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Neuchâtel innove avec des studios pour l'insertion de jeunes en rupture

La jeune Chloé (prénom fictif), avec les éducateurs de La Batoude, Pierre-Alain Grandola et Véronique Kistler. [RTS - Valérie Eschler]
Ici la Suisse - "La Batoude", un projet pour les mineurs en situation de rupture familiale / Ici la Suisse / 5 min. / le 22 mars 2019
Dans le canton de Neuchâtel, les jeunes en rupture familiale bénéficient désormais d'une mesure supplémentaire pour leur insertion. La Batoude, projet lancé en janvier, vise à les rendre autonomes dans leur propre appartement.

Quelles solutions apporter aux jeunes mineurs en rupture familiale, parfois en fugue, et qui refusent d'être placés en foyer? C'est une question que de nombreux cantons se posent. Depuis janvier, Neuchâtel offre une alternative à ces jeunes, avec la mise sur pied de son projet intitulé La Batoude.

Géré par la fondation Carrefour - qui offre différents types d'accompagnements éducatifs ambulatoires - il vise à placer des adolescents de 16 ans et plus dans leur propre appartement.

Car le canton, qui a décidé l'année dernière de limiter les placements en institution, a pris des mesures pour permettre aux jeunes de rester dans un cadre familial. Mais parfois, cela s'avère impossible. Neuchâtel a donc décidé de suivre l'exemple du Tessin, où la fondation Amilcare a lancé un projet similaire il y a une dizaine d'années.

Rendre les jeunes autonomes

L'objectif est de rendre ces jeunes autonomes et d'éviter à terme qu'ils aient recours à l'aide sociale. Le projet place le jeune au centre: travailler, reprendre des études, choisir son lieu de vie et son studio, c'est lui ou elle qui décide et qui fixe ses priorités, encadré par deux éducateurs. Le projet neuchâtelois concerne pour l'heure quatre jeunes, qui bénéficieront du soutien de La Batoude pendant 24 à 36 mois.

Les deux éducateurs, Pierre-Alain Grandola et Véronique Kistler, rencontrent les jeunes une fois par semaine au moins. Parmi eux, Chloé (prénom fictif), 17 ans, a fugué de chez elle en juillet dernier et vit en ce moment chez des connaissances.

"Pour l'avenir, j'ai besoin de personnes qui m'aident", affirme la jeune femme. "Seule, ce serait beaucoup plus compliqué, par exemple au niveau financier ou pour me loger."

Vivre en foyer n'est pas une alternative pour elle. "Cela m'enfermerait, me ferait plier à des ordres et à des horaires: je n'en veux pas, car je n'en ai pas besoin", explique-t-elle.

Gérer un budget

Les éducateurs présentent au jeune le budget des prestations qu'ils doivent assurer eux-mêmes. "Ce n'est pas facile pour eux de repérer tout ce qu'il y a comme charges. L'idée est qu'ils puissent financer tous les postes: c'est là qu'on peut vraiment parler d'autonomie et de liberté", explique Pierre-Alain Grandola.

Les jeunes, une fois seuls dans leurs appartement, ne risquent-ils pas de sombrer, de baisser les bras? "La mise en danger de ces jeunes est déjà derrière eux. Habiter dans un studio leur permet justement de s'écarter de ces dangers", soutient Véronique Kistler. "Ils doivent se débrouiller en partie seuls, mais ils peuvent s'appuyer sur nous 365 jours par année, 24 heures sur 24. Cela devrait leur permettre de faire face aux choses les plus importantes ou urgentes", renchérit son collègue.

Décrocher un logement

Dans la démarche, l'un des défis est également de convaincre les propriétaires d'accepter de louer un appartement à ces jeunes. La Batoude s'attelle depuis le début de l'année à se faire connaître, à rassurer gérances et propriétaires, car les contrats de locations sont établis au nom de la fondation et le paiement du loyer est garanti.

Pourtant, juste après ce reportage, Chloé a appris que son dossier n'avait pas été retenu pour le studio qu'elle visait.

La Batoude suivra quatre jeunes de plus dès cet été. Le budget de la mesure se monte à environ 600'000 francs pour 2019. Le projet intéresse également d'autres cantons romands, notamment le Valais.

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Valérie Eschler/kkub

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