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A la COP24, le manque d'accord sur le négoce du droit de polluer impacte la Suisse

Pour remplir ses objectifs de réduction d'émission de CO2, la Suisse compte sur les achats de certificats à l'étranger.
Pour remplir ses objectifs de réduction d'émission de CO2, la Suisse compte sur les achats de certificats à l'étranger. / 19h30 / 1 min. / le 16 décembre 2018
Un chapitre important des règles adoptées samedi par la 24e Conférence climat de l'ONU reste en suspens: celui des achats de certificats d'émissions à l'étranger, indispensables à la Suisse pour tenir ses engagements. Il sera discuté dans un an.

Acheter des certificats d'émission à l'étranger permet actuellement de réduire au niveau national ses émissions de gaz à effet de serre. Réguler ce marché carbone était au programme de la COP24, mais la décision a été reportée à la prochaine COP25 au Chili, prévue fin 2019.

C'est toute la question du négoce du droit de polluer qui est en jeu, et la Suisse est directement concernée. Aujourd'hui 40% des réductions d'émissions de CO2 annoncées par le Conseil fédéral sont basées sur l'achat de certificats d'émissions à l'étranger.

Le conseiller national PLR genevois Benoît Genecand ne s'alarme pas de ce report de régulation à l'année prochaine: "Cela signifie que le processus est sérieux. Je préfère ça à un accord bâclé, où tout le monde fait semblant d'avoir atteint son objectif. Et où les pays qui vont vendre ces certificats vont en réalité aussi les déduire eux-même", affirme-t-il dimanche au 19h30.

Le double comptage divise

La dernière version du texte autorisait effectivement un double comptage des mêmes réductions de CO2, chez l'acheteur et chez le vendeur. Une position défendue notamment par le Brésil.

La Suisse a défendu une position opposée. Interrogé dans l'émission Forum, Franz Perrez, négociateur pour la Suisse à la COP24, avoue sa déception face au manque d'accord sur ces règles de compensation sur le marché international: "C'est un travail qui nous attend l'année prochaine."

Le chef de la délégation suisse dit avoir tout fait pour éviter l'adoption de règles "très mauvaises, qui auraient permis à certaines réductions d'émissions d'être comptabilisées par deux pays à la fois. Comme Doris Leuthard l'a dit, c'est mieux de ne pas encore avoir de règles, d'attendre et de continuer le travail plutôt que d'adopter des règles problématiques."

>> Ecouter la réaction de Franz Perrez, négociateur pour la Suisse à la COP24, dans l'émission Forum :

Dominique Bourg, philosophe, professeur UNIL, auteur de Une nouvelle terre. Pour une autre relation au monde (Desclée De Brouwer, 2018). [DR]DR
Le monde politique est-il incapable de répondre à l'urgence climatique? / Forum / 11 min. / le 16 décembre 2018

Balayer devant sa porte

Ce manque de règles pourrait donc avoir des effets sur la politique climatique de la Suisse. Pour Manuel Graf, responsable politique au WWF Suisse, il faut agir au plus vite, et autrement. "Aujourd'hui, il y a de fortes chances que ce marché des certificats soit au final mal régulé, ou pas régulé du tout. Et les politiques suisses doivent en tirer les conséquences. C'est-à-dire investir davantage dans les entreprises, la technologie et les emplois locaux, plutôt que de compter sur l'achat de certificats à l’étranger", estime-t-il au 19h30.

Une position que soutient également Roger Nordmann, conseiller national (PS/VD), au micro de la RTS. Selon lui, il est temps de balayer devant notre porte et de se donner les moyens de moins polluer chez nous, "plutôt que d'attendre qu'on se mette d'accord sur un système de trafic d'indulgence pour réduire les émissions dans d'autres pays plus pauvres qu'en Suisse".

La conférence de Katowice influence aujourd'hui le débat climatique suisse déjà ouvert au Parlement. La révision de la Loi sur le CO2 qui fixe les objectifs 2030 pour la Suisse vient d'être transmise au Conseil des Etats, après avoir échoué devant le National cette semaine.

Estelle Braconnier, Feriel Mestiri, Mouna Hussein

>>Pour Natalie Bougeard, envoyée spéciale de la RTS à Katowice, la COP 24 est un pas important, mais reste insuffisant pour le climat:

Pour notre envoyée spéciale à Katowice, la COP 24 est un pas important, mais insuffisant sur le climat.
Pour notre envoyée spéciale à Katowice, la COP 24 est un pas important, mais insuffisant sur le climat. / 19h30 / 1 min. / le 16 décembre 2018

>> Revoir également le sujet du 19h30 qui explique comment la COP 24 s'est achevée sur un compromis :

La COP 24 s'achève sur un compromis qui permet d'appliquer l'Accord de Paris sur le climat.
La COP 24 s'achève sur un compromis qui permet d'appliquer l'Accord de Paris sur le climat. / 19h30 / 2 min. / le 16 décembre 2018
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