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Tromperie sur la marchandise et dangers pour les utilisateurs sur la plateforme Temu

Faut-il se méfier de l'application Temu ?
Faut-il se méfier de l'application Temu ? / A bon entendeur / 12 min. / le 12 décembre 2023
Le géant mondial de la vente en ligne Temu propose des produits de toutes sortes à des prix défiant toute concurrence. D’après des tests réalisés par la RTS, certains articles ne respectent pas les normes de sécurité et d’autres ne correspondent pas à ce que le client pense acheter.

Il aura suffi d’une année au groupe chinois Temu pour devenir l’un des géants mondiaux de la vente en ligne. Lancé aux Etats-Unis en septembre 2022, le site devrait atteindre un chiffre d’affaires de 16 milliards de dollars (14 milliards de francs) cette année, selon les estimations de Reuters.

Cette croissance ahurissante passe aussi par la Suisse. Temu y est disponible depuis le mois de juin dernier et caracole en tête des applications les plus téléchargées depuis.

D’après des tests réalisés par la RTS, certains articles de la plateforme Temu ne respectent pas les normes de sécurité et d’autres ne correspondent pas à ce que le client pense acheter. [Keystone - Laurent Gillieron]
D’après des tests réalisés par la RTS, certains articles de la plateforme Temu ne respectent pas les normes de sécurité et d’autres ne correspondent pas à ce que le client pense acheter. [Keystone - Laurent Gillieron]

L’émission A Bon Entendeur de la RTS y a acheté une série d’articles à des prix dérisoires parmi lesquels: un bracelet censé faire perdre du poids à 57 centimes, un rasoir avec 36 lames pour 1,99 franc, une "veste en cuir" à 25,98 francs, un gilet de sauvetage pour enfant à 5,07 francs ou encore un casque de vélo à 9,57 francs.

Certains de ces produits ont ensuite été analysés en laboratoire et les résultats obtenus sont inquiétants.

Des articles dangereux et trompeurs

Le "gilet de sauvetage" pour enfant ne respecte ainsi pas les normes de sécurité et présente un danger car il s’ouvre trop facilement - un problème également détecté pour une ceinture de natation pour enfant.

La fixation arrière du casque à vélo a pour sa part lâché lors du test. Le casque acheté sur Temu n'est donc pas conforme non plus aux normes en vigueur, pas plus que les lunettes de protection achetées sur le site au prix de 1,48 franc. Elles ne protègent pas du tout les yeux et ont littéralement éclaté lors du test de résistance aux projections.

Au niveau des bijoux, les résultats interpellent également. Un pendentif payé 35 centimes contient ainsi 26% de cadmium, un métal lourd très toxique qui peut provoquer de fortes allergies et, en cas de forte accumulation dans le corps, peut entraîner des problèmes de santé.

La teneur maximale en cadmium admise en Suisse est en conséquence limitée à 0,01% pour les bijoux. Le pendentif acheté chez Temu est donc totalement en dehors de ce qui est admissible.

>> Lire aussi : La boutique en ligne Temu retire des jouets jugés dangereux de la vente en Suisse

L’expérience de la RTS a aussi mis au jour des cas de tromperie du consommateur. L’article présenté par Temu comme une "veste en cuir" et vendu à 25,98 francs n’est pas en cuir mais en polyester. Même constat avec des chaussures dont l’une des parties prétendument en cuir n’est en fait composée que de matériaux synthétiques.

"Place de marché"

Interrogé sur les résultats désastreux de ce test, Temu répond: "Tout d’abord, nous tenons à vous remercier d'avoir attiré notre attention sur ces produits. Nous apprécions la surveillance exercée par tous les secteurs de la société, y compris les médias, et nous apprécions le retour d'information car celui-ci nous aide à nous améliorer et à mieux répondre aux attentes de nos clients."

Temu indique par ailleurs être une "place de marché". Autrement dit, elle impute la responsabilité de la qualité et du respect des normes des produits vendus sur son site aux vendeurs qui l’utilisent. "Comme place de marché, il est aussi obligatoire de respecter les normes", précise toutefois Karola Krell Zbinden.

Pour cette avocate spécialisée dans la sécurité des produits, il est par ailleurs pratiquement impossible pour le consommateur de se retourner contre une plateforme de ce genre en cas de problème avec un produit.

"Ils délèguent la responsabilité aux fabricants et vous donnent l’adresse du fabricant qui se trouve en Chine et en tant que consommateur, vous avez le droit de vous retourner contre le fabricant", explique-t-elle. Mais une telle procédure est si coûteuse et complexe qu'il est pratiquement impossible d’obtenir gain de cause.

Temu précise de son côté qu'en cas d’accident causé par un produit vendu sur son site, "les clients peuvent nous contacter et nous travaillerons avec nos vendeurs pour trouver une solution satisfaisante".

Stéphane Fontanet, François Egger, Linda Bourget

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