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Comment les néo-banques partent (aussi) à la conquête de la Suisse

Les néo banques, c'est-à-dire les banques sans guichet au bout du smartphone attaquent la Suisse. Reportage à Berlin.
Les néo banques, c'est-à-dire les banques sans guichet au bout du smartphone attaquent la Suisse. Reportage à Berlin. / 19h30 / 3 min. / le 18 octobre 2019
Nées il y a à peine quatre ans, les banques en ligne - ou néo-banques - comptent déjà des millions de clients. Elles s'attaquent désormais au marché helvétique, en ciblant tout particulièrement les jeunes actifs.

Exemple de ces nouveaux établissements qui n'ont plus pignon sur rue, la banque N26 est basée à Berlin pour conquérir le monde. Elle n’existe que depuis un peu moins de quatre ans mais compte déjà plus de 3,5 millions de clients. C'est l'équivalent de Raiffeisen, troisième groupe bancaire de Suisse, qui existe depuis 150 ans.

Avec cette banque 100% mobile, il n'y a plus de guichet: les clients pilotent tout depuis leur smartphone, sans frais d’ouverture ou de gestion de compte, et avec des commissions de change quasi inexistantes.

"Vous avez votre agence dans votre poche, parce que c'est votre téléphone mobile", explique le directeur général de N26 pour la France Jérémie Rosselli, vendredi dans le 19h30. "Vous pouvez ouvrir un compte même un dimanche après-midi depuis chez vous, il n'y a plus aucune paperasse."

Et cette banque ne compte pas s’arrêter là, elle propose déjà d’autres services purement bancaires comme des crédits à la consommation et envisage d'élargir sa palette avec de l'épargne ou de l'investissement.

La jeune clientèle en ligne de mire

Aujourd’hui, N26 compte 1500 employés. Elle est active dans 26 pays - dont la Suisse depuis peu. 20'000 clients helvétiques y étaient en liste d’attente malgré le fait que les comptes sont uniquement en euros.

"Nous observons qu’il y a beaucoup de jeunes en Suisse ayant des attentes élevées en termes de banque en ligne", explique le fondateur et CEO de N26 Maximilian Tayenthal. "Nous avons regardé l’offre des banques traditionnelles et nous avons constaté qu’elles ne fournissent pas un service à la hauteur. En plus, leurs commissions sont élevées."

La réaction des banques traditionnelles

Ces banques 4.0 ambitieuses, à l’image également de Revolut, commencent à tondre la laine des banques classiques. Credit Suisse, par exemple, a décidé d’investir des centaines de millions de francs dans ces nouvelles technologies, notamment pour capter les jeunes actifs.

"C'est vrai qu'aujourd'hui, les jeunes interagissent quasi exclusivement avec leur smartphone, avec une tablette ou avec l'ordinateur", constate Christian Steinmann, directeur régional "Wealth management clients" chez Credit Suisse. "La probabilité qu'un jeune entre dans une succursale traditionnelle pour ouvrir un compte est aujourd'hui quasiment nulle. C'est la raison pour laquelle on doit avoir une offre digitale globale, conviviale."

Pour Michael Desforges, Chargé de cours MAS in Banking & Finance IFSB, ces néo-banques vont disrupter l’univers bancaire à la manière d’Uber pour la corporation des taxis. "Ces néo-banques ont été créées par des anciens clients mécontents des banques traditionnelles", souligne-t-il. "La plupart avaient comme idée qu'on pouvait faire mieux, donner une expérience client beaucoup plus riche et beaucoup plus simple à ses clients."

Des comptes bloqués depuis des mois

Mais il y aussi un revers à la médaille, avertit cet observateur du monde financier. "Quand une opération ne passe pas ou est bloquée, que votre compte est bloqué, vous n'avez pas affaire à un conseiller qui peut négocier avec vous mais à un algorithme. Et lui ne discute pas. Vous avez des cas dramatiques de gens qui ont leur compte bloqué depuis plusieurs mois et qui ne peuvent rien faire pour récupérer leur argent."

Malgré tout, N26 vise à moyen terme 50 millions de clients. Mais pour l'heure, elle n’est toujours pas rentable même si sa la base de clientèle double tous les six mois.

Philippe Lugassy/oang

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