La Chine cible particulièrement des pays en développement et ceux qui sont impliqués dans le grand projet d’infrastructures chinois des nouvelles routes de la soie. "Quand on lit les articles issus des voyage de presse, on est surpris de voir à quel point des journalistes chevronnés répètent simplement les éléments de discours qu'ils ont entendus", explique Louisa Lim, ancienne correspondante en Chine pour la BBC et NPR et coauteure du rapport.

L'exemple kenyan

Les auteures de cette étude relèvent le caractère nuancé et sophistiqué de cette approche très différente de la propagande communiste d’antan. Même si pour Pamela Morinière, responsable du département communication pour la Fédération internationale des journalistes, l’objectif reste similaire. "Je considère cela comme de la propagande. Après, la Chine veut montrer des choses qui fonctionnent bien chez elle. Mais la présence chinoise dans certains pays en développement et dans les directions de leurs médias est inquiétante. La Chine garde la main sur l'information qu'elle diffuse", souligne-t-elle.

Au Kenya, par exemple, l'Empire du Milieu est très présent dans le paysage médiatique. La chaîne satellitaire chinoise "StarTimes" est d'ailleurs basée dans ce pays. Les médias chinois sur place ont développé des plateformes de diffusion. Ils ont également amené des équipement et des studios perfectionnés.

Eric Oduor, secrétaire général de l’union des journalistes kenyans, se réjouit de ce développement tout en se méfiant de cette stratégie.  "Cela comporte aussi des désavantages. Il y a une crainte qu'à l'avenir l'information et les infrastructures soient dominées par les Chinois", relève-t-il.

La Chine n'est pas la seule

L'art du "soft power" chinois, cette capacité à influencer, n'est pas nouveau. Dès 1949, l’Agence de presse Xinhua diffusait des nouvelles en chinois, en anglais et en arabe. Disposant de correspondants dans la plupart des pays, elle a longtemps joué un rôle essentiel pour informer le monde sur l’évolution de la République populaire. Aujourd'hui, les sites chinois sont traduits en plusieurs langues et les positions officielles du Parti communiste sont diffusées dans le monde entier.

Ce type de développement médiatique n'est pas propre à la Chine. Des voyages de presse sont organisés par beaucoup de pays. La BBC est également présente au Kenya mais avec quelques différences. "Sur place, la BBC est composée de Kenyans. C'est une grande différence car ils gardent la main sur l'information et les contenus sont plus proche de la réalité et plus locaux", analyse Pamela Morinière.

Patrick Chaboudez / gpe

Publié