Publié

Les réunions inutiles pourraient coûter 32 milliards aux entreprises en 2019

Les Suisses passent en moyenne 5h en réunion par semaine. Coût de ces réunions 32.5 milliards de francs.
Les Suisses passent en moyenne 5h en réunion par semaine. Coût de ces réunions 32.5 milliards de francs. / 19h30 / 2 min. / le 29 janvier 2019
Les salariés suisses passent en moyenne 5h par semaine en séance, alors que deux réunions sur trois sont totalement inutiles, selon une étude parue en janvier. Le coût total pour l'économie s'élèverait à 23 milliards de francs.

Les réunions de travail durent parfois longtemps, très longtemps. Les Suisses sont même les champions des séances, à en croire une étude réalisée en janvier par Doodle, le site web de la planification.

Les 6500 salariés interrogés en Suisse, en Allemagne, en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, passent en moyenne trois heures par semaine en séances. Soit deux heures de moins qu'en Suisse, où ces réunions occupent cinq heures hebdomadaires.

"Une heure par jour, ce n'est pas excessif. Les Suisses sont champions du monde de la qualité. Et la qualité, ça se discute et cela explique en grande partie notre succès dans l’innovation", affirme à la RTS Vincent Blanc, directeur de la société de consulting Ismat Group.

Séances mal organisées

Selon lui, l'important n'est pas de compter les heures de réunions, mais la qualité de celles-ci et ce qui en ressort. C'est lorsqu'elles sont mal organisées que ces réunions ont une incidence sur le travail des employés. Ces derniers n'ayant pas pu avancer sur leurs dossiers devront donc rattraper leur retard. On parle alors de réunionite, voire réunionite aiguë.

"La réunionite, c'est le moment où les collaborateurs ne s'identifient plus à ces temps investis, parce qu'ils ne voient pas leur rôle et ne comprennent pas en quoi ces séances les font progresser", développe Vincent Blanc.

Les résultats de l'étude sont inquiétants: deux tiers de ces réunions sont considérées comme superflues et constituent une perte de temps.

L'effet psychologique qui en résulte pour les travailleurs peut s'avérer dramatique: perte de sens au travail (brown out), mais aussi facteur de stress. "La multiplication de séances et le manque de temps pour faire face au reste du travail peut être un des facteurs de burnout", selon Sarah Bertschi, spécialiste en prévention des risques psychosociaux.

Le principal coût d'une entreprise

Outre le coût humain, le fait d'occuper un nombre important de personnes assises autour d'une table, sans objectif précis et où aucune décision n'est prise, représente un coût financier important. Dans le monde, la facture totale s'élèverait à près de 540 milliards de francs. Mais c'est en Suisse que le coût des réunions mal organisées se ressentirait le plus fortement, selon l'enquête de Doodle: 46% des professionnels les voient comme le principal coût pour leur organisation.

Face à ce fléau, des sociétés de consulting se sont même spécialisées dans l'aide à l'organisation des séances, comme Sherpany, qui définit ses consultants comme des docteurs de la réunionnite: "Bien souvent, ces réunions ont lieu, parce qu'on a toujours fait comme ça", explique Mathias Brenner, cofondateur de la société. Ses équipes mandatées chez leurs clients ont thématisé une dizaines de facteurs menant à des réunions inéficaces. Une fois la cause du cauchemar identifiée, des règles pourront être définies afin d'améliorer ces réunions.

Mais pas question pour autant de cesser ces moments de communion. "Les réunions, lorsqu'elles sont bien menées, sont importantes car elles remplissent des fonctions de coordination, mais aussi des fonctions symboliques, politiques ou sociales", souligne Mathias Brenner.

Des alternatives aux réunions traditionnelles

Pour sortir du carcan des séances traditionnelles, certaines entreprises ont trouvé des astuces afin d'en limiter la durée. Dans la société vaudoise de e-commerce Qoqa.ch, par exemple, les séances se passent debout. Elles sont minutieusement préparées et sont chronométrées à 7 minutes au maximum.

"On peut voir les bénéfices de cette méthode, parce qu'on va droit au but et on ne perd plus de temps inutile dans des meetings à rallonge", explique Pascal Meyer, directeur de Qoqa.ch.

Sa méthode commence à faire référence en Suisse romande. "Beaucoup d'entreprises viennent voir notre façon de fonctionner. On a reçu par exemple une partie du Gouvernement jurassien, des petites start-up et aussi des grandes entreprises avec des structures pyramidales, qui veulent changer de dynamique", souligne Pascal Meyer.

Une véritable réflexion est en cours pour rendre les réunions plus efficaces. Il y a les réunions debout, mais aussi les séances en marchant ou encore dos au mur en faisant la chaise. Des astuces qui limitent à coup sûr la durée des rencontres.

Jeff Bezos, le PDG d'Amazon, propose quant à lui des réunions avec deux pizzas censées nourrir tout le monde. Une règle destinée à limiter le nombre de participants.

Feriel Mestiri et Estelle Braconnier

Publié