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"L'Algérie est en train de tourner la page de 57 ans de dictature"

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Abdelaziz Bouteflika renonce à un 5e mandat: interview d'Ali Benouari (vidéo) / La Matinale / 6 min. / le 12 mars 2019
Le président algérien Abdelaziz Bouteflika renonce à briguer un cinquième mandat, mais l'élection présidentielle est reportée. Pour l'ancien ministre Ali Benouari, il s'agit "d'enfumage" même si le pays est malgré tout à un tournant.

Dans un message à la nation publié lundi par l'agence officielle APS, Abdelaziz Bouteflika précise que la présidentielle aura lieu "dans le prolongement d'une conférence nationale" chargée de réformer le système politique et d'élaborer un projet de Constitution d'ici fin 2019.

>> Lire : Abdelaziz Bouteflika renonce à briguer un cinquième mandat en Algérie

"C'est de l'enfumage", s'insurge Ali Benouari, ancien ministre du Trésor (1991-1992) et candidat à la présidentielle algérienne de 2014, mardi dans La Matinale. "Pendant quelques instants, le peuple a cru qu'il avait gagné et que le pouvoir avait cédé (...) Et très vite, à la lecture du communiqué, il s'est rendu compte (...) Au fond, la proposition consiste à contourner l'échéance de l'élection présidentielle du 18 avril et à rester au pouvoir jusqu'à fin 2019 en proposant quelque chose d'absolument ahurissant, c'est-à-dire de conduire lui-même la transition politique."

"Le plus ahurissant, c'est qu'il ne va pas partir"

Mais ce double national algéro-suisse, établi depuis longtemps à Genève et qui reste très actif en politique, n'en parle pas moins de véritable tournant pour l'Algérie. "Le pays est en train de tourner la page de 57 ans de dictature. A l'indépendance, le pouvoir a été confisqué par l'armée, qui a instauré un régime dictatorial (...), avec en plus un acteur au centre de ce système qui est l'actuel président. Il était ministre en 1962, il est président de la république en 2019, et le plus ahurissant dans tout ça c'est qu'il ne va pas partir."

Une jeunesse algérienne sans aucune expérience

Et dans la difficile transition à venir, Ali Benouari espère pouvoir jouer un rôle, pour "apporter son expérience". C'est d'abord un devoir, dit-il, "parce que le pays est très jeune (...) et il faut voir que la jeunesse algérienne aujourd'hui n'a absolument aucune expérience des affaires, et encore moins d'expérience en politique. C'est un des gros risques de basculement si la génération à laquelle j'appartiens disparaît. D'ici une dizaine, une quinzaine d'années, c'est l'inconnu. Le peuple n'aura absolument aucune expérience."

Ali Benouari songe même, pourquoi pas, à une nouvelle candidature à la présidence "si la Constitution est révisée." Elle a en effet été modifiée en 2016 "pour empêcher que des candidats comme moi puissent concourir de nouveau", rappelle-t-il. "Cela exclut de fait la diaspora algérienne qui représente environ 20% de la population."

>> Ecouter la chronique d'Alain Franco sur l'opposant algérien Rachid Nekkaz :

Rachid Nekkaz, homme d'affaire et politicien franco-algérien. [Keystone - Mohamed Messara/ EPA]Keystone - Mohamed Messara/ EPA
C'est arrivé loin de chez vous - Rachid Nekkaz, le coup d'éclat permanent sur Facebook / C'est arrivé loin de chez vous / 2 min. / le 12 mars 2019

Propos recueillis par Romaine Morard/oang

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