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Maurice Papon, symbole de Vichy, est mort

Le passé de l'ex-haut responsable de Vichy l'avait rattrapé
Le passé de l'ex-haut responsable de Vichy l'avait rattrapé
Maurice Papon est mort samedi après-midi à l'âge de 96 ans dans une clinique près de Paris, a indiqué une source policière. Il a été le seul responsable du régime de Vichy condamné pour son rôle dans la déportation des juifs.

Condamné en 1998 à dix ans de réclusion, en fuite en 1999, il a
été incarcéré pendant près de trois ans avant d'être remis en
liberté en raison de son état de santé.



Il résidait depuis dans sa ville natale en grande banlieue
parisienne, où il était suivi pour des problèmes cardiaques.

Insuffisance cardiaque

Maurice Papon avait été hospitalisé le jeudi 8 février pour une
insuffisance cardiaque et avait subi une intervention chirurgicale
mardi dernier. "Maurice Papon est mort samedi 17 janvier 2007 à 16
heures", a précisé son avocat, soulignant que "l'ancien ministre
n'a jamais accepté sa condamnation du 2 avril 1998 par la Cour
d'assises de Bordeaux" (sud-ouest).



Tour à tour serviteur du régime de Vichy et de Charles de Gaulle,
ministre sous Giscard d'Estaing, Maurice Papon avait connu un
brillant parcours de haut fonctionnaire avant d'être rattrapé par
son passé sous l'Occupation.



Né le 3 septembre 1910 à Gretz-Armainvilliers (Seine-et-Marne),
Maurice Papon avait effectué à Paris un cursus universitaire des
plus classiques -licence de droit, Institut des sciences
politiques, certificat de psychologie et de sociologie- qui l'a
conduit à des responsabilités dans la haute fonction publique.

Chargé des questions juives, il passe à la Résistance

Après avoir réintégré le ministère de l'Intérieur à Vichy, il
est nommé, en juin 1942, secrétaire général de la préfecture de la
Gironde, chargé des questions juives, sous l'autorité de Maurice
Sabatier. Maurice Papon est un fonctionnaire jugé efficace et digne
de confiance par l'occupant nazi.



Début 1943, alors que le sort des armes bascule, Papon assure
avoir rendu des services à la Résistance et avoir fait libérer des
juifs, affirmation qui ne pourra jamais être authentifiée malgré
les témoignages de plusieurs anciens résistants en sa faveur.



Il affirme avoir alors rayé "plus de 200 noms" du fichier juif
tenu méticuleusement à jour par la préfecture. La Libération donne
un nouveau coup de fouet à sa carrière: en août 1944, il est promu
directeur de cabinet de Gaston Cusin, commissaire de la République
de Bordeaux.

Nouveau crime en 1961

Préfet de Corse en 1947, puis de Constantine (Algérie) en 1949,
secrétaire général du résident général au Maroc en 1954, il sera
nommé Préfet de police de Paris en mars 1958, poste qu'il occupera
jusqu'en janvier 1967.



Ce passage dans la capitale sera marqué par une nouvelle polémique
historique. Le 17 octobre 1961, plusieurs dizaines d'Algériens -
200 selon des rapports établis par des historiens - sont tués et
jetés dans la Seine, un crime qui ne sera là aussi reconnu que
quarante années plus tard.

Ministre en 1978

La carrière politique de Maurice Papon atteint son apogée avec
son entrée en 1978 dans le second gouvernement de Raymond Barre, en
qualité de ministre du Budget. Portefeuille qu'il occupera jusqu'à
l'élection de François Mitterrand en mai 1981.



Le parcours, jusque-là sans faute, de ce grand commis de l'Etat
connaîtra un premier accroc avec la publication, entre les deux
tours de l'élection présidentielle, d'un article du "Canard
Enchaîné" qui dénonce son rôle "d'aide de camps" sous l'Occupation.
Des révélations qui mettront en branle une longue, très longue,
procédure judiciaire: entre les premières plaintes contre Maurice
Papon et le procès, il s'écoulera près de dix-sept ans.



agences/het

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Bref exil suisse

Tentant par tous les moyens d'échapper à la justice française, Maurice Papon avait choisi la fuite en Suisse fin 1999.

Le 20 octobre 1999, alors qu'il doit comparaître devant la Cour de cassation de Paris, Maurice Papon fait savoir par communiqué qu'il a choisi «l'exil».

L'ancien secrétaire général de la préfecture de Bordeaux se trouve en réalité en Suisse depuis le 11 octobre dans un hôtel de Martigny (VS) où il séjourne cinq jours, avant de gagner Gstaad, dans l'Oberland bernois.

Maurice Papon y est arrêté le soir du 21 octobre au Posthotel Rössli après avoir été repéré par des policiers français.

Lors de son arrestation, l'ancien fonctionnaire du régime de Vichy fait une crise de tachycardie, ce qui nécessite son transfert à l'Hôpital de l'Ile à Berne. Après plusieurs heures d'observation, Maurice Papon est expulsé par hélicoptère vers Pontarlier, d'où il est transféré à l'hôpital de la prison de Fresnes.

La Suisse fait à cette occasion preuve d'une rapidité de décision exceptionnelle dans une affaire d'extradition. L'expulsion est décidée lors d'une réunion extraordinaire du Conseil fédéral le 22 octobre, soit le lendemain de l'arrestation.

Cette décision, qui ne prévoit aucun moyen de recours, est irréversible. Maurice Papon n'a alors plus le droit de revenir en Suisse.