Retour gagnant pour McLain Ward à Palexpo

Disqualifié de manière injustifiée en avril, alors qu'il était en tête de la finale de la Coupe du monde, McLain Ward a signé un retour payant au CHI-W de Genève, en remportant avec panache le Grand Prix du jeudi. Sur le très aérien Antares, l'Américain a devancé Jeroen Dubbeldam (NED/BMC van Grunsven Simon) et Guy Williams (GBR/Torinto van de Middelstede).

 Quatre Suisses se sont classés dans les dix premiers: Theo Muff (5e), Werner Muff (6e), Daniel Etter (8e) et Christina Liebherr (10e). Etter, sur Atletico, a du même coup obtenu son billet pour le GP Coupe du monde de dimanche. La Jurassienne Dehlia Oeuvray Smits, sur Cerano von Hof, en a fait de même en prenant la 15e place, ne décrochant pas le barrage pour un seul point de dépassement de temps.

Pessoa et Lamaze manquent le coche

Des 48 partants dans cette épreuve, 21 devaient encore obtenir une des 11 places disponibles pour la Coupe du monde dominicale. Et, coup de tonnerre sur Palexpo, Rodrigo Pessoa et le champion olympique Eric Lamaze ont manqué le coche. Si le Canadien pourra au moins se consoler avec la finale du Top 10, le Brésilien, lui, sera tout simplement absent des deux grands rendez-vous du concours genevois. Un camouflet pour lui.

Comme toujours, les cadors ont surtout utilisé les épreuves d'ouverture pour permettre à leurs meilleurs chevaux de prendre leurs marques sur la plus grande piste indoor du monde. A noter que, côté suisse, Steve Guerdat a même sorti ses deux montures de pointe lors du seul premier saut de la journée. Ferrari qui a terminé 19e du GP en soirée s'en est tiré avec un sans faute hors du temps imparti, alors que Jalisca Solier a commis une erreur et, également, un léger dépassement chronométrique.

La vie sans mon crack

Comme en Formule 1, où un grand pilote n'est rien sans une voiture compétitive, le saut d'obstacle est avant tout une affaire de chevaux hors du commun. De cracks, comme on les appelle d'habitude. Quand un cavalier perd sa monture de pointe, c'est tout bonnement la suite de sa carrière qui est menacée.

"Un cavalier moyen sur un cheval exceptionnel peut battre un cavalier exceptionnel sur un cheval moyen", acquiesce Daniel Etter. A l'instar de tous les plus grands spécialistes, le Bernois vient de connaître la mésaventure de perdre son crack, Peu à Peu, que sa propriétaire Esther Steiner ne veut plus voir concourir.

"Je ne m'y attendais pas, raconte-t-il. J'ai tout essayé pour le garder, j'ai même proposé de l'acheter. Mais c'était impossible." Il ne reste plus à Etter qu'à prendre cela avec philosophie. "Tous les cavaliers connaissent cela. Il faut faire avec. Je ne vais pas me pendre."

Ses plus grands succès, le Bernois de 36 ans les a obtenus, en 2009, avec le hongre westphalien: médaille d'or aux Européens par équipes et 6e rang individuel, 10e place de la finale de la Coupe du monde et victoires dans les Grands Prix Coupe du monde d'Oslo, Helsinki et Bois-le-Duc. Perdre Peu à Peu est de ce fait un immense coup d'arrêt dans la carrière d'Etter.

"Je n'ai pas peur pour moi. Par contre, cela va changer la donne concernant ma vie dans le sport de haut niveau." Le Bernois sait qu'il s'apprête à traverser un désert qui peut durer plusieurs années. Le Jeune, Pessoa, Guerdat...

Tout frais champion du monde sur Vigo d'Arsouilles, le Belge Philippe Le Jeune a par exemple dû patienter 18 ans entre sa victoire dans le GP de Genève et son sacre mondial. Presque deux décennies durant lesquelles il a eu l'opportunité de monter de très bons chevaux - Governor, Shogoun, Nistria, Nabab de Rêve (le père de Vigo) - avant de les voir soit arrêter sur blessure, soit confiés ou vendus à d'autres cavaliers.

L'après Calvaro

Même Rodrigo Pessoa a dû ronger son frein quelques temps après la mise à la retraite de son mythique Baloubet du Rouet. Le Brésilien est désormais en train de rebondir, avec notamment Let's Fly et Rebozo. Les Suisses ont eux aussi été confrontés à ce cas de figure. Willi Melliger n'a plus atteint les mêmes sommets après Calvaro. Steve Guerdat, à qui son propriétaire Jan Tops a retiré Tijl van het Pallieterland, a connu une année compliquée avant de retouver, grâce à son mécène, des montures de premier plan, notamment Jalisca Solier.

Daniel Etter insiste sur le fait que la vente d'un crack fait entièrement partie du processus. "Même si je devais un jour posséder un nouveau crack, je réfléchirais à la possibilité de le vendre. Ce n'est pas la gloire qui paie les factures. Il faut se déterminer entre le glamour de la compétition et la réalité. A l'heure où la bourse ne fonctionne pas toujours bien, acheter un cheval peut être un bon investissement."

Et le Bernois de se consoler. "Au moins, je sais que Peu à Peu va bien", explique-t-il en référence au drame vécu par son épouse française Marie Etter-Pellegrin il y a une dizaine d'années, quand ses trois montures Coupe du monde avaient péri dans un incendie. "Je suis un guerrier. Dans une pente descendante, je suis capable de doubler mes forces. Cette histoire m'a aussi remis les pieds sur terre après une année 2009 exceptionnelle."

si/alt