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Deux figures de l’UDC genevoise condamnées pour avoir escroqué leur parti

L'UDC genevois arnaqué par deux de ses élus
Deux figures de l’UDC genevoise condamnées pour avoir escroqué leur parti / Forum / 3 min. / le 10 février 2022
La présidente du Parlement du Grand-Saconnex (GE) et un député du Grand Conseil genevois ont été reconnus coupables d’escroquerie et de faux dans les titres, a appris la RTS. Aux côtés d’un troisième élu, ils ont dû quitter leur parti, l’UDC, tout en conservant leurs mandats électifs. La présidente du Parlement communal vient toutefois de démissionner.

Une affaire d’escroquerie touche l’UDC genevoise, selon les informations de la RTS. Deux personnalités du parti, élus au Grand-Saconnex et au Grand Conseil genevois, se retrouvent condamnées pour ne pas avoir suffisamment rétrocédé de jetons de présence à leur parti cantonal. Le préjudice excéderait les 20'000 francs.

Pour ce faire, elles ont fabriqué, aux côtés d’un troisième élu, de faux documents de la commune du Grand-Saconnex. Celle-ci a dénoncé les faits à la justice en mars 2021.

En septembre, le Ministère public genevois a reconnu les trois élus coupables d’escroquerie et de faux dans les titres. Ils écopent chacun de 90 jours-amendes avec sursis ainsi que d’une amende de 500 francs. Les ordonnances pénales, que s’est procurée la RTS, n’ont pas été contestées.

Documents falsifiés

A l'UDC-Genève, les élus locaux doivent rétrocéder au parti entre 25 et 30% de leurs rémunérations politiques, par exemple, quand ils siègent au Parlement. Or, les montants que ces trois élus ont présenté au parti pour l'année 2020 paraissaient étrangement faibles. La direction de l'UDC genevoise a alors enquêté.

Les trois intéressés ont alors fourni à leur parti cantonal des décomptes de jetons de présence, munis d'une entête de la commune du Grand-Saconnex. Ces documents se sont révélés être des faux. La mairie du Grand-Saconnex a alors dénoncé les faits à la justice. "Nous avons interpellé le Ministère public tout début mars après avoir consulté notre avocat conseil qui nous a confirmé qu’il pouvait s’agir d’une infraction pénale poursuivie d’office et que la commune avait dès lors l’obligation de dénoncer", explique le maire Michel Pomatto.

Coactivité

De son côté, l’UDC-Genève porte plainte en mai. "Dès que nous avons eu connaissance des faits, nous nous sommes immédiatement portés parties plaignantes", précise sa présidente Céline Amaudruz. Dans un premier temps, le trésorier du parti estime à environ 11’000 francs le dommage subi. Mais dès le mois de juillet, ce chiffre augmente: le parti réclame aux trois élus plus de 20’000 francs. Un montant contesté par les intéressés, qui ont, malgré tout, commencé à rembourser leur dû.

Le 24 septembre dernier, le Parquet rend trois ordonnances pénales, signées du premier procureur Stéphane Grodecki. Les trois élus sont reconnus coupables d'escroquerie et de faux dans les titres. "Ces infractions ont été réalisées sous forme de coactivité, dans la mesure où chaque protagoniste a agi de concert avec l'autre, c'est-à-dire en s'associant et en participant pleinement et sans réserve à la décision, l'organisation et la réalisation de l'infraction", écrit le magistrat.

Tromper l’UDC

Pourquoi ont-ils agi ainsi ? Les trois protagonistes sont restés injoignables jeudi. Mais ils se sont expliqués devant la justice. En somme, ils éprouvaient une certaine rancœur envers leur parti. Une rancœur liée au montant de la rétrocession des jetons de présence ou encore au financement d'une campagne électorale.

Personnellement, l’un des condamnés "rencontrait des problèmes financiers depuis très longtemps", apprend-on dans les ordonnances pénales. "Il reconnaissait avoir commis une faute grave en utilisant les armoiries de la commune. Il regrettait et essayait de trouver un arrangement avec l'UDC-Genève." Le but était effectivement de tromper leur parti cantonal, avouent-ils.

Départ d’un commun accord

Aujourd’hui, plus aucun des trois élus condamnés n’est membre de l’UDC genevoise. La présidente du parti Céline Amaudruz a indiqué à la RTS avoir trouvé un compromis pour un départ au 31 décembre. Il faut dire que deux des trois condamnés sont des figures du parti. Ils ont été membres du comité directeur durant plusieurs années et ont fondé la section du Grand-Saconnex. Ils ont aussi des fonctions au niveau cantonal, l'un étant député, l'autre députée suppléante. Cette dernière est également membre de l'exécutif d'une confrérie qui réunit à peu près tout ce que Genève compte comme élus.

"Ces comportements sont incompatibles avec les valeurs de notre parti", souligne la conseillère nationale. "C’est pourquoi nous avons estimé que ces trois élus ne pouvaient plus siéger sous notre bannière. Nous avons essayé de trouver la meilleure solution pour toutes les parties. C’est d’un commun accord que nous avons décidé de nous séparer. J’estime que nous avons été exemplaires dans cette affaire."

Démissions

Leur départ de l'UDC a été acté au Grand Conseil genevois, fin janvier. Mais chacun continue de siéger. D'ailleurs, la dernière séance du Parlement du Grand-Saconnex, lundi, a donné lieu à un drôle de spectacle. La présidente a pu diriger les débats comme si de rien n'était. Aucune communication n'a eu lieu sur cette affaire: ni sur les condamnations, ni sur les démissions de l'UDC.

Mais semble-t-il que la médiatisation de l'affaire a changé la donne: le poste de présidente du Parlement du Grand-Saconnex est désormais vacant. Sa titulaire a donné sa démission ce jeudi après-midi, selon les renseignements de la RTS. Et désormais les trois élus condamnés siègent en indépendants. De son côté, le député condamné a lui aussi remis sa démission au président du Grand Conseil.

Raphaël Leroy/kkub/boi

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