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Le documentaire "Dahomey" de Mati Diop remporte l'Ours d'or à Berlin

La réalisatrice franco-sénégalaise Mati Diop a remporté l'Ours d'or à Berlin. [KEYSTONE - CLEMENS BILAN]
Le documentaire "Dahomey" de Mati Diop rempote l'Ours d'or à la Berlinale / Le Journal horaire / 15 sec. / le 24 février 2024
La Berlinale a sacré samedi une réalisatrice franco-sénégalaise de 41 ans, Mati Diop, pour son documentaire "Dahomey". Ce film porte sur la question brûlante de la restitution par les anciennes puissances coloniales d'oeuvres d'art volées en Afrique.

La coproduction italo-helvétique "Gloria!" de la jeune actrice et chanteuse italienne Margherita Vicario, également en lice pour la prestigieuse distinction, n'a pas été primé.

En récompensant un film qui aborde frontalement la question post-coloniale, le jury présidé par l'actrice mexicano-kényane Lupita Nyong'o, première personnalité noire à occuper ce poste prestigieux, est resté fidèle à la tradition politique de ce festival.

"Nous pouvons soit oublier le passé, une charge désagréable qui nous empêche d'évoluer, ou nous pouvons en prendre la responsabilité, l'utiliser pour avancer", a déclaré Mati Diop en recevant son prix, après avoir cité l'intellectuel martiniquais Aimé Césaire.

"En tant que Franco-Sénégalaise, cinéaste afrodescendante, j'ai choisi d'être de ceux qui refusent d'oublier, qui refusent l'amnésie comme méthode", a déclaré Mati Diop en recevant son prix. "Je suis solidaire des Sénégalais qui se battent pour la démocratie et la justice", a-t-elle ajouté, avant d'afficher également sa "solidarité avec la Palestine".

Deuxième film africain primé

"Dahomey" raconte la restitution en novembre 2021 au Bénin de 26 oeuvres pillées en 1892 par les troupes coloniales françaises. Un mouvement amorcé ces cinq dernières années par les anciennes puissances occidentales, dont la France, l'Allemagne et la Belgique.

Mati Diop, fille du musicien sénégalais Wasis Diop, et d'une mère travaillant dans l'art, qui est née et a grandi à Paris, avait déjà remporté à Cannes en 2019 pour "Atlantique" le Grand prix, la plus haute distinction après la Palme d'Or.

Il s'agit du deuxième film africain à recevoir l'Ours d'or (après le sud-africain "U-Carmen e-Khayelitsha" ("Carmen de Khayelitsha") de Mark Dornford-May en 2005). Mati Diop succède au Français Nicolas Philibert, Ours d'or l'an dernier.

Dans la lignée des réalisatrices françaises primées

La réalisatrice franco-sénégalaise ajoute son nom à une jeune garde de réalisatrices françaises qui ont cumulé les prix majeurs ces dernières années: Julia Ducournau (Palme d'Or à Cannes en 2021), Audrey Diwan (Lion d'or à Venise la même année), Alice Diop (deux prix à Venise en 2022) et bien sûr Justine Triet, qui vient de dominer les César après avoir remporté la Palme d'or l'an dernier à Cannes et est en lice pour les Oscars.

Pour raconter l'histoire de 26 oeuvres pillées en 1892 par les troupes coloniales françaises au royaume du Dahomey, dans le centre-sud du Bénin actuel, composé alors de plusieurs royaumes, Mati Diop fait parler en voix off la statue anthropomorphe du roi Ghézo.

Dans la langue du Bénin, le fon, il se plaint de ne plus porter de nom, seulement un numéro, "le 26", dans les réserves du musée du quai Branly à Paris. Il décrit son arrachement à sa terre, sa vie en exil, puis son récent rapatriement dans un musée de Cotonou, la capitale du Bénin.

Les présidents français Emmanuel Macron et béninois Patrice Talon, à l'origine de cette restitution qui a eu lieu le 10 novembre 2021, n'apparaissent pas dans le film. La réalisatrice insiste sur le fait que seules ces 26 oeuvres avaient été rendues "par rapport aux 7000 oeuvres encore captives au musée du quai Branly" à Paris.

ats/jfe

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Prix d'interprétation pour Sebastian Stan

Le jury de la 74e Berlinale a également récompensé l'acteur roumano-américain Sebastian Stan ("A Different Man"), prix de la meilleure interprétation. Il a décerné son Grand prix du jury à un grand habitué du festival, le réalisateur sud-coréen Hong Sang-soo pour un film avec Isabelle Huppert ("A Traveller's Needs"), et son prix du jury à "L'Empire" du Français Bruno Dumont.

Sur les sept co-productions suisses projetées dans le cadre de la Berlinale, "Reinas" de Klaudia Reynicke s'est distingué en recevant le prix du meilleur film dans la catégorie "Generation Kplus". Cette coproduction suisse-péruvienne-espagnole retrace le parcours d'une fille et de sa mère qui prévoient, en 1992, de quitter le Pérou pour les Etats-Unis.