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La promiscuité dans les avions inquiète, mais les compagnies sont dans leurs droits

La promiscuité dans les avions inquiète les passagers
La promiscuité dans les avions inquiète les passagers / 19h30 / 2 min. / le 18 mai 2020
Confiner plusieurs dizaines de passagers dans un espace clos en pleine pandémie de coronavirus. Voilà une situation qui inquiète plus d'un voyageur. Les compagnies aériennes ne sont pas obligées de laisser un siège inoccupé entre les passagers, mais les experts tentent de rassurer.

Des images de passagers serrés dans un avion plein se partagent depuis plusieurs jours sur les réseaux sociaux. La plupart d'entre eux pensaient sans doute avoir un siège vide à côté d'eux, afin de garantir la fameuse distance sociale de 2 mètres avec son voisin.

Jean-Christophe Babin, directeur général de l'entreprise de luxe Bulgari, dénonce lundi au 19h30 les conditions de vol à bord d'un avion de Swiss effectué la semaine dernière entre Londres et Genève.

"J'ai été très choqué de me retrouver dans l'avion d'une compagnie de très bonne réputation et, contrairement à ce que j'ai pu entendre dans les médias, je me suis retrouvé avec un avion plein, sans aucun respect des distances de sécurité. La plupart des gens étaient assis côte à côte, avec comme seule protection un petit masque chirurgical. J'ai trouvé ça choquant, d'autant plus qu'on n'était pas prévenus", affirme le patron d'entreprise.

Comble de l'absurde, selon lui, les consignes de sécurité et de distance sociales sont parfaitement respectées dans les aéroports, avant l'embarquement aussi bien qu'à l'arrivée.

Si rien ne change, l'homme d'affaires avertit que lui et ses collaborateurs cesseront de voyager "pendant des mois, voire des années s'il le faut. Parce qu'avec Zoom, on arrive très bien à gérer nos entreprises".

Des filtres à air comme au bloc opératoire

Contactée, Swiss n'a pas souhaité accorder d'interview devant nos caméras. Mais la compagnie indique par écrit que depuis le 4 mai, elle demande aux passagers de porter un masque tout au long du voyage si la distance ne peut pas être respectée. "La règle consistant à garder le siège voisin libre en classe économique ne s'applique donc plus puisque le port d'un masque facial offre une protection suffisante", justifie la compagnie.

Cette dernière précise aussi que les nettoyages ont été intensifiés sur toutes les surfaces touchées par les voyageurs, comme les ceintures de sécurité.

"Tous les avions de SWISS sont équipés de filtres à air ultra-performants garantissant une qualité d'air comparable à celle d'un bloc opératoire et induisant une circulation verticale de l'air au lieu d'une distribution dans la cabine", explique la compagnie, tout en soulignant qu'aucun cas d'infection n'a été détecté sur ses vols depuis le début de la pandémie.

Comme dans un train aux heures de pointe

Pour l'Office fédéral de la santé publique (OFSP), les conditions dans les avions sont jugées conformes aux recommandations suisses, à savoir de porter un masque lorsque les distances sociales de 2 mètres ne peuvent être respectées. "C'est la même situation que dans les trains aux heures de pointe", affirme Virginie Masserey, cheffe de la section contrôle de l'infection à l'OFSP.

Sur le plan international, des discussions sont en cours pour mettre en place un concept de protection des voyageurs. "La Suisse s'y alignera", précise Virginie Masserey.

En attendant, elle tente de rassurer les voyageurs: "Lorsque les premiers cas de coronavirus sont arrivés en Europe par avion, nous avons fait des "contact tracing" des passagers assis à côté des personnes infectées. Nous n'avons trouvé aucune transmission dans les avions".

Enjeu majeur pour les compagnies

Mais tous les passagers ne sont pas rassurés. En témoigne, cette scène filmée récemment à bord d'un vol Iberia entre Madrid et Las Palmas:

Pourquoi donc avoir supprimé la règle consistant à garder un siège de libre? Philippe Berland, directeur du cabinet de conseil Sia Partners, en charge du secteur aérien, ne pense pas que les compagnies sacrifient la sécurité des passagers pour privilégier la rentabilité.

Au contraire. Rassurer les voyageurs est devenu un facteur vital pour tout le secteur: "Si la crainte est trop forte de prendre l'avion et qu'il n'y a plus de passagers, cela va devenir un réel problème pour les compagnies aériennes. Donc c'est un enjeu majeur pour elles de répondre à cette crainte et d'y répondre très concrètement."

La Commission européenne doit présenter prochainement des mesures harmonisées tant pour les aéroports que pour les compagnies, avec notamment le traçage des passagers.

Gabriel de Weck et Feriel Mestiri

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